CLASSEMENT DU SITE DU LAC DE LONGEMER
DANS LES VOSGES
M. le président.
M. Claude Jacquot a présenté une question, n° 1517, ainsi rédigée :
« Claude Jacquot appelle
l'attention de M. le ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement sur la procédure de classement du lac de la commune
Xonrupt-Longemer, dans le département des Vosges. En 1998, la municipalité de
Xonrupt-Longemer a commandé une étude à un cabinet privé afin d'établir un
diagnostic sur les atouts et faiblesses de la commune. Celle-ci a débouché sur
des propositions concernant le développement économique de la commune et les
aménagements possibles. Suite à la présentation de cette étude et après
proposition de la Commission départementale des sites, le ministère a décidé, le
26 décembre 2000, du lancement d'une instance de classement sur un
certain nombre de parcelles du site du lac de Longemer sans aucune concertation
avec le conseil municipal ou les habitants de la commune. Cette procédure, qui a
été lancée en pleine période préélectorale et dont l'enquête publique s'est
achevée la veille de l'élection du nouveau bureau municipal, est mal ressentie
par la population et la municipalité. Les délibérations du conseil municipal
(ancienne et nouvelle municipalité) et les réactions de la population, décrites
par le commissaire enquêteur, attestent de cette hostilité. Les habitants et
élus de cette commune regrettent en effet l'absence de concertation dans ce
dossier pour lequel l'ouverture d'une instance de classement apparaît comme une
procédure unilatérale et « ultime ». Ils sont bien entendu favorables à une mise
en valeur du site et ne sont pas opposés à sa protection - qu'ils espèrent
pour les générations futures -, mais ils souhaiteraient obtenir un
moratoire ou une révision de la procédure telle qu'elle a été imposée, ne
serait-ce que pour étudier d'autres alternatives qui associeraient la population
et la municipalité (comme la mise en place d'un plan local d'urbanisme, par
exemple, procédure à laquelle les services de l'Etat sont partenaires). Au
regard de cette requête, qui privilégie l'information du public ainsi qu'une
logique de démocratie locale participative telle qu'on la préconise aujourd'hui,
il souhaiterait connaître sa position et ses intentions sur ce dossier. »
La parole est à M. Claude
Jacquot, pour exposer sa question.
M. Claude Jacquot.
Monsieur le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, ma
question, à laquelle s'associe mon collègue François Vannson, député de la
troisième circonscription des Vosges, porte sur la procédure de classement du
lac de la commune de Xonrupt-Longemer.
La vallée des lacs est, vous le
savez, une des richesses naturelles du massif vosgien. Parmi ces lacs, celui de
Wonrupt-Longemer est certainement l'un des plus beaux et des plus attractifs,
une des perles du tourisme local.
En 1998, la municipalité de
Xonrupt-Longemer a commandé une étude à un cabinet privé afin d'établir un
diagnostic sur ses atouts et ses faiblesses. Cette étude a débouché sur des
propositons concernant le développement économique de la commune et les
aménagements possibles.
Suite à
la présentation de cette étude et après proposition de la commission
départementale des sites, le ministère a décidé, le 26 décembre 2000,
le lancement d'une instance de classement sur un certain nombre de parcelles du
site du lac de Longemer, sans concertation avec le conseil municipal ou les
habitants de la commune.
Cette
procédure, engagée pendant la campagne des municipales et dont l'enquête
publique s'est achevée, d'ailleurs, à la veille de l'élection de la nouvelle
équipe a été assez mal ressentie par la population comme par les élus. Les
délibérations du conseil municipal - qu'il se soit agi d'ailleurs de l'ancienne
ou de la nouvelle municipalité - tout comme les réactions de la population
décrites par le commissaire enquêteur attestent de ce ressentiment. Les
habitants et les élus, et même au-delà de la commune, regrettent l'absence de
concertation dans ce dossier pour lequel l'ouverture d'une instance de
classement apparaît véritablement comme une procédure unilatérale et « ultime ».
Ils sont évidemment favorables à une mise en valeur du site et aucunement
opposés à des mesures de protection, qu'ils appellent d'ailleurs pour les
générations futures, mais ils aimeraient obtenir un moratoire ou une révision de
la procédure telle qu'elle a été imposée, ne serait-ce que pour étudier d'autres
solutions alternatives qui associeraient la population et la municipalité, comme
l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, procédure à laquelle les services de
l'Etat sont étroitement associés.
Au regard de cette requête, qui
privilégie l'information au public ainsi qu'une logique de démocratie locale
participative telle qu'on la préconise aujourd'hui, puis-je, monsieur le
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, connaître votre
position et vos intentions ?
M. le président. La
parole est à M. le ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement.
M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement. Monsieur le député, je vous remercie de me donner
l'occasion d'apporter quelques précisions sur la procédure de classement du site
du lac de Longemer, qui intéresse à l'évidence la commune vosgienne de
Xonrupt-Longemer, et peut-être également de dissiper quelques malentendus qui
portent tant sur la procédure elle-même et que sur le classement des sites en
général. Mon cabinet a reçu la semaine dernière des élus de Xonrupt-Longemer sur
ce dossier, mais un petit rappel historique me paraît nécessaire, de même que
quelques commentaires sur certains titres publiés dans la presse locale
- même si la presse est naturellement libre en France et a le droit de
titrer comme elle l'entend.
Le
21 septembre 2000, la commission départementale des sites, perspectives et
paysages des Vosges a été saisie d'une étude analysant l'évolution passée du
site du lac de Longemer et proposant trois options pour son évolution future. Le
site est inscrit depuis les années quarante, et ses qualités, que personne
ne conteste, ont entraîné, d'une part, une fréquentation touristique légitime,
d'autre part, une multiplication des aménagements et des équipements
correspondants, réalisés ou en projet.
Face à des risques évidents de
banalisation et d'altération du site, la commission, à l'unanimité, a demandé à
l'Etat une mesure d'urgence, à savoir une instance de classement, telle que
prévue par la loi du 2 mai 1930 sur les sites désormais intégrée au code de
l'environnement. Le préfet des Vosges en a informé mes services dès le
25 septembre en appuyant très clairement cette demande.
L'instance de classement a, vous
l'avez rappelé, été prononcée à la fin du mois de décembre suivant, après une
réflexion approfondie, et la procédure de classement du site a été
officiellement engagée ; le maire de Xonrupt-Longemer en a été le premier
informé. On ne saurait dans ces conditions parler de mauvaise information.
L'instance de classement signifie
essentiellement que, pendant les douze mois suivant sa notification
individualisée aux propriétaires concernés, ceux-ci ne peuvent modifier l'état
des lieux ou leur aspect, sauf autorisation spéciale. Au terme de ces douze
mois, si le classement n'est pas intervenu, les propriétés en question retombent
dans le droit commun. Connaissant les relatives pesanteurs de l'instruction d'un
classement de site, je ne saurais reprocher au préfet des Vosges d'avoir
diligenté l'enquête administrative sans attendre que les élections municipales
aient eu lieu.
Je vous renvoie,
pour le déroulement de la procédure et notamment les extrêmes précautions prises
afin de ne classer que les propriétés qui le justifient, aux précisions
apportées par ma prédécesseure, Mme Dominique Voynet, à M. Jean-Pierre
Giran, député du Var, en réponse à sa question écrite du 28 août 2000
- réponse publiée au Journal officiel du
6 novembre 2000. Je vous assure simplement que le classement du lac de
Longemer bénéficiera de toutes ces précautions et que, si l'on peut regretter
quelques maladresses ou défauts de communication, il y sera prochainement
remédié, à moins que cela n'ait déjà été fait.
En tout état de cause, sitôt
l'enquête terminée, la commission départementale des sites a examiné le dossier
le 4 mai dernier, c'est-à-dire après les élections municipales, et lui a
donné avis favorable par treize voix pour et trois abstentions, en écartant par
ailleurs l'option « retour à la nature » envisagée par l'étude précitée.
Le 6 juin, la commission
supérieure a adopté le principe du classement et le périmètre proposé à
l'unanimité moins une abstention. Le Conseil d'Etat va devoir maintenant rendre
son avis. Mais, sans attendre, mon cabinet a reçu la semaine dernière des élus
de Xonrupt-Longemer pour envisager avec eux des rythmes de la concertation et
des modalités nécessaires à une bonne avancée de cette procédure. En d'autres
termes, la concertation avec les élus locaux est d'ores et déjà bien engagée.
Les élus que nous avons rencontrés
n'ont pas remis en cause le principe du classement. Ils demandent seulement,
d'une part, que sa mise en oeuvre soit établie, d'autre part, que des éléments
d'information plus approfondis leur soient apportés ainsi qu'à toute la
population. Nous en sommes tout à fait d'accord. Nous allons nous appliquer, en
coordination avec la préfecture, à étaler la procédure et à renforcer la
concertation et l'information auprès de la population.
Cette séance de travail a permis
aux nouveaux élus de la commune de Xonrupt-Longemer d'exposer leur position et
de recevoir l'assurance que le classement ne doit en aucun cas être tenu pour
une sorte de gel. « Coup de gel sur le dossier du lac », a-t-on pu lire, à côté
d'une photo destinée à illustrer un sujet, au demeurant plus large que celui qui
nous occupe. Et d'écrire, dans son édition La Liberté de
l'Est, du vendredi 12 octobre - c'est tout récent : « Le ministère
de l'environnement vient effectivement de faire savoir qu'il allait procéder au
gel du dossier. » Toujours le vendredi 12, dans L'Est républicain cette fois : « Le classement gelé ».
Il ne s'agit pas du tout de gel. Nous voulons seulement renforcer l'information,
la concertation et permettre un étalement de ce dossier.
Tous les partenaires intéressés
seront appelés à participer activement à la mise en valeur et la restauration du
site, qu'il faut considérer non comme une fin en soi, mais comme un nouveau
départ pour un espace dont le caractère exceptionnel - vous le savez mieux
que moi - appelle une gestion désormais exemplaire au bénéfice des
générations futures, et sans préjudice des intérêts bien compris de ceux
auxquels il doit de conserver une bonne part de ses qualités originelles.
Je ne peux enfin que regretter ces
erreurs de communication, mais également le fait que des agents de mes services
du ministère agissant simplement dans le cadre de leurs fonctions - il faut
faire une procédure de classement, ils la font - aient parfois été
personnellement pris à partie et d'une manière inacceptable. La communication et
la concertation seront renforcées ; je crois que c'était nécessaire, après la
rencontre que nous avons eue la semaine dernière. L'intérêt, les modalités, les
effets des classements des sites, tout cela sera de nouveau examiné. Mais je
déplore les propos inconsidérés dont ont été victimes des fonctionnaires de
l'Etat chargés de mettre en oeuvre une politique nationale de protection des
espaces remarquables de France, dont le site de Longemer.
M. le président. La
parole est à M. Claude Jacquot.
M. Claude Jacquot. Je
vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse positive qui replace les
élus et les habitants du secteur au centre de la réflexion. Ils sont très
attachés à leur site et à sa protection. Nous pouvons leur faire confiance pour
participer de façon constructive à un projet futur pour le lac de Longemer.