FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1620  de  M.   Moutoussamy Ernest ( Communiste - Guadeloupe ) QOSD
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  outre-mer
Question publiée au JO le :  07/01/2002  page :  5
Réponse publiée au JO le :  09/01/2002  page :  37
Date de changement d'attribution :  07/01/2002
Rubrique :  outre-mer
Tête d'analyse :  DOM : Guadeloupe
Analyse :  sécurité publique. sécurité des biens et des personnes. délinquance. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : Dans le département de la Guadeloupe, l'insécurité, la délinquance, les actes de violence, la toxicomanie sont en évolution constante. Pour contrer le sentiment d'impunité, combattre efficacement la délinquance et l'insécurité, outre la prévention qui passe par la lutte contre les exclusions et notamment le chômage, il faut mettre en oeuvre une politique répressive dissuasive. Il importe, aujourd'hui, de stopper cette dégradation des rapports humains et de redonner confiance aux citoyens dans les institutions de la République. La sanction doit retrouver sa place dans notre Etat de droit, M. Ernest Moutoussamy demande à M. le ministre de l'intérieur de l'informer de l'analyse qu'il fait de la situation et des mesures qu'il compte prendre dans le cadre du plan d'action renforcée décidé par le Gouvernement. Afin de contrôler l'usage des armes et des drogues, lutter contre la récidive et traiter efficacement la délinquance des mineurs. Il souhaite également qu'il apporte son soutien à la création d'un centre éducatif renforcé et d'un centre de placement immédiat comme il en existe en métropole.
Texte de la REPONSE :

LUTTE CONTRE L'INSÉCURITÉ EN GUADELOUPE

    M. le président. M. Ernest Moutoussamy a présenté une question, n° 1620, ainsi rédigée :
    « Dans le département de la Guadeloupe, l'insécurité, la délinquance, les actes de violence, la toxicomanie sont en évolution constante. Pour contrer le sentiment d'impunité, combattre efficacement la délinquance et l'insécurité, outre la prévention qui passe par la lutte contre les exclusions et notamment le chômage, il faut mettre en oeuvre une politique répressive dissuasive. Il importe, aujourd'hui, de stopper cette dégradation des rapports humains et de redonner confiance aux citoyens dans les institutions de la République. La sanction doit retrouver sa place dans notre Etat de droit, M. Ernest Moutoussamy demande à M. le ministre de l'intérieur de l'informer de l'analyse qu'il fait de la situation et des mesures qu'il compte prendre dans le cadre du plan d'action renforcée décidé par le Gouvernement. Afin de contrôler l'usage des armes et des drogues, lutter contre la récidive et traiter efficacement la délinquance des mineurs. Il souhaite également qu'il apporte son soutien à la création d'un centre éducatif renforcé et d'un centre de placement immédiat comme il en existe en métropole. »
    La parole est à M. Ernest Moutoussamy, pour exposer sa question.
    M. Ernest Moutoussamy. Monsieur le ministre de l'intérieur, dans un contexte social dégradé, marqué par l'effritement des bastions traditionnels que sont la famille, l'école, l'Eglise, et par des conflits sociaux déstabilisateurs, le chômage, la violence, la toxicomanie, l'insécurité, le vol, l'immigration clandestine, la xénophobie, le vandalisme, l'abus de consommation d'alcool s'inscrivent au quotidien dans le paysage de la Guadeloupe avec de plus en plus d'acuité et exaspèrent la population.
    La délinquance menace chacun. Elle fait peur, elle ternit l'image de notre destination touristique, elle porte atteinte à notre avenir et à notre développement.
    Les collectivités subissent une dégradation épouvantable de leurs matériels, aggravée par le vol des véhicules, des biens scolaires, sportifs et culturels. Par la violence, on s'approprie le bien des autres.
    Dans ce contexte, un mode culturel de confrontation, prenant le caractère d'affrontements physiques, se substitue de plus en plus au dialogue démocratique et à la négociation dans le monde du travail et de l'entreprise. Or la réussite de la loi d'orientation pour l'outre-mer, levier déterminant du développement, passe par le retour de la paix sociale, le respect de l'Etat de droit et des libertés démocratiques. Aussi, la police, la gendarmerie, la justice, au service de l'Etat pour assurer la sécurité des personnes et des biens, méritent plus que jamais une attention soutenue.
    Certes, de 1997 à ce jour, ce qui a été mis en oeuvre pour la gendarmerie, pour la police, pour la justice est exceptionnel. On ne peut trouver rien de comparable dans le passé. Nous sommes tout à fait conscients des efforts réalisés par ce gouvernement pour permettre aux institutions, aux hommes et aux femmes chargés dans la République de protéger les citoyens, d'exercer au mieux leur mission. Mais le défi à relever est redoutable. D'autant qu'il existe en Guadeloupe un déphasage culturel entre l'évolution du droit, d'une part, et la société de consommation et les mentalités, d'autre part. Il en résulte une perte de repère, un sentiment de chaos.
    L'autorité de l'école, de l'Etat ou dans la famille, en tant que facteur d'éducation, de respect mutuel, de pilier de l'organisation sociale, s'estompe de plus en plus au profit d'une forme diffuse d'anarchie et de non-droit. La lutte contre l'insécurité, le trafic des stupéfiants et des armes, la criminalité organisée, la délinquante routière, requièrent une forte détermination et des sanctions dissuasives. Bien évidemment, le bon fonctionnement des institutions, la protection judiciaire de la jeunesse, la justice de proximité, la politique de prévention, exigent une réforme globale, cohérente et des moyens adéquats.
    Monsieur le ministre, aujourd'hui l'insuffisance des effectifs et des moyens pose un vrai problème dans un département qui reçoit plus de 600 000 touristes. Le sentiment d'impunité se répand d'autant plus que la sanction, quand elle existe, est loin d'être dissuasive. La politique de prévention de l'investissement des conseils communaux de prévention de la délinquance, les CCPD, ne peuvent pas avoir de résultats crédibles car les fautes et les délits ne sont pas sévèrement réprimés.
    La tolérance ne doit pas prendre les couleurs du laxisme et de l'irresponsabilité. La population, agacée, ressent une sorte de démission ou de capitulation face à un ennemi redoutable et acharné.
    Bref, pour répondre à la légitime attente d'actions efficaces et de prise en compte des besoins, outre la prévention, qui passe par la lutte contre les exclusions, notamment contre le chômage, il faut mettre en oeuvre une politique de fermeté suffisamment dissuasive.
    La sanction doit retrouver sa place dans notre société.
    Monsieur le ministre, pouvez-vous m'informer de l'analyse que vous faites de la situation en Guadeloupe et des mesures que vous comptez prendre dans le cadre du plan d'action renforcée décidé par le Gouvernement ? Quelles actions prioritaires le Gouvernement peut-il engager pour faire reculer le sentiment d'impunité, rétablir l'Etat de droit et garantir la sécurité des personnes et des biens ?
    Comment pensez-vous contrôler et maîtriser le trafic des armes et des drogues, lutter contre la récidive et traiter efficacement la délinquance des mineurs ? Pouvez-vous apporter votre soutien à la création d'un centre éducatif renforcé et d'un centre de placement immédiat, comme il en existe en métropole ? Est-il possible d'envisager la mise en oeuvre de contrats locaux de sécurité en zone de gendarmerie pour les communes touristiques ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
    M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, ainsi que vous le savez, le Premier ministre a eu l'occasion d'affirmer à plusieurs reprises, lors de ses déplacements outre-mer, que la sécurité publique était une priorité de l'action gouvernementale depuis 1997. Cette préoccupation légitime de la population concerne bien évidemment tous nos compatriotes ultramarins.
    S'agissant du département de la Guadeloupe, le Gouvernement a pris des mesures fortes et concrètes pour faire face à la montée de l'insécurité et du sentiment qui en découle.
    Tout d'abord, je voudrais vous rappeler que le département de la Guadeloupe connaît une stabilisation des chiffres de la délinquance.
    En 2000, les services de police et de gendarmerie ont enregistré une baisse de 3,6 % de la délinquance au regard de l'année précédente, revenant ainsi au niveau constaté en 1995. Néanmoins, on observe une transformation de la nature de la délinquance qui a évolué, au cours de la décennie, vers des délits de voie publique et des actes plus violents.
    Face à cette situation, les forces de police ont réagi et ont concentré leurs efforts pour mieux lutter contre les atteintes aux personnes et contre la délinquance liée à la consommation et au trafic de stupéfiants. A titre d'illustration, les premiers chiffres de 2001 montrent que la délinquance de voie publique a progressé de 1,6 % dans les zones de police et que les infractions liées à la drogue ont baissé de 22 %.
    A ma demande, les actions engagées par le préfet en collaboration avec les autorités judiciaires vont dans ce sens : réquisitions de forces de l'ordre dans les quartiers sensibles, opérations de contrôle dans l'agglomération pointoise, opérations de sécurisation aux abords des établissements de nuit, contrôles des étrangers en situation irrégulière et de travail clandestin. Ces actions ont permis de réduire de près de 48 % ce type de délit.
    Dans le même temps, des efforts notables notables ont également porté sur le renforcement des moyens.
    Depuis 1997, les effectifs de la police nationale tous corps confondus ont progressé de 15,3 %, passant de 762 à 879 fin 2001. La création du commissariat de Gosier en juillet dernier permet également d'améliorer la réactivité des forces de police dans l'agglomération pointoise. Le très prochain déploiement de la police de proximité à Pointe-à-Pitre contribuera à la mise en place d'un dispositif opérationnel encore plus adapté.
    La gendarmerie nationale, quant à elle, a vu ses effectifs augmenter de 17,1 % depuis 1997 avec, pour la seule année 2001, un renforcement significatif de 5 %. Ces augmentations d'effectifs ont permis d'améliorer sensiblement le service public de la gendarmerie avec la création, en 2001, d'un peloton de surveillance et d'intervention, PSIG, à Saint-Martin et d'une brigade motorisée au Moule. Ces créations d'unités se poursuivront en 2002 avec la mise en place d'un PSIG au Moule et d'une brigade motorisée à Saint-Martin. La montée en puissance du commissariat de Gosier permettra également le redéploiement de seize gendarmes dans le secteur du Moule.
    J'ajoute que les opérations de reconstruction de la brigade de Saint-François, pour laquelle vous avez beaucoup oeuvré, monsieur le député, débuteront en 2002.
    Enfin, le Gouvernement a développé une politique de partenariat.
    Le développement de la coopération avec les différentes collectivités territoriales et en particulier les communes est un élément fort de cette politique. Les actions se développent dans le cadre de la politique de la ville et notamment au travers des trois contrats locaux de sécurité signés en Guadeloupe qui reçoivent un écho favorable auprès de la population guadeloupéenne. Elles constituent des outils privilégiés de lutte contre l'insécurité.
    Trente et une conventions de coordination entre les polices municipales et les forces de police et de gendarmerie, ainsi que le plan départemental de prévention de la délinquance complètent concrètement et au quotidien le dispositif de lutte contre la délinquance. Ainsi, les 112 agents locaux de médiation sociale et la centaine d'adultes relais permettent par leur présence dans les quartiers sensibles de faire reculer le sentiment d'insécurité qui découle d'une insécurité réelle.
    L'ensemble de ces mesures s'est traduit par la diminution de 13,8 % de la délinquance des mineurs en un an.
    En ce qui concerne vos interrogations sur les moyens de la justice, et notamment la création d'un centre éducatif renforcé et d'un centre de placement immédiat, je ne manquerai pas de transmettre vos demandes à Mme la garde des sceaux, et je lui demanderai qu'elle vous réponde, par écrit ou dans le cadre du dialogue qu'il est possible d'avoir dans cet hémicycle.
    Tels sont, monsieur le député, les éléments de réponse que je pouvais apporter à votre question bien légitime.
    

COM 11 REP_PUB Guadeloupe O