ACCÈS AUX RÉSEAUX DE TÉLÉPHONIE MOBILE
ET À L'INTERNET À HAUT DÉBIT DANS L'INDRE
M. le président.
M. Nicolas Forissier a présenté une question, n° 1588, ainsi rédigée
:
« M. Nicolas Forissier
attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur l'accès aux
réseaux de téléphonie mobile et à l'Internet à haut débit dans l'Indre. Malgré
les efforts des collectivités et des acteurs de terrain, l'Indre, comme d'autres
départements ruraux, accuse un certain retard dans ces deux domaines. Concernant
la téléphonie mobile, les zones d'ombre y sont encore fort nombreuses, bien que
différentes selon les opérateurs. Seulement 45,7 % des communes du
département sont en effet couvertes par au moins un opérateur, soit 76,3 %
de la population, et seulement 53 % de la population bénéficie de la
couverture des trois opérateurs. Concernant l'Internet à haut débit,
l'équipement reste lacunaire. Les programmes pilotés par le conseil régional
sont forcément longs à mettre en oeuvre concrètement, et l'équipement progressif
sur certaines parties du département manque de cohérence. Cela pose d'importants
problèmes en termes d'aménagement du territoire, de développement économique, de
tourisme. Face à ce défi d'aménagement du territoire, les collectivités
territoriales se mobilisent. Mais il appartient également à l'Etat, en tant que
garant de l'équité territoriale mais également en tant qu'actionnaire principal
de l'opérateur historique, d'intervenir. L'avis rendu en juin dernier sur le
schéma de services collectifs de l'information et de la communication par la
délégation à l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale a apporté une
contribution à la réflexion sur ce dossier. Il proposait notamment de prélever
une partie du produit résultant de l'attribution des licences UMTS pour créer
une dotation destinée à assurer l'équité territoriale, afin de remédier à la
situation actuelle caractérisée par le fait que les zones les plus pauvres sont
celles qui rencontrent le plus de difficultés à s'équiper. Aucune suite n'a été
apportée à cet avis, pourtant explicitement prévu par la loi Voynet, ce qui
laisse d'ailleurs perplexe sur l'utilité de cette loi et la place qui est
réservée au Parlement en matière d'aménagement du territoire. En conclusion, il
lui demande quelle action d'envergure le Gouvernement entend mener, dans un
souci d'équité territoriale, pour soutenir le développement de l'Internet à haut
débit dans les zones rurales et achever la couverture du territoire en
téléphonie mobile. »
La parole
est à M. Nicolas Forissier, pour exposer sa question.
M. Nicolas Forissier.
Je suis très honoré que M. le ministre de la défense réponde à cette
question !
M. Alain Richard, ministre de la défense. Et réciproquement !
M. Nicolas Forissier.
Je suis certain qu'il me donnera tous les renseignements que j'attends !
Ma question concerne l'accès aux
réseaux de téléphonie mobile et à l'Internet à haut débit dans les départements
ruraux, et notamment dans l'Indre, qui accuse des retards dans ces domaines.
S'agissant de la téléphonie mobile,
les zones d'ombre sont encore nombreuses. Aujourd'hui, seulement 53 % de la
population de l'Indre bénéficient de la couverture des trois opérateurs, et je
pourrais vous donner d'autres chiffres.
S'agissant de l'Internet à haut
débit, l'équipement reste lacunaire. Les programmes pilotés par le conseil
régional sont forcément longs à mettre en oeuvre et France Télécom tarde à
généraliser l'accès à l'ADSL. Dans l'agglomération de La Châtre, par
exemple, une entreprise employant une centaine de personnes risque d'avoir de
grandes difficultés à rester à cet endroit si elle ne peut avoir accès
rapidement à l'Internet à haut débit, dans de bonnes conditions et à un coût
concurrentiel. Il y a là un véritable enjeu d'aménagement du territoire.
Mais je constate que nous avons
encore une fois changé de ministre. Nous en sommes au troisième, si je comprends
bien, monsieur le président ! Cela dit, c'est un grand plaisir pour moi de
retrouver Mme Lebranchu, qui connaît bien ces questions !
Il est important, madame la
ministre, d'utiliser à bon escient les nouvelles technologies de l'information
et de la communication en matière de développement territorial, car elles
peuvent servir de levier pour l'aménagement des zones rurales. Malheureusement,
des départements comme l'Indre, le Cher, ou la Creuse, auxquels je
suis attaché, connaissent beaucoup de retard en la matière et il semble que
l'Etat ne joue pas le rôle qui devrait être le sien.
Je sais bien que, lors du comité
interministériel d'aménagement et de développement du territoire
de Limoges, le Gouvernement a pris des mesures, mais elles restent
insuffisantes. Nous manquons aujourd'hui d'une politique forte, ambitieuse,
volontariste, voire presque brutale dans sa manifestation, en faveur du
développement des nouvelles technologies de l'information et de la
communication.
Lorsque j'ai
rendu, en juin dernier, mon rapport sur le schéma de services collectifs de
l'information et de la communication au nom de la délégation de l'Assemblée
nationale à l'aménagement et au développement durable du territoire, j'ai
notamment proposé de prélever une partie du produit résultant de l'attribution
des licences UMTS pour créer une dotation destinée à assurer ou à rétablir
l'équité territoriale en matière de téléphonie mobile et de couverture du
territoire. Ce n'est pourtant pas la solution qui a été adopée par
le Gouvernement. Ce dernier a, certes, apporté 500 millions de francs,
mais il va continuer à faire peser sur les collectivités locales une partie du
financement pour achever la couverture du territoire en téléphonie mobile.
Alors qu'il devrait précisément
veiller à rétablir l'équité territoriale et mener une politique d'aménagement du
territoire ambitieuse, il est surprenant qu'il se défausse ainsi à la fois sur
les opérateurs privés - on a encore pu le constater ces jours derniers avec
l'engagement plus important qui leur est demandé pour l'achèvement de la
couverture GSM - et sur les collectivités locales.
Dans le département de l'Indre, par
exemple, c'est le conseil général qui va devoir mettre la main à la poche pour
participer à l'achèvement de cette couverture, alors qu'il s'agit d'un
département pauvre, qui est en retard sur le plan économique. Il aurait donc été
bon de retenir ma proposition d'affecter une petite partie du produit résultant
de l'attribution des licences UMTS à l'achèvement de la couverture de téléphonie
mobile, et ce aux seuls frais de l'Etat.
Je voudrais aussi rappeler qu'il est
extrêmement urgent et important de mettre en place une politique permettant
l'accès à l'Internet à haut débit dans toutes ces régions. C'est en effet le
seul moyen de rétablir l'équité territoriale et j'ai, de ce point de vue, madame
la ministre, trois questions à vous poser.
D'abord, pouvez-vous nous préciser
les modalités des engagements récemment pris par les opérateurs de téléphonie
mobile dans le cadre des accords qui ont été acquis sur l'UMTS pour achever très
rapidement la couverture du territoire par le réseau GSM ? De ce point de vue,
qu'en sera-t-il de l'itinérance, qui semble devoir être abandonnée ?
Ensuite, allez-vous enfin mettre en
oeuvre une politique un peu plus volontariste en faveur de l'installation très
rapide du haut débit dans l'ensemble des zones rurales, notamment dans les
départements de l'Indre, du Cher et du Loir-et-Cher ? Mon collègue et ami
M. Fromet sera certainement d'accord avec moi.
Enfin, le département de l'Indre
fera-t-il l'objet d'une attention particulière du Gouvernement dans ce domaine ?
Il s'agit, là encore, de rétablir l'équité dans le traitement de nos
territoires.
M. le président. La
parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le député, Christian Pierret regrette de ne pouvoir être parmi nous,
mais il est actuellement retenu au Conseil de Bruxelles. J'ai eu l'honneur de
beaucoup travailler avec lui sur ces dossiers. Comme vous, je suis d'une zone
qui manque de couverture en matière de téléphonie mobile. Par ailleurs,
s'agissant de l'accès à l'Internet à haut débit, cela fait longtemps que les
petites entreprises soulignent les distorsions de concurrence créées par
l'inégalité d'accès à ce type d'outil.
Je pense, comme Christian Pierret,
que votre demande est légitime. Le développement de l'Internet à haut débit et
l'achèvement de la couverture du territoire par les réseaux mobiles sont en
effet devenus indispensables au développement économique de tous les
territoires, et notamment des zones rurales. Quant aux usagers, ils n'ont pas a
être pénalisés s'ils ont choisi de résider loin des grands centres.
S'agissant de l'Internet à haut
débit, la France plaide depuis trois ans au plan européen pour qu'il soit
intégré dans le service universel - « service public » - des
télécommunications. Elle est soutenue par l'Espagne, le Portugal et la
Grèce. Le Gouvernement s'est fixé pour objectif au CIADT de Limoges d'assurer à
tous l'accès au haut débit d'ici à cinq ans.
Pour y parvenir cinq technologies
sont disponibles : les fibres optiques - villes - moyennes et grandes
entreprises - ; les réseaux câblés - villes - ménages - ; la
technologie de l'ADSL, Assymetric Digital Suscriber Line-via les lignes
téléphoniques - entreprises et ménages - ; la boucle locale radio -
villes moyennes - entreprises - et le satellite - tout le
territoire.
Pour les zones
rurales, deux de ces technologies sont plus appropriées. Tout d'abord, l'ADSL,
qui peut techniquement fonctionner sur environ 85 % des lignes téléphoniques,
mais n'est pas accessible dans certaines zones rurales où les lignes
téléphoniques sont trop longues - je parle d'expérience. Actuellement, France
Télécom propose une offre sur environ 60 % des lignes. Le tarif, 300 francs
par mois, est encore trop cher, mais il va diminuer avec l'ouverture à la
concurrence. Si nous obtenons satisfaction au niveau euroéen, nous pourrons
accorder des aides publiques, indispensables pour assurer aux entreprises les
conditions d'une juste concurrence.
Pour les zones où l'ADSL n'est pas
possible - lignes trop longues -, il est alors nécessaire de recourir
au satellite. Cette technologie est désormais au point et est proposée à des
tarifs voisins de ceux de l'ADSL. Les premieres offres sont apparues cet été.
Cela dit, les acteurs économiques locaux et les éventuels partenaires trouvent
injuste qu'une entreprise paie plus cher, pour accéder à l'Internet à haut
débit, qu'une autre de même taille et fabriquant les mêmes produits. On sait à
quel point la vente en ligne est importante pour anticiper l'avenir. Surtout,
pour répondre aux appels d'offre concernant certains marchés privés - le marché
public a d'autres contraintes - il faut pouvoir expédier rapidement des photos
d'installations existantes en matière de bureau, par exemple. C'est le cas le
plus typique, y compris pour votre propre département. L'ADSL ou la boucle est
une nécessité. Nous devons donc obtenir cette autorisation européenne pour
donner le coup de main nécessaire.
S'agissant de la couverture du
territoire par les réseaux mobiles, à la suite des décisions du CIADT de
Limoges, Christian Pierret a poursuivi les discussions avec les trois opérateurs
mobiles GSM afin d'accélérer la mise en oeuvre de ce projet - deux ans au
lieu de trois - et de réduire la participation financière de l'Etat et des
collectivités territoriales à due concurrence, notre inquiétude étant que la
participation de l'Etat baisse mais que celle des collectivités territoriales
augmente.
A l'issue de ces
discussions, l'accord obtenu avec les opérateurs est le suivant. L'Etat et les
collectivités territoriales financeront les infrastructures passives -
environ 1 150 antennes-relais pour couvrir les 1 480 communes
concernées. Cela représente un investissement sur deux ans qui sera inférieur à
500 millions de francs pour l'Etat et les collectivités territoriales, soit
moins de la moitié du financement public de 1 milliard de francs prévu lors
du CIADT de juillet dernier. Pour les zones les plus en difficulté, l'accès à
d'autres programmes, de type Leader 2 par exemple, peut être un soutien
important, mais l'Etat ne se défaussera pas de sa responsabilité.
Orange France et SFR ont accepté
d'étendre leur réseau afin que chaque village des 1 480 communes concernées
soit couvert par au moins un des deux opérateurs d'ici à la fin 2003. Ce
projet représente un investissement de 500 millions de francs sur deux ans
pour chacun des deux opérateurs. Bouygues Télécom a indiqué que, n'étant pas
titulaire d'une licence UMTS, il prendrait en compte ce projet
ultérieurement.
Le projet a été
retenu dans sa forme actuelle parce qu'il permettra d'aller plus vite et de
démarrer les travaux d'extension de la couverture GSM dès le début de
l'année 2002.
L'ensemble de
la couverture en téléphonie mobile sera ainsi assuré pour la fin 2003, mais
s'agissant du cas particulier d'investissements trop importants, comme l'a dit
Christian Pierret à la suite du CIADT de Limoges et comme l'a souligné le
Premier ministre s'agissant des enveloppes FNADT, une négociation pourra
toujours être envisagée si des entreprises sont trop fortement pénalisées.
M. le président. La
parole est à M. Nicolas Forissier, très brièvement.
M. Nicolas Forissier.
Madame la ministre, je vois bien que le Gouvernement fait des efforts. Je
regrette simplement que la mobilisation ne soit pas plus forte sur le plan
financier. On pourrait utiliser une partie du produit si élevé résultant de
l'attribution des licences UMTS pour mener une politique nationale massive en
faveur du développement des réseaux de téléphonie mobile. Cela dit, j'ai été
heureux d'avoir votre réponse.