FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1544  de  M.   Billardon André ( Socialiste - Saône-et-Loire ) QOSD
Ministère interrogé :  industrie
Ministère attributaire :  industrie
Question publiée au JO le :  22/10/2001  page :  5979
Réponse publiée au JO le :  24/10/2001  page :  6397
Rubrique :  industrie
Tête d'analyse :  métallurgie
Analyse :  Howmet. emploi et activité. Le Creusot
Texte de la QUESTION : La société Howmet est une filiale du groupe américain Alcoa et possède trois sites industriels en France ; elle entend fermer le plus important d'entre eux, celui du Creusot. Cela se traduirait par la suppression de quatre cents emplois dans le bassin le plus concerné par le chômage en Bourgogne, qui n'offre pas, de ce fait, de réelles capacités à reconvertir des personnels pour la plupart ouvriers. L'annonce de cette fermeture s'est faite avec une grande brutalité pour mieux cacher la faiblesse de l'argumentation économique dont l'objectif semble bien être de transférer des productions industrielles, pour l'essentiel outre-Atlantique. Or, certaines fabrications pour des programmes stratégiques (Ariane, Rafale, char Leclerc, missile Exocet) sont actuellement réalisées au Creusot dans une usine qui est fournisseur unique de ces pièces. De même, cette unité travaille sur de nombreuses autres commandes de la Snecma pour l'aviation civile ainsi que pour les autres grands motoristes européens dans le cadre des programmes tendant à combler des retards sur leurs concurrents américains. Comme il n'existe en France aucune autre fonderie de précision ayant la capacité technique de les réaliser et que les homologations peuvent prendre plus d'une année, que vont devenir ces programmes dont certains concourent à notre défense ? L'usine du Creusot produit également des pièces pour turbines à gaz terrestres produisant de l'électricité, dont le marché connaît un grand développement et qui ne paraît pas affecté par les incertitudes économiques actuelles. M. André Billardon demande à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie qui assume la tutelle de la Snecma et est très attentif aux questions d'indépendance, de bien vouloir faire connaître les actions qu'il mène pour la défense de l'emploi et tout particulièrement celui des salariés d'Howmet dans le bassin du Creusot.
Texte de la REPONSE :

AVENIR DU SITE DE LA SOCIÉTÉ HOWMET
AU CREUSOT

    M. le président. M. André Billardon a présenté une question, n° 1544, ainsi rédigée :
    « La société Howmet est une filiale du groupe américain Alcoa et possède trois sites industriels en France ; elle entend fermer le plus important d'entre eux, celui du Creusot. Cela se traduirait par la suppression de quatre cents emplois dans le bassin le plus concerné par le chômage en Bourgogne, qui n'offre pas, de ce fait, de réelles capacités à reconvertir des personnels pour la plupart ouvriers. L'annonce de cette fermeture s'est faite avec une grande brutalité pour mieux cacher la faiblesse de l'argumentation économique dont l'objectif semble bien être de transférer des productions industrielles, pour l'essentiel outre-Atlantique. Or, certaines fabrications pour des programmes stratégiques (Ariane, Rafale, char Leclerc, missile Exocet) sont actuellement réalisées au Creusot dans une usine qui est fournisseur unique de ces pièces. De même, cette unité travaille sur de nombreuses autres commandes de la Snecma pour l'aviation civile ainsi que pour les autres grands motoristes européens dans le cadre des programmes tendant à combler des retards sur leurs concurrents américains. Comme il n'existe en France aucune autre fonderie de précision ayant la capacité technique de les réaliser et que les homologations peuvent prendre plus d'une année, que vont devenir ces programmes dont certains concourent à notre défense ? L'usine du Creusot produit également des pièces pour turbines à gaz terrestres produisant de l'électricité, dont le marché connaît un grand développement et qui ne paraît pas affecté par les incertitudes économiques actuelles. M. André Billardon demande à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, qui assume la tutelle de la SNECMA et est très attentif aux questions d'indépendance, de bien vouloir faire connaître les actions qu'il mène pour la défense de l'emploi, et tout particulièrement celui des salariés d'Howmet dans le bassin du Creusot. »
    La parole est à M. André Billardon, pour exposer sa question.
    M. André Billardon. Madame la secrétaire d'Etat au budget, je veux vous dire mon désarroi et ma colère. Une entreprise, Howmet, filiale du groupe américain Alcoa, a décidé de fermer un de ses trois sites français, en fait le plus important. Il est installé au Creusot et sa fermeture supprimerait 400 emplois directs. Or l'argumentation économique et financière n'est pas claire. Elle a varié au gré des moments et des interlocuteurs, sans que jamais aient été seulement évoquées d'autres hypothèses que l'arrêt pur et simple de l'usine, dont on disait il y a peu de temps encore qu'elle était un des joyaux du groupe Pechiney.
    Au plan social, la brutalité est sans précédent, et peut se résumer ainsi : « J'ai décidé de fermer. Je pars. Débrouillez-vous avec ce que je vous abandonne. » Inutile d'insister sur l'inquiétude et le désespoir des familles concernées. La tension est d'ailleurs montée d'un cran hier, lorsque des salariés de l'entreprise ont retenu le directeur des ressources humaines. D'autant que le bassin du Creusot, étant le plus touché par le chômage en Bourgogne, n'a pas la capacité d'offrir des emplois de reclassement. C'est pourquoi je vous ai parlé de mon désarroi et de ma colère.
    Or, l'usine du Creusot fabrique des pièces d'Ariane, du Rafale, du char Leclerc, du missile Exocet. Certaines ne sont fabriquées qu'au Creusot. Qu'en sera-t-il demain ? Il s'agit de fabrications concernant notre défense. Peuvent-elles être produites ailleurs qu'en France ?
    L'usine travaille également sur de nombreuses commandes de la SNECMA pour l'aviation civile ainsi que pour les autres motoristes européens : Rolls-Royce, MTU, Fiat, Volvo. Je prends pour exemple le programme dénommé 5 EU, qui fait actuellement l'objet d'une étude de faisabilité lancée par le regroupement des cinq plus grands motoristes européens afin de combler le retard sur l'industrie aéronautique américaine dans le domaine des superalliages. Aucune autre fonderie française de précision que celle du Creusot n'a actuellement la capacité technique de les fabriquer.
    Sachant que les homologations sur des fabrications aussi pointues peuvent prendre plus d'une année, que deviendra demain ce programme important pour l'indépendance technologique de l'industrie aéronautique européenne et les capacités et compétences du Creusot ?
    Enfin, l'usine du Creusot est également positionnée sur le marché des turbines à gaz terrestres pour la production d'électricité. Ce marché, en pleine expansion, est donc de nature à amortir, pour le site du Creusot, les effets de la baisse actuelle du marché aéronautique.
    L'enjeu de ce dossier est quadruple. Economique, d'abord, car il s'agit d'une fonderie de précision dotée de réelles compétences techniques. Social ensuite, car 400 emplois sont en cause, auxquels il faut ajouter les emplois induits. Stratégique, car il concerne la défense et l'industrie aéronautique française et européenne. Et, enfin, politique car si Howmet est une société privée, l'un de ses principaux donneurs d'ordres, la SNECMA, a des comptes à rendre à l'Etat.
    Je demande donc au Gouvernement de soutenir le bassin du Creusot.
    M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat au budget.
    Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le député, le projet de fermeture du site Howmet du Creusot est un motif de très forte préoccupation pour le Gouvernement, compte tenu du grave impact qu'il aurait pour les 400 salariés et leurs familles, mais aussi pour le bassin d'emploi du Creusot, qui a déjà durement souffert des restructurations industrielles. Dès l'annonce de ce projet, vous avez ainsi rencontré Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, afin d'examiner ensemble les moyens d'éviter un tel sinistre industriel.
    Des actions concrètes ont été mises en oeuvre depuis, le secrétaire d'Etat à l'industrie ayant rappelé aux dirigeants de Howmet leurs responsabilités vis-à-vis de leurs salariés et la nécessité impérative d'examiner toutes les solutions permettant une poursuite de l'activité industrielle sur le site du Creusot. La nécessité de rechercher une reprise par un tiers, y compris un concurrent de Howmet, a en particulier été soulignée. Force est cependant de constater que cette piste soulève de fortes difficultés, compte tenu notamment de la situation de crise créée dans le secteur aéronautique par les attentats du 11 septembre.
    Votre préoccupation quant aux programmes stratégiques dans lesquels le site du Creusot est impliqué est légitime. Le ministère de la défense s'assure, de son côté, dans le cadre des dispositions législatives, réglementaires et contractuelles existantes, de la sécurité d'approvisionnement pour les programmes militaires, sans impact sur les coûts ni perturbation des programmes concernés, en négociant avec la direction d'Howmet et son actionnaire les engagements appropriés. La DGA porte également la plus grande attention à la progression des discussions entre Snecma et Howmet pour ce qui concerne les programmes civils.
    En tout état de cause, le Gouvernement restera très vigilant sur le fait que Howmet et ses actionnaires ne s'exonèrent pas de leurs responsabilités et assurent en particulier une réelle concertation avec les représentants des salariés. Un groupe tel que Howmet doit dégager les moyens pour qu'un avenir puisse être assuré pour chacun des salariés concernés et pour que l'activité économique du bassin du Creusot ne pâtisse pas de ses décisions. Tel est, en tout cas, le sens des dispositions qui ont été introduites dans le projet de loi de modernisation sociale.
    Sans exonérer l'industriel de ses responsabilités, Alain Richard et Christian Pierret demanderont au délégué interministériel aux restructurations de défense et au préfet de la région Bourgogne d'être particulièrement attentifs aux projets de nature à revitaliser l'emploi dans le bassin d'emploi, au titre du Fonds pour les restructurations de la défense, le FRED, et du contrat de plan. Il faut à ce titre rappeler que le FRED a d'ores et déjà contribué à la création de 170 emplois dans ce bassin d'emploi.
    Voilà, monsieur le député, ce que je pouvais dire ce matin au nom du secrétaire d'Etat à l'industrie sur ce dossier extrêmement sensible et douloureux pour la région du Creusot.

SOC 11 REP_PUB Bourgogne O