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M. François d'Aubert. Je voudrais vous interroger, monsieur le Premier ministre, sur le comportement, pour le moins singulier, de votre Gouvernement dans cette affaire pluridimensionnelle, voire tentaculaire, qu'est celle de la MNEF et qui vous touche de si près. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il y d'abord la dimension justice. Nous n'avons toujours pas, madame la garde des sceaux, d'explications convaincantes sur ce qu'il faut bien appeler l'éviction de Mme Fulgéras, chef de la section des affaires financières du parquet de Paris, chargée de nombreux dossiers sensibles et plus particulièrement de celui de la MNEF. Est-ce un hasard ? Mme Fulgéras l'a dit à la presse: elle n'arrive pas à comprendre les raisons de sa mise à l'écart... Un député du groupe socialiste. Elle a dit le contraire ! M. François d'Aubert. ... sauf à penser - et c'est nous qui le disons - que nous assistons à une reprise en main insidieuse de la justice par le garde des sceaux. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) D'autant qu'existe également un projet, connu, de suppression de la sous-direction des affaires économiques et financières de la chancellerie, celle-là même qui est chargée d'aider les magistrats à lutter contre la délinquance financière. Est-ce un hasard ? Décidément, on a l'impression que l'affaire de la MNEF amène votre gouvernement à des comportements pour le moins bizarres, voire suspects. Dernier en date - et notre collègue Maurice Leroy en a parlé tout à l'heure -, l'intervention sur TF 1, dimanche soir, de M. le ministre de l'intérieur... Plusieurs députés du groupe socialiste. Bravo, monsieur Chevènement ! Très bonne intervention ! M. François d'Aubert. ... qui n'a pas hésité à intervenir très ouvertement, avec beaucoup de décontraction, dans la procédure en cours concernant M. Strauss-Kahn, en donnant à l'opinion publique des informations de police judiciaire qui sont tout simplement couvertes par le secret de l'instruction (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) et, même, à se hasarder à un pronostic sur l'issue de la procédure, comme pour faire pression sur les magistrats. (Exclamations sur les mêmes bancs.) M. Bernard Outin. Vous ne manquez pas d'air ! M. François d'Aubert. Monsieur le Premier ministre, où va-t-on ? Quelle est donc votre conception, et surtout quelle est celle du ministre de l'intérieur, sur la séparation des pouvoirs, sur l'indépendance de la magistrature... M. Didier Boulaud. Sur l'Himalaya ! Plusieurs députés du groupe socialiste. Et Tiberi ? Et Toubon ? M. François d'Aubert. ... sur le respect de la loi, en particulier du code de procédure pénale ? Et puis il y a cette dimension que j'ose à peine qualifier, mais c'est pourtant bien le mot qui convient, de dimension «pouponnière». (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Car, monsieur le Premier ministre, lorsque vous étiez premier secrétaire du parti socialiste, entre 1981 et 1987, puis entre 1995 et 1997... M. Georges Frêche. Où est Tiberi ? M. Julien Dray. Et Toubon ? M. François d'Aubert. ... pouviez-vous ignorer que la MNEF, comme l'a déclaré très sobrement M. Le Guen, député de Paris et président de la fédération du parti socialiste de Paris, que la MNEF servait de «pouponnière» aux socialistes ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) De toute évidence, la MNEF remplissait donc une fonction politique tout à fait éminente, celle d'une pouponnière, voire d'une pépinière,... M. le président. Monsieur d'Aubert... M. François d'Aubert. ... mais aussi peut-être d'une terre d'accueil, d'une base de repli dans le dispositif du parti (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) dont, monsieur le Premier ministre, vous étiez vous-même, je le répète, le premier secrétaire. Et sans doute remplissait-elle une fonction encore plus éminente quand on sait que la mutuelle «employait» des responsables du parti socialiste et plus précisément encore des membres d'un groupe qui vous est très proche, monsieur Jospin, et que l'agence de publicité de la mutuelle, Policité, serait même intervenue au profit de candidats socialistes parisiens aux élections législatives de 1997. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.) M. Julien Dray. Bouffon ! M. Jean-Yves Le Déaut. La question ! M. François d'Aubert. N'y a-t-il pas, contrairement à ce que vous avez dit la semaine dernière, monsieur le Premier ministre, des liens politiques fonctionnels, voire personnels, entre certains dirigeants de la MNEF et la direction du PS ? M. Georges Frêche. Tiberi, Toubon, même combat ! M. François d'Aubert. Quant à la dimension «commerce extérieur», j'ose à peine en parler car M. le président me demande de terminer. Nous savons maintenant qu'il y avait une sorte de filiale taïwanaise de la MNEF qui a joué un rôle sur lequel nous aimerions avoir des explications de M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur ou de M. le ministre des affaires étrangères. M. le président. Veuillez terminer, monsieur d'Aubert ! M. François d'Aubert. N'oublions pas l'essentiel, à savoir que la sécurité sociale et des milliers d'étudiants ont été escroqués sans doute pour des centaines de millions de francs, pendant des années, par des dirigeants socialistes de la MNEF. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Quelles mesures comptez-vous prendre pour indemniser toutes celles et tous ceux qui ont été les victimes de ces turpitudes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) M. Julien Dray. Lamentable ! Un député du groupe du Rassemblement pour la République. C'est l'affaire qui est lamentable ! M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux. Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, je vais tâcher de répondre aux nombreux aspects de votre question. Sur la réorganisation interne du parquet de Paris, j'ai répondu longuement la semaine dernière. M. Jean-Michel Ferrand. Nous voulons des précisions ! Mme la garde des sceaux. Il est très important, en effet, que le parquet de Paris puisse se réorganiser... M. Yves Nicolin. Et ça tombe bien ! Mme la garde des sceaux. ... afin de lutter plus efficacement contre la délinquance de tous les jours, celle qui empoisonne la vie quotidienne de nos concitoyens et, par conséquent, puisse calquer son organisation sur celle de la police judiciaire pour avoir un action de terrain plus efficace. S'agissant de Mme Fulgéras, je répète ici volontiers que si elle ne souhaite pas rester au parquet de Paris («Ce n'est pas vrai !» sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants) où, je le signale, elle est toujours premier substitut et où on lui a fait des offres, et si ces offres ne lui conviennent pas, elle se verra naturellement proposer des postes à l'extérieur, bien entendu dans les juridictions ou dans des postes de détachement qui correspondront à ses desiderata. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) S'agissant de la réorganisation de la direction des affaires criminelles et des grâces, le seul but poursuivi par le Gouvernement, en conformité d'ailleurs avec les instructions données par le Premier ministre est que les directions des différents ministères correspondent à l'action qui est menée par le Gouvernement; la direction des affaires criminelles et des grâces, depuis deux ans et demi, ne donne plus aucune espèce d'instruction au parquet. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il faut, par conséquent, que sa réorganisation reflète la réalité de son travail, aujourd'hui, qui est, d'une part, de faire de la législation et, d'autre part, d'envoyer des circulaires de politique pénale générale du garde des sceaux. En troisième lieu, vous avez posé des questions sur les dossiers judiciaires, tout en vous étonnant d'ailleurs que l'on puisse avoir des informations, ici ou là, à leur sujet. Monsieur le député, deux informations judiciaires ont été ouvertes à la suite de rapports qu'a reçus le Gouvernement. Le rapport de la Cour des comptes a été transmis au parquet quatre jours après que je l'ai reçu. M. Yves Nicolin. Heureusement ! Mme la garde des sceaux. Le rapport que Martine Aubry a reçu de l'inspection générale des affaires sociales a été transmis à la justice sur la base de l'article 40 du code de procédure pénale. Dès que le parquet de Paris a reçu des réquisitoires supplétifs des juges d'instruction, M. Riberolles et Mme Neher, ces réquisitoires supplétifs ont été le jour même renvoyés. Tout cela vous montre - et ça n'a pas toujours été le cas - que le Gouvernement a assumé toutes ses responsabilités dans la plus grande transparence et avec rapidité. Quant à la justice, elle aussi a agi avec célérité. Pour ce qui est du contenu des dossiers judiciaires, c'est à la justice de l'apprécier. J'estime ne pas avoir à me prononcer sur les questions que vous posez à propos de dossiers dont le Gouvernement n'a pas à connaître,... M. Pierre Lequiller et M. Yves Nicolin. Et Chevènement ? Mme la garde des sceaux. ... dont seule la justice a à établir la réalité. Ce n'est pas parce que vous avez posé des questions sur tout et n'importe quoi que j'ai à me prononcer sur tout et n'importe quoi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) |