FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1624  de  M.   Sicre Henri ( Socialiste - Pyrénées-Orientales ) QOSD
Ministère interrogé :  affaires européennes
Ministère attributaire :  affaires européennes
Question publiée au JO le :  07/01/2002  page :  6
Réponse publiée au JO le :  09/01/2002  page :  14
Rubrique :  collectivités territoriales
Tête d'analyse :  réglementation
Analyse :  coopération transfrontalière. établissements de santé. Espagne
Texte de la QUESTION : M. Henri Sicre interroge M. le ministre délégué chargé des affaires européennes sur les graves lacunes de la coopération transfrontalière. Alors que l'agence régionale d'hospitalisation (ARH) du Languedoc-Roussillon a fait fermer les maternités extérieures à Perpignan, certains cantons des Pyrénées-Orientales sont maintenant plus proches de la maternité de Puigcerdà située en territoire espagnol. L'ARH encourage d'ailleurs la prise en compte de cet établissement qui présente toutes les garanties exigées pour les accouchements. Si cela ne pose donc aucun problème sur le plan médical, cela en pose de sérieux sur le plan administratif. D'abord, les frais d'accouchement et de séjour (48 heures) doivent être réglés à la sortie, pour un montant minimum dépassant les 10 000 francs. Le remboursement par la sécurité sociale est soumis à toutes sortes de tracasseries. Ensuite, la reconnaissance de la nationalité française pour l'enfant est un véritable parcours du combattant, qui oblige les parents à s'adresser au consulat de France à Barcelone. Ce dernier transmet ensuite le dossier aux services du ministère des affaires étrangères à Nantes avant que le dossier ne revienne vers la famille, si rien n'est venu gripper cette machine administrative. Il faut donc compter environ trois mois pour obtenir un extrait de naissance qui permette, outre la reconnaissance officielle de l'existence de l'enfant, l'ouverture des droits vis-à-vis de la sécurité sociale et de la CAF. Cette situation ubuesque n'est plus acceptable. Il suggère que la commune française riveraine de Puigcerdà, c'est-à-dire Bourg-Madame, puisse établir des extraits de naissance pour les enfants nés à l'hôpital distant de quelques centaines de mètres. Il lui demande également des garanties pour qu'un accord soit mis en oeuvre entre l'hôpital de Puigcerdà et la sécurité sociale française pour la prise en charge des frais d'accouchement.
Texte de la REPONSE :

COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE FRANCO-ESPAGNOLE
EN MATIÈRE SANITAIRE

    M. le président. M. Henri Sicre a présenté une question, n° 1624, ainsi rédigée :
    « M. Henri Sicre interroge M. le ministre délégué chargé des affaires européennes sur les graves lacunes de la coopération transfrontalière. Alors que l'agence régionale d'hospitalisation (ARH) du Languedoc-Roussillon a fait fermer les maternités extérieures à Perpignan, certains cantons des Pyrénées-Orientales sont maintenant plus proches de la maternité de Puigcerdà située en territoire espagnol. L'ARH encourage d'ailleurs la prise en compte de cet établissement qui présente toutes les garanties exigées pour les accouchements. Si cela ne pose donc aucun problème sur le plan médical, cela en pose de sérieux sur le plan administratif. D'abord, les frais d'accouchement et de séjour (48 heures) doivent être réglés à la sortie, pour un montant minimum dépassant les 10 000 francs. Le remboursement par la sécurité sociale est soumis à toutes sortes de tracasseries. Ensuite, la reconnaissance de la nationalité française pour l'enfant est un véritable parcours du combattant, qui oblige les parents à s'adresser au consulat de France à Barcelone. Ce dernier transmet ensuite le dossier aux services du ministère des affaires étrangères à Nantes avant que le dossier ne revienne vers la famille, si rien n'est venu gripper cette machine administrative. Il faut donc compter environ trois mois pour obtenir un extrait de naissance qui permette, outre la reconnaissance officielle de l'existence de l'enfant, l'ouverture des droits vis-à-vis de la sécurité sociale et de la CAF. Cette situation ubuesque n'est plus acceptable. Il suggère que la commune française riveraine de Puigcerdà, c'est-à-dire Bourg-Madame, puisse établir des extraits de naissance pour les enfants nés à l'hôpital distant de quelques centaines de mètres. Il lui demande également des garanties pour qu'un accord soit mis en oeuvre entre l'hôpital de Puigcerdà et la sécurité sociale française pour la prise en charge des frais d'accouchement. »
    La parole est à M. Henri Sicre, pour exposer sa question.
    M. Henri Sicre. Monsieur le ministre délégué chargé des affaires européennes, nous avons maintenant changé de monnaie. Si, dans la capitale, c'est une habitude à prendre, pour nous, les frontaliers, c'est un événement majeur dans la mesure où nous avons cessé d'avoir des monnaies différentes dans chacune des poches de nos vêtements.
    Les Etats membres sont particulièrement actifs dans cette construction européenne, nécessaire et porteuse d'espoir. Les capitales s'y engagent. Mais on a surtout le souci de mettre en réseau les grandes métropoles de production. Or, lorsqu'on est frontalier, on rencontre encore des difficultés importantes. Voici plus d'une décennie, j'ai engagé des actions locales pour favoriser la coopération transfrontalière, malgré la disparité des traditions administratives et les divisions politiques en matière d'organisation du territoire. J'essaie de constituer, dans mon secteur, une agence de développement transfrontalier qui nous permettrait d'envisager, de part et d'autre du pointillé qui apparaît sur la carte, des actions communes. Malgré tout, une difficulté majeure en matière de santé se pose dans une région de ma circonscription. Et c'est parce que je suis engagé dans la coopération transfrontalière qu'on me l'a soumise.
    L'agence régionale d'hospitalisation du Languedoc-Roussillon a incité à la fermeture de plusieurs maternités dans un objectif de sécurité. Dans certains cantons, la proximité avec un hôpital situé en zone espagnole est évidente ; c'est le cas de celui de Puigcerdà. L'ARH encourage d'ailleurs la prise en compte de cet établissement qui présente toutes les garanties exigées pour les accouchements. Cependant, après l'accouchement, la famille qui a dû acquitter une somme importante - d'environ 10 000 francs - devra entamer un parcours long et difficile pour être remboursée par la sécurité sociale. Par ailleurs, pour obtenir la reconnaissance de la nationalité française de l'enfant né sur le territoire espagnol, elle doit s'adresser au consulat de France à Barcelone qui transmettra le dossier au service du ministère des affaires étrangères à Nantes. Cette situation, ubuesque, est difficilement acceptable, au point que les parents préfèrent se rendre à Perpignan par les routes de montagne, avec tous les risques sanitaires - voire de décès - que cela comporte.
    Ma question est donc double, monsieur le ministre.
    D'une part, serait-il possible, pour la commune voisine, située à une centaine de mètres de l'hôpital espagnol - il n'y a pas d'autres frontières physiques qu'un petit pont - d'établir les extraits de naissance pour les enfants nés dans cet hôpital ?
    D'autre part, serait-il possible qu'un accord soit enfin conclu entre la sécurité sociale et cet hôpital pour que les familles qui ont recours à ses services n'aient pas à supporter pendant de longs mois la prise en charge des frais d'accouchement ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
    M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, comme vous, je me réjouis de l'avènement de l'euro. Vous savez que je suis également l'élu d'une région transfrontalière, donc tout à fait soucieux des problèmes que vous soulevez. Au demeurant, l'avènement de la monnaie unique facilitera sans doute le rapprochement des peuples et effacera petit à petit les frontières.
    Toutefois, des problèmes demeurent, et vous avez bien voulu appeler mon attention sur celui des enfants nés de parents français à la maternité espagnole de Puigcerdà, en ce qui concerne le remboursement des frais engagés pour l'accouchement, d'une part, et la reconnaissance de la nationalité française de ces enfants, d'autre part.
    Sur le premier point, d'après les informations recueillies par la préfecture des Pyrénées-Orientales auprès de la caisse primaire d'assurance maladie, les délais de remboursement des frais hospitaliers ne seraient, en fait, que de l'ordre de trois ou quatre jours, sur présentation de la facture acquittée de l'hôpital de Puigcerdà.
    Une évolution positive devrait en tout état de cause intervenir dès cette année : une dotation spécifique sera accordée par l'agence régionale hospitalière à l'hôpital de Perpignan, pour servir de relais au paiement des frais hospitaliers des personnes admises en urgence à l'hôpital de Puigcerdà. Par ailleurs, la commission régionale à la naissance a étudié le recours à la maternité de Puigcerdà et a formulé des recommandations, dont certaines rejoignent la préoccupation dont vous m'avez fait part.
    A moyen terme, le Gouvernement est favorable à la coopération transfrontalière interhospitalière et à la mise en place d'une politique de complémentarité de l'offre de soins dans les régions transfrontalières. Les ministères de l'emploi et de la solidarité, des affaires étrangères et de l'intérieur mettent au point des textes organisant la coopération sanitaire transfrontalière et la prise en charge, par un régime de sécurité sociale, des personnes concernées. Ces textes définissent deux axes : une coopération sanitaire autorisant la conclusion de conventions transfrontalières d'établissements en vue de soins programmés ou d'urgence au bénéfice des personnes résidant dans des zones géographiques déterminées ; l'organisation des conditions de prise en charge par un régime de sécurité sociale des soins reçus à l'extérieur.
    L'aboutissement de cette démarche, que le Gouvernement souhaite rapide, devrait permettre une nette amélioration de la prise en charge des habitants des régions transfrontalières, notamment des habitants des cantons montagnards pyrénéens.
    Sur le second point, la nationalité des enfants concernés, il convient de nuancer vos remarques : si la reconnaissance de la nationalité d'un enfant - qu'il soit légitime ou naturel - par ses parents s'opère de plein droit, des difficultés peuvent survenir dans l'établissement d'un acte de naissance français. Il ne peut en effet s'agir d'une simple formalité, ne serait-ce que pour écarter tout risque de fraude. En l'espèce, c'est le consulat général de France à Barcelone qui dispose de la compétence exclusive pour enregistrer la naissance.
    Deux solutions - plus commodes que vous ne le laissez entendre - s'offrent aux parents français : soit se rendre dans un délai de trente jours dans les locaux du consultat à Barcelone afin qu'un acte de naissance soit dressé dans les mêmes conditions que celles auxquelles se soumettrait un officier d'état civil municipal ; soit demander, par courrier, la transcription au poste consulaire. Celui-ci, sensible à la situation particulière des Français résidant dans les communes transfrontalières et dont les enfants viennent au monde à Puigcerdà, instruit ces demandes, je peux vous l'assurer, à titre prioritaire, dans un délai de trois semaines - au lieu de trois mois habituellement. Dans ce cas, l'acte est directement expédié, avec le livret de famille complété, aux requérants. Cette seconde formule pourrait être plus souvent utilisée.
    Monsieur le député, vous êtes à même de répercuter ces informations. On doit pouvoir éviter les déplacements longs et dangereux que vous évoquiez, tout en conservant à l'établissement de la nationalité française les conditions de sécurité qui s'imposent.
    M. le président. La parole est à M. Henri Sicre.
    M. Henri Sicre. Merci, monsieur le ministre, pour ces précisions. Je suis ravi d'apprendre qu'en peu de temps les délais de remboursement des frais hospitaliers ont été très réduits et que le Gouvernement souhaite parvenir assez rapidement à la conclusion de conventions avec les établissements concernés. Pour ce qui est de la seconde partie de la question, il est évident qu'il est difficile de se rendre à Barcelone, qui est tout de même à près de deux cents kilomètres.
    Bien sûr, je répercuterai ces éléments de réponse en espérant qu'ils permettront d'apaiser l'inquiétude des parents qui utilisent les services de l'hôpital de Puigcerdà.

SOC 11 REP_PUB Languedoc-Roussillon O