FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 14350  de  M.   Rome Yves ( Socialiste - Oise ) QE
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  11/05/1998  page :  2617
Réponse publiée au JO le :  29/03/1999  page :  1890
Rubrique :  entreprises
Tête d'analyse :  redressement judiciaire
Analyse :  créances des salariés. garantie
Texte de la QUESTION : M. Yves Rome appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les effets pervers pour les salariés, de l'interprétation restrictive des dispositions du décret n° 76-1065 du 25 novembre 1976 et précisément de l'article D. 143-2 du code du travail. La loi n° 73-1194 du 27 décembre 1973 a institué une garantie de paiement des salariés en cas de redressement judiciaire et a créé à cet effet un régime d'assurance mis en oeuvre par l'association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés (AGS). La loi n° 75-1251 du 27 novembre 1975 a introduit, pour combattre les fraudes, la notion de limitation des créances d'un salarié et a renvoyé à un décret la fixation des plafonds. Le décret n° 76-1065 du 25 décembre 1976 (art. D. 143-2) limite les garanties de l'A.G.S. : cas général : « treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage lorsque les créances résultent des stipulations d'une convention collective » ; autre cas : « dans les autres cas, quatre fois le plafond mentionné ci-dessus ». Cette seconde disposition n'ambitionnait que de sanctionner les fraudes et les contrats de complaisance. La rédaction de de décret a autorisé une dérive juridique aboutissant à exclure du plafond 13 tous les salaires supérieurs aux stipulations des conventions collectives et à remener dans cette hypothèse l'intervention de l'AGS au plafond 4. Cette interprétation sévère de l'article D. 143-2 par l'AGS pénalise gravement les salariés payés au-dessus du minimum garanti par les conventions collectives. S'y ajoutent divers désagréments liés au calcul non plafonné des cotisations sociales ou encore aux délais de carence appliqués par les ASSEDIC. Cette situation pénalise financièrement de nombreux salariés, aggrave les périodes de chômage non indemnisées et exclut du « plafond 13 » certaines catégories professionnelles. Il lui demande donc de lui indiquer les initiatives législatives ou réglementaires qu'elle entend prendre afin de corriger ces injustices flagrantes et ces dérives inacceptables pour les salariés concernés déjà pressenties dans le rapport Caillé (1973) puis par les élus de gauche à l'Assemblée nationale, lors de sa séance du 15 décembre 1975.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les modalités de mise en oeuvre des plafonds relatifs à la prise en charge des créances salariales par l'Association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés (AGS) en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l'employeur. Elle estime en effet que l'interprétation qui est faite des textes applicables en la matière constitue une véritable dérive juridique, laquelle génère de nombreux effets pervers. L'article D. 143-2 du code du travail prévoit en effet l'existence d'un double plafond établi sur la base de 4 et 13 fois le plafond mensuel de l'assurance chômage (soit 16 et 52 fois le plafond de la sécurité sociale). Le plafond 13 est applicable aux seules créances résultant de dispositions législatives ou réglementaires ou de stipulations d'une convention collective et nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire. Le plafond 4 s'applique dans les autres cas. Jusqu'à présent les services de la délégation AGS à l'UNEDIC ont fait une interprétation restrictive de cet article, en se fondant sur la jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation. La Haute Juridiction considérait en effet comme relevant du plafond 13 les créances résultant des dispositions législatives ou réglementaires ou d'une convention collective, qui portent sur des salaires, autres rémunérations, indemnités dont le montant lui-même a été fixé par une loi, un règlement ou une convention collective (arrêt du 5 avril 1994, ASSEDIC de la région Auvergne contre M. Sudre). Il ressortait de cet arrêt que les salaires, rémunérations et indemnités dont l'existence trouve son origine dans des dispositions législatives ou réglementaires ou dans les conventions collectives, mais dont le montant aété fixé par la volontécommune des parties, relevaient du plafond 4. Une créance dont le montant était supérieur à celui qui aurait résulté de la simple application des textes législatifs, réglementaires et conventionnels relevait donc du plafond 4 pour son intégralité.Il est précisé à l'honorable parlementaire que la Cour de cassation vient de procéder à un revirement de sa jurisprudence par un arrêt du 15 décembre 1998, AGS de Paris et UNEDIC contre Boue et Sudre.Il ressort de cet arrêt que le plafond 13 s'applique aux créances du salarié qui trouvent leur fondement dans une loi, un règlement ou une convention collective, peu important que leur montant ne soit pas lui-même fixé par une de ces sources de droit. La rémunération du salarié, contrepartie de son travail, relève donc du plafond 13, même lorsque son montant est fixé par l'accord des parties. Le plafond 4 s'applique dans les autres cas. Cette nouvelle interprétation jurisprudentielle de l'article D. 143-2 du code du travail apparaît de nature à remédier aux difficultés évoquées par l'honorable parlementaire. Par ailleurs, en ce qui concerne le précompte de la part salariale des cotisations sociales, il convient de noter que les relevés des créances salariales servant de base aux avances de l'AGS sont désormaisétablis en « brut » et non en « net », les sommes avancées par l'AGS aux mandataires de justice correspondant au montant brut et non pas net des créances salariales. La répartition des sommes ainsi avancées entre le salarié et les organismes sociaux incombe au mandataire. Dans l'hypothèse où le montant des sommes dues au salarié est supérieur au plafond de la garantie, il appartient au mandataire de procéder à cette répartition en calculant la part salariale des cotisations sociales sur le montant avancé par l'AGS et non sur le montant global des créances salariales.L'article L. 143-11-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 27 décembre 1996 de financement de la sécurité sociale pour 1997, précise en effet que la garantie de l'AGS incluant les cotisations et contributions sociales salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle est imposée par la loi. Le précompte ne peut donc pas porter sur des sommes qui ne seraient pas versées au salarié par le mandataire. Les sommes restant dues tant au salarié qu'aux organismes sociaux pourront le cas échéant être réglées sur les actifs éventuellement disponibles, sans interruption de l'AGS.
SOC 11 REP_PUB Picardie O