FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 154  de  M.   Aschieri André ( Radical, Citoyen et Vert - Alpes-Maritimes ) QG
Ministère interrogé :  aménagement du territoire et environnement
Ministère attributaire :  aménagement du territoire et environnement
Question publiée au JO le :  06/11/1997  page :  5433
Réponse publiée au JO le :  06/11/1997  page :  5433
Rubrique :  animaux
Tête d'analyse :  animaux sauvages
Analyse :  retour du loup. Alpes
DEBAT : M. le président. La parole est à M. André Aschieri.
M. André Aschieri. Ma question s'adresse au ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement et traite d'un problème qui, pour l'instant, ne concerne que trois départements mais pourrait bientôt concerner toute la France, celui que pose le loup du Mercantour. («Hou ! Hou ! Sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française) Vous avez tort de le prendre en souriant, mes chers collègues, car le problème est peut-être plus grave que vous ne le pensez !
M. François Bayrou. Très juste !
M. André Aschieri. Voici quelques chiffres et quelques dates.
En 1930, le loup a disparu, éradiqué par l'homme qui est son seul prédateur. En 1990, la France signe la convention de Berne, sans s'occuper de cet animal puisqu'il n'y en a plus. Le 5 novembre 1992 - c'est aujourd'hui le cinquième anniversaire - le loup entre en France dans les Alpes-Maritimes, ou loup qui vient des Abruzzes. En 1993, 36 moutons sont tués. En 1997, 30 loups sont dénombrés, 2 000 brebis tuées. Les bergers sont désespérés.
M. Patrick Ollier. Il a raison, c'est un vrai problème !
M. André Aschieri. Chaque année, le nombre des loups est multiplié par deux de même que celui des brebis tuées, en une progression géométrique. Depuis lors, trois départements sont touchés.
Nous pensons sincèrement que le haut pays niçois, et bientôt d'autres hauts pays, qui vivent quasi exclusivement du pastoralisme, ont besoin qu'on s'occupe de ce problème. Les moutons y représentent en effet une richesse importante, qu'il ne faut pas négliger.
Ceux qui veulent l'éradication des moutons comme ceux qui veulent l'éradication des loups ont également tort. Une cohabitation est certainement possible. Pour cela, il faut réunir une conférence au niveau national pour décider si la convention de Berne doit être modifiée ou appliquée.
Dans tous les cas, une régulation s'impose; elle nous paraît indispensable. Certains pays se sont divisés en secteurs, les uns où on laisse le loup en liberté pour répondre à la nécessaire biodiversité, les autres où le pastoralisme est préservé.
Je me permettrai en terminant une petite remarque personnelle: quand j'entends les hurlements dans cet hémicycle cet après-midi, j'ai l'impression que tous les loups ne sont pas dans le Mercantour ! (Applaudissements sur divers bancs.)
M. le président. Etant bien entendu que chacun, lorsqu'il pose une question, devient un agneau... (Sourires.)
La parole est à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le député, vous l'avez rappelé, le loup est une espèce protégée, et par la Convention de Berne et par la législation française.
M. Bernard Accoyer. Et les moutons ?
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il aurait peut-être fallu ajouter - mais c'était sous-entendu dans votre exposé - que personne n'a réintroduit le loup en France. Il s'est réinstallé de façon naturelle, à ce jour, dans quelques départements français; il pourrait bien, demain, parce qu'il se déplace librement, être présent dans d'autres endroits de l'Arc alpin. C'est donc un souci que nous avons à prendre en compte.
M. Jean-Louis Debré. La liberté de circulation pour les loups !
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Les difficultés objectives des éleveurs - 2 000 brebis tuées en plusieurs années - sont évidemment à examiner à la lumière de deux phénomènes.
Le premier est l'image ancestrale que subit le loup en France, où il a été régulièrement pourchassé et éliminé, alors que, dans d'autres pays européens, il est non seulement toléré mais protégé depuis longtemps. C'est le cas en Italie et en Espagne.
M. Jean-Louis Debré. Régularisons les loups !
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Le deuxième, la désertification des régions dans lesquelles le pastoralisme reste une des rares activités susceptibles d'occuper et d'entretenir l'espace. L'isolement des éleveurs aggrave leur sentiment d'impuissance face au loup.
Pour permettre la coexistence entre les activités pastorales et la présence du loup, nous devons associer la prévention des attaques de loup et la protection des troupeaux, grâce à des clôtures mobiles, au gardiennage et aux chiens de berger... (Brouhaha sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Les loups ne sont décidément pas là où on le pense !
... associer la prévention, disais-je, à la régulation des populations de loups. J'ai bien dit «régulation» et non éradication. Il s'agirait d'une maîtrise dynamique des populations et non d'une élimination. Pour cela, une concertation de qualité me paraît nécessaire. (Brouhaha et rires sur les mêmes bancs.)
Je doute qu'elle soit possible dans cet hémicycle !
C'est pourquoi je recevrai demain, ainsi que Louis Le Pensec («Le Loup ?» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française), une délégation des éleveurs et, dans quelques jours, à leur demande, une délégation des élus de l'Arc alpin préoccupés par ce problème, élus auxquels j'ai déjà indiqué mon accord pour la mise en place d'un groupe de travail («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française) qui associerait l'ensemble des personnes concernées. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)
RCV 11 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O