FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1515  de  M.   Roatta Jean ( Démocratie libérale et indépendants - Bouches-du-Rhône ) QOSD
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  01/10/2001  page :  5485
Réponse publiée au JO le :  03/10/2001  page :  5292
Rubrique :  TVA
Tête d'analyse :  taux
Analyse :  hôtellerie et restauration
Texte de la QUESTION : M. Jean Roatta attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le différentiel existant entre les taux de TVA applicables, d'une part, à la restauration industrielle et d'entreprise ou à la restauration rapide et, d'autre part, à la restauration traditionnelle. Celui-ci représente une charge excessive pour cette dernière, pénalise son expansion et fragilise même son existence. Aussi il lui demande ses intentions quant à l'abaissement du taux de TVA applicable au secteur de la restauration traditionnelle.
Texte de la REPONSE :

TAUX DE TVA DANS LE SECTEUR
DE LA RESTAURATION

    M. le président. Jean Roatta a présenté une question n° 1515, ainsi rédigée :
    « M. Jean Roatta attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le différentiel existant entre les taux de TVA applicables, d'une part, à la restauration industrielle et d'entreprise ou à la restauration rapide et, d'autre part, à la restauration traditionnelle. Celui-ci représente une charge execessive pour cette dernière, pénalise son expansion et fragilise même son existence. Aussi il lui demande ses intentions quant à l'abaissement du taux de TVA applicable au secteur de la restauration traditionnelle. »
    La parole est à M. Jean Roatta, pour exposer sa question.
    M. Jean Roatta. Monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation, vous savez combien la restauration traditionnelle française, qui participe avec une incomparable virtuosité au rayonnement culturel de notre beau pays à travers le monde, pâtit cruellement du différentiel entre les taux de TVA applicables, d'une part, à sa propre activité, d'autre part à la restauration industrielle et d'entreprise ou à la restauration rapide à emporter.
    Cette disparité injuste, qui représente une charge excessive pour la restauration traditionnelle, pénalise son expansion et fragilise même son existence. De plus, les sombres événements qui viennent d'endeuiller notre planète sont de nature à provoquer une décroissance de la circulation des individus à travers le monde. Par voie de conséquence, le spectre d'une dégradation de l'activité plane de plus en plus sur le secteur de la restauration traditionnelle.
    Cette surprenante différence de taux de TVA ne fait qu'accroître les difficultés d'un domaine d'activité employant plusieurs dizaines de milliers de personnes, dont la vitalité et l'esprit d'entreprise sont pourtant le ferment d'un formidable réservoir d'emplois que l'on pourrait inciter à s'épanouir ; tel n'est malheureusement pas le cas.
    Alors que huit pays de l'Union européenne - l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas entre autres - ont déjà obtenu une dérogation à l'application de la directive impliquant la fixation du taux normal de TVA dans ce domaine d'activité, le gouvernement français refuse d'envisager une réduction du taux applicable aux services fournis par les établissements de restauration traditionnelle. Le principal motif invoqué, notamment par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, est que la directive du 19 octobre 1992 relative au rapprochement des taux de TVA ne permet pas à la France d'appliquer à la restauration traditionnelle un taux de TVA différent du taux normal.
    Le ministre a précisé : « Elle n'a, sur ce point, pas été modifiée par la directive relative aux services à forte densité de main-d'oeuvre, dès lors que la restauration ne figure pas sur la liste arrêtée lors du conseil Ecofin du 8 octobre 1999. »
    Pour éviter de voir ce secteur économique s'effondrer tout entier face à la convergence des trois paramètres que sont la soumission à un taux de TVA trop élevé, la possibilité d'une réduction du nombre de touristes et la mise en oeuvre des 35 heures, le Gouvernement ne pourrait-il pas envisager de donner un signe fort de sa volonté de redonner le moral à ce secteur d'activité en admettant la nécessité d'appliquer un taux réduit de TVA à la restauration traditionnelle et en intervenant dès à présent auprès de Bruxelles pour rendre cette réforme effective ?
    M. François Guillaume. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.
    M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Monsieur le député, la question de la réduction du taux de TVA de 18,6 % à 5,5 % pour la restauration est souvent évoquée dans cette assemblée. A plusieurs reprises, le ministre de l'économie et des finances a répondu qu'une telle évolution n'était pas envisageable pour un certain nombre de raisons. J'ajoute que les événements dramatiques qui viennent de survenir et qui font peser de lourdes menaces sur l'économie - mais vous avez pu lire, comme moi, ce matin, que les consommateurs français réagissaient plutôt favorablement - ne permettent pas d'envisager cette réduction dans l'immédiat.
    Une telle baisse de la TVA n'est possible ni sur le plan budgétaire ni sur le plan juridique. Vous avez d'ailleurs apporté vous-même des éléments qui confortent cette position.
    Sur le plan budgétaire, le coût de cette mesure est estimé à 20 milliards de francs, 3 milliards d'euros. De surcroît, les professionnels de la restauration admettent qu'ils ne la répercuteraient pas sur les prix, mais qu'elle leur servirait à compenser une partie de leurs charges. Quel serait donc l'intérêt pour le contribuable d'une mesure de TVA qui coûterait 3 milliards d'euros à l'Etat et qui n'aurait pas de répercussion pour les consommateurs. A moins d'amputer massivement les dépenses ou d'augmenter les impôts, nous paraît donc incompatible avec la poursuite de la réduction du déficit et de la dette de l'Etat que, comme les députés de la majorité, vous appelez de vos voeux.
    Par ailleurs, il existe un obstacle juridique sérieux, monsieur le député : l'absence de la restauration parmi les services éligibles au taux réduit de TVA mentionnés dans l'annexe H à la sixième directive TVA, que vous avez citée. Or cette situation n'a pas été modifiée par l'adoption de la directive sur les services à forte intensité de main d'oeuvre. Elle ne pourrait l'être que si la Commission européenne prenait l'initiative de formuler une proposition en ce sens, laquelle devrait ensuite être adoptée à l'unanimité par les membres de l'Union. L'application d'un taux réduit à la consommation demeure donc juridiquement très difficile à mettre en oeuvre aujourd'hui.
    En tout état de cause, les règles relatives à la TVA n'entraînent pas de distorsion de concurrence dans le secteur de la restauration.
    En premier lieu - et cela est très important -, toutes les opérations de vente à consommer sur place du secteur de la restauration commerciale sont, quelle que soit leur forme, leur application ou l'établissement dans lequel elles sont réalisées, soumises au taux normal de TVA. Seules les ventes à emporter de produits alimentaires ou de plats préparés bénéficient d'un taux réduit.
    Ces règles, qui sont conformes au droit communautaire, s'expliquent par le fait qu'un restaurateur ne livre pas uniquement un produit mais offre à ses clients une pluralité de services. Bien entendu, elles s'appliquent également aux établissements de restauration rapide, quelle que soit leur spécialité : hamburgers, pizzas, viennoiseries ou sandwiches. Ainsi, lorsque ces établissements réalisent à la fois des ventes à consommer sur place et des ventes à emporter, ils doivent ventiler leur chiffre d'affaires pour soumettre les premières au taux normal et les secondes au taux réduit, ce qui assure une stricte égalité quant aux conditions de la concurrence.
    M. François Guillaume. Et la fraude ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation Rassurez-vous, monsieur le député : les services de la DGCCRF, très mobilisée aujourd'hui sur l'euro, le sont également sur ce sujet, d'autant qu'il relève pour partie de ma compétence de lutter contre cette fraude.
    En ce qui concerne la restauration collective, l'exonération de TVA dont bénéficiaient les repas servis au personnel a été rapportée à la demande des professionnels de la restauration, qui considéraient que les cantines leur faisaient une concurrence déloyale. Le dispositif retenu par le Gouvernement, c'est-à-dire la taxation à taux réduit des repas fournis au personnel, a fait l'objet d'une large consultation : il est conforme au droit, tout en respectant la dimension sociale de la restauration collective. En tout état de cause, il paraît difficile de soutenir que les cantines d'entreprise et les restaurants traditionnels sont en concurrence, et que le régime de TVA fausse cette dernière.
    Cela étant, le Gouvernement reste attentif à la situation du secteur de la restauration, qui bénéficiera pleinement des baisses d'impôt décidées, en particulier la suppression progressive de la part salariale dans l'assiette de la taxe professionnelle et la réduction des cotisations patronales mises en oeuvre depuis quelques années. Il semble d'ailleurs que l'allégement des charges sociales constitue une réponse plus appropriée aux difficultés de ce secteur qu'une baisse de la TVA, notamment dans le cadre de la mise en oeuvre des 35 heures, laquelle a fait récemment l'objet d'un accord que le Gouvernement souhaite étendre.
    En liaison avec la signature de cet accord, le Gouvernement a décider d'alléger les charges salariales pesant sur la valeur des repas servis aux employés des restaurants, ce qui représente un avantage de 500 millions de francs en année pleine. Cette mesure, qui a pris effet le 1er janvier 2001, s'ajoute aux allégements prévus par la loi Aubry pour la RTT, lesquels seront eux-mêmes adaptés afin de tenir compte des horaires de travail particuliers dans ce secteur.
    Certes, monsieur le député, nous n'avons pas généralisé le taux réduit dans tous les secteurs, comme nous l'avons fait en faveur du bâtiment, à la demande de la profession, ce qui a eu des effets bénéfiques en matière de lutte contre le travail au noir et de relance de l'activité. Néanmoins, je vous rappelle que nous avons tout de même baissé d'un point le taux normal de TVA depuis que nous sommes aux responsabilités, et tout le monde peut espérer que nous reviendrons un jour aux 18,6 % que nous avions laissés auparavant.
    M. François Guillaume. Vous augmentez la pression fiscale !

DL 11 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O