CONDITIONS DE DÉLIVRANCE
DES MÉDICAMENTS VÉTÉRINAIRES
M. le président.
M. Jean-Claude Daniel a présenté une question, n° 1526, ainsi rédigée
:
« Jean-Claude Daniel attire
l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur
l'application de la loi relative à la pharmacie vétérinaire. Aujourd'hui, le
pharmacien a un monopole de loi sur la vente des produits, au détriment du
vétérinaire, dont la seule parade efficace est de ne plus rédiger d'ordonnance
a priori, ou très peu, et de l'annexer à la
délivrance ou à la facturation des produits : ordonnance n'ayant plus rien à
voir avec l'esprit ou le principe voulu par le législateur. Le vétérinaire
conserve ainsi un monopole de fait sur tous ces produits, car il les délivre
dans trois cas de figure : après examen de l'animal malade, pour son traitement
et le suivi des animaux susceptibles d'être contaminés ; sur demande de
l'éleveur qui se présente spontanément à son cabinet, où se tient une "officine
ouverte. Il s'agit principalement de médicaments nécessaires à l'entretien d'un
troupeau ; à son initiative ou à celle de l'éleveur, dans le cas de traitements
préventifs destinés à être systématiquement administrés au troupeau. Le
pharmacien, quant à lui, voit peu d'éleveurs lui remettre une ordonnance contre
la délivrance de produits vétérinaires. Pourtant, malgré l'opposition des
vétérinaires, il suit l'esprit de la loi en comptabilisant sur un ordonnancier,
même sans ordonnance, la vente des produits vétérinaires pour en respecter la
traçabilité. On constate ainsi une défaillance du système puisque le pharmacien
se met en infraction avec la législation et le vétérinaire n'est pas assuré du
bon usage des traitements délivrés aux éleveurs. Le système actuel permet donc à
l'éleveur de traiter un animal avec des médicaments provenant soit d'un
traitement destiné à un autre animal, soit de filières autres que le vétérinaire
ou la pharmacie. Car il est possible aujourd'hui d'acheter n'importe quel
produit vétérinaire à l'étranger ou sur des sites internet, sans aucune
possibilité de traçabilité desdits produits. On peut s'interroger sur
l'administration et le bon usage du produit par le propriétaire de l'animal.
Aussi l'interroge-t-il sur la mise en place d'un dispositif permettant d'évaluer
la responsabilité de l'éleveur ou du détenteur de l'animal, par des contrôles
effectués au moment de la vente des produits vétérinaires. »
La parole est à M. Claude
Jacquot, suppléant de M. Jean-Claude Daniel, pour exposer la question de
celui-ci.
M. Claude Jacquot. La
question que je pose au nom de mon collègue Jean-Claude Daniel, momentanément
empêché, porte sur l'application de la loi relative à la pharmacie
vétérinaire.
Monsieur le
ministre de l'agriculture et de la pêche, aujourd'hui, le pharmacien a un
monopole de loi sur la vente des produits, au détriment du vétérinaire, dont la
seule parade efficace est de ne plus rédiger d'ordonnance a priori, ou très peu, et de l'annexer à la délivrance
ou à la facturation des produits : cette ordonnance n'a alors plus rien à voir
avec l'esprit ou le principe voulu par le législateur.
Le vétérinaire conserve ainsi un
monopole de fait sur les produits qu'il délivre dans trois cas de figure.
Le premier est, après examen de
l'animal, pour son traitement et le suivi des animaux susceptibles d'être
contaminés.
Le deuxième est, sur
demande de l'éleveur qui se présente spontanément à son cabinet, où se tient une
« officine ouverte ». Il s'agit principalement de médicaments nécessaires à
l'entretien d'un troupeau.
Le
troisième cas de figure, enfin, est à son initiative ou à celle de l'éleveur,
dans le cas de traitements préventifs destinés à être systématiquement
administrés au troupeau.
Le
pharmacien, quant à lui, voit peu d'éleveurs lui remettre une ordonnance contre
la délivrance de produits vétérinaires. Pourtant, malgré l'opposition des
vétérinaires, il suit l'esprit de la loi en comptabilisant sur un ordonnancier,
et même parfois en l'absence d'ordonnance, la vente des produits vétérinaires
pour en respecter la traçabilité.
On constate ainsi une défaillance
du système à deux niveaux : d'abord, pour le pharmacien, qui se met en
infraction avec la législation ; ensuite, pour le vétérinaire, qui n'est pas
assuré du bon usage des traitements délivrés aux éleveurs.
Le système actuel permet à
l'éleveur de traiter un animal avec des médicaments provenant soit d'un
traitement destiné à un autre animal, soit de filières autres que le vétérinaire
ou la pharmacie. Car il est possible aujourd'hui d'acheter n'importe quel
produit vétérinaire à l'étranger ou sur des sites Internet sans aucune
possibilité de traçabilité desdits produits. Les conséquences de cette faiblesse
du système sont au coeur de nos préoccupations de santé publique.
On peut s'interroger sur
l'administration et le bon usage du produit par le propriétaire de l'animal. Dès
lors, comment évaluer la bonne utilisation du produit délivré, car il ne s'agit
pas de mettre en cause la qualité du produit mais son utilisation ?
Aussi, monsieur le ministre, ne
devrait-on pas s'interroger sur la mise en place d'un dispositif permettant
d'évaluer la responsabilité de l'éleveur ou du détenteur de l'animal par des
contrôles effectués au moment de la vente des produits vétérinaires ?
M. le président. La
parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le député, vous appelez mon attention sur l'application de la loi
relative à la pharmacie vétérinaire en ce qui concerne la vente au détail des
médicaments vétérinaires par les pharmaciens et les vétérinaires, et, plus
particulièrement, sur le bon usage de ces produits.
Comme vous le savez, la délivrance
au détail des médicaments vétérinaires ne peut être effectuée que par des ayants
droit définis par le code de la santé publique, à savoir des pharmaciens
titulaires d'une officine ou des vétérinaires dans le cadre de leur clientèle,
c'est-à-dire lorsqu'il s'agit pour eux de soigner des animaux auxquels ils
donnent personnellement leurs soins ou dont la surveillance sanitaire et les
soins leur sont régulièrement confiés.
Ces pharmaciens et ces vétérinaires
doivent par ailleurs être inscrits à l'ordre professionnel dont ils dépendent
et, de ce fait, sont soumis aux règles édictées par le code de déontologie
régissant leur profession. La délivrance des médicaments vétérinaires contenant
des substances présentant un danger pour la santé publique est soumise à la
rédaction d'une ordonnance par un vétérinaire qui doit être remise
obligatoirement à l'utilisateur.
Les pharmaciens d'officine ne
peuvent délivrer au public sans présentation d'une ordonnance que les seuls
médicaments vétérinaires ne présentant aucun danger pour la santé publique.
La délivrance de médicaments
vétérinaires sans ordonnance, alors qu'ils sont soumis à prescription
vétérinaire, est passible d'une contravention de cinquième classe,
indépendamment des sanctions qui peuvent être prononcées à l'encontre des
vétérinaires et des pharmaciens par l'ordre professionnel dont ils dépendent.
L'éleveur, lui, ne peut, dans ces
conditions, avoir accès à des médicaments vétérinaires présentant un danger pour
la santé publique sans qu'une ordonnance ait été rédigée au préalable par un
vétérinaire, ce qui suppose donc que ce dernier, se référant notamment aux
règles édictées par le code de déontologie vétérinaire, ait eu suffisamment
d'éléments sur la situation sanitaire de l'animal ou du lot d'animaux qu'il
soigne.
Il appartient, par
ailleurs, au vétérinaire prescripteur de faire figurer sur l'ordonnance prévue
par le code de la santé publique un certain nombre de mentions obligatoires
concernant l'administration et l'usage du médicament, comme notamment le temps
d'attente, celui-ci devant permettre qu'aucune denrée ne puisse être livrée à la
consommation humaine tant qu'elle est susceptible de contenir des résidus en
quantités supérieures aux limites maximales de résidus établies par un règlement
communautaire. Là aussi, l'infraction au contenu rédactionnel de l'ordonnance
est passible d'une sanction de cinquième classe.
Par ailleurs, le code rural
interdit d'administrer aux animaux des espèces dont la chair ou les produits
sont destinés à l'alimentation humaine et, pour les personnes ayant la garde de
tels animaux, de détenir sans justification une substance ou une composition
présentant un danger pour la santé publique qui ne bénéficie pas d'autorisation
au titre des réglementations relatives aux médicaments vétérinaires et aux
substances destinées à l'alimentation animale.
Je rappelle à cet égard que des
sanctions administratives - pouvant aller jusqu'à l'abattage du ou des
animaux concernés - et pénales - pouvant aller jusqu'à
l'emprisonnement - sont prévues en cas d'infraction.
S'agissant de l'importation de
médicaments vétérinaires, je tiens à indiquer que, en application du code de la
santé publique, celles-ci sont soumises à autorisation du direceur général de
l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'autorisation de mise
sur le marché valant toutefois autorisation d'importation, sous réserve du
respect des conditions fixées par l'autorisation de mise sur le marché.
En conclusion, tant les pharmaciens
et les vétérinaires dispensateurs de médicaments que les éleveurs utilisateurs
de ces médicaments vétérinaires, dans la mesure où ils relèvent d'une
prescription vétérinaire, sont soumis à des obligations très strictes, qui
doivent permettre de les responsabiliser afin que puisse être assurée une bonne
utilisation du médicament vétérinaire.
Ma réponse a été un peu longue mais
la question m'y obligeait. Ce faisant, j'ai répondu assez précisément, me
semble-t-il, à l'ensemble des questions que vous posiez, monsieur le député.
M. Claude Jacquot.
Oui, monsieur le ministre.
M. le président.
Intervention longue mais très intéressante, monsieur le ministre.
M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche. Je n'en doute pas, monsieur le président.
(Sourires.)