RÉGIME FISCAL DES PLUS-VALUES RÉALISÉES
EN CAS D'EXPROPRIATION DE TERRAINS AGRICOLES
M. le président. M. Albert
Facon a présenté une question, n° 1553, ainsi rédigée :
« M.
Albert Facon appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie sur le problème de la fiscalisation des plus-values réalisées
par des agriculteurs suite à une expropriation dans le cadre d'une déclaration
d'utilité publique, particulièrement sur les terrains de la plate-forme
multimodale Delta 3, située sur le territoire des communes
d'Hénin-Beaumont, de Dourges et d'Oignies (Pas-de-Calais) sur 400 hectares.
En raison du caractère forcé de la cession, des modalités d'imposition
spécifiques sont prévues. Selon la loi du 19 juillet 1976 et de
l'article 150 E du code général des impôts, la plus-value peut être
totalement exonérée à condition que le cédant procède au réemploi de l'indemnité
principale dans l'achat d'un ou plusieurs biens de même nature dans un délai de
six mois à compter de la date de paiement de l'indemnité. Le problème est
que ce délai de six mois est extrêmement court. Il se demande comment un
agriculteur pourra retrouver un terrain de même nature en un si bref délai, et
en particulier dans l'ex-bassin minier où la plupart des terres agricoles sont
exploitées par de jeunes agriculteurs. De ce fait, ils subissent des taxations
excessives et reversent au fisc une part importante de leurs indemnités. Cette
situation est inacceptable sur deux points. En premier lieu, les agriculteurs
qui perdent leur outil de travail au nom de l'intérêt général (on peut parler de
délocalisation forcée de l'exploitation agricole) subissent un événement
extérieur à leur volonté et sont de surcroît surtaxés. En effet, après impôt, le
propriétaire-bailleur, soumis au régime des plus-values des particuliers, ou
l'exploitant-fermier, soumis au régime des plus-values professionnelles, a une
indemnité globale réduite de 20 %. En second lieu, les collectivités ou
communautés de communes engagent plus de frais pour l'achat des terres eu égard
à l'indemnité versée, surcoût qui est supporté par le contribuable (entre autres
l'agriculteur) qui doit lui-même reverser en partie cette indemnité au fisc.
Tout cela entraîne des contraintes financières inutiles pour l'agriculteur, les
collectivités locales ou les communautés de communes. Il lui demande les
dispositions qu'il compte prendre pour remédier à cette situation, supprimer le
délai de six mois et, à terme, envisager l'exonération fiscale de ces
plus-values. »
La parole est à
M. Albert Facon, pour exposer sa question.
M. Albert Facon.
Madame la secrétaire d'Etat au budget, je voudrais attirer votre attention sur
le problème de la fiscalisation des plus-values réalisées par des agriculteurs à
la suite d'une expropriation dans le cadre d'une déclaration d'utilité publique,
en général, et plus particulièrement sur les terrains de la plate-forme
multimodale Delta 3, située sur le territoire des communes
d'Hénin-Beaumont, de Dourges et d'Oignies, pour plus de 400 hectares.
En raison du caractère forcé de la
cession, des modalités d'imposition spécifiques sont prévues par la loi du
19 juillet 1976 et de l'article 150 E du code général des impôts
: la plus-value peut être totalement exonérée à condition que le cédant procède
au remploi de l'indemnité principale dans l'achat d'un ou plusieurs biens de
même nature, dans un délai de six mois à compter de la date de paiement de
l'indemnité. Le problème est que ce délai de six mois est extrêmement court.
Comment un agriculteur peut-il retrouver des terrains de même nature dans un
délai aussi bref, en particulier dans cette région où la plupart des terres
agricoles sont exploitées par de jeunes agriculteurs ayant déjà subi des
expropriations, notamment pour la réalisation du TGV-Nord, de l'autoroute A
1 et de nombreux échangeurs ?
De
ce fait, ils subissent des taxations excessives et reversent au fisc une part
importante de leurs indemnités. Cette situation est inacceptable sur deux
points.
En premier lieu, les
agriculteurs, qui perdent leur outil de travail au nom de l'intérêt général,
doivent de surcroît s'acquitter de taxes. En effet, après impôt, le propriétaire
bailleur soumis au régime des plus-values des particuliers ou l'exploitant
fermier soumis au régime des plus-values professionnelles se retrouve avec une
indemnité globale réduite de plus de 20 %.
En second lieu, les collectivités
ou communautés de communes engagent plus de frais pour l'achat des terres, eu
égard à l'indemnité versée, et le surcoût est supporté par les contribuables,
parmi lesquels l'agriculteur, qui doit lui-même reverser en partie cette
indemnité au fisc.
Tout cela
entraîne des contraintes financières inutiles pour l'agriculteur, les
collectivités locales ou communautés de communes. Madame la secrétaire d'Etat,
serait-il possible, dans un premier temps, de prolonger ou de supprimer ce délai
de six mois et, dans un second temps, d'envisager, peut-être, une solution
visant à faire en sorte que ces plus-values involontaires ne soient plus
taxables ?
M. le président. La
parole est à Mme la secrétaire d'Etat au budget.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le
député, comme vous le rappelez, l'article 150 E du code général des impôts
exonère les plus-values réalisées à la suite de déclarations d'utilité publique
prononcées en vue d'une expropriation lorsqu'il est procédé au remploi de
l'indemnité par l'achat d'un ou plusieurs biens de même nature dans un délai de
six mois.
Ce délai court à
compter de la date de la perception de l'indemnité ou de son solde si celle-ci
est versée par fractions successives. Il s'ajoute donc à celui écoulé depuis la
date du transfert de la propriété des biens à la collectivité publique.
Globalement, les contribuables expropriés disposent ainsi d'un délai largement
supérieur à six mois pour procéder au remploi.
Au demeurant, j'observe que la
condition de remploi exigée pour le bénéfice de cette exonération est appréciée
de manière très souple : le remploi peut être effectué sans tenir compte de
l'affectation du bien. Ainsi, le bénéfice de l'exonération est accordé en cas
d'acquisition d'un immeuble bâti ou non au moyen de l'indemnité d'expropriation
relative à un autre immeuble bâti ou non. Cette exonération peut également
s'appliquer lorsque l'indemnité est utilisée en vue de la construction ou de la
reconstruction d'un immeuble.
Cela dit, lorsqu'il ne peut être
procédé au remploi de l'indemnité, la prise en compte de l'érosion monétaire
combinée avec l'abattement de 5 % par année de détention du bien au-delà de
la deuxième année et celui de 75 000 francs prévu en cas d'expropriation ou
d'opération assimilée a pour effet de réduire de manière très importante, voire
d'annuler, le montant de la plus-value taxable.
En pratique, seules les plus-values
rapidement acquises font l'objet d'une taxation sensible, ce qui ne paraît pas
injustifié.
J'espère, monsieur
le député, que ces dispositions équilibrées sont de nature à répondre à vos
préoccupations.
M. le président. La
parole est à M. Albert Facon.
M. Albert Facon. J'ai
bien entendu votre réponse, madame la secrétaire d'Etat. Mais ma préoccupation
visait surtout les jeunes agriculteurs qui souhaitent réemployer leur argent
pour acheter des terres en vue de les cultiver et non un immeuble bâti. Ce sont
les plus taxés. J'ai bien compris que les autres pouvaient s'en sortir.