FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 162  de  M.   Cochet Yves ( Radical, Citoyen et Vert - Val-d'Oise ) QOSD
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  04/02/1998  page :  1022
Réponse publiée au JO le :  11/02/1998  page :  1360
Rubrique :  emploi
Tête d'analyse :  chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises
Analyse :  aides de l'Etat
Texte de la QUESTION : M. Yves Cochet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'insuffisance des moyens dont disposent les chômeurs pour créer ou reprendre une entreprise. Trente-sept mesures pour simplifier la vie des PME ont été présentées en décembre par le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises et entreront progressivement en application courant 1998. Certaines de ces mesures facilitent la création d'une entreprise, mais uniquement d'un point de vue administratif, et ne s'adressent pas spécifiquement aux chômeurs. Or ces derniers sont potentiellement porteurs de nombreux projets pour créer leur propre emploi et en générer d'autres. Par exemple, près de 30 % des créateurs sont des cadres ou assimilés et 43 % étaient au chômage avant de créer leur entreprise. Pour eux, la logique du traitement économique du chômage doit permettre de transformer les « dépenses passives » en « dépenses actives ». Le dispositif de l'aide au chômeur créateur-repreneur d'entreprise, l'ACCRE, issu de la loi de finances de 1997, a supprimé au 1er janvier 1997 le volet « aide financière forfaitaire », qui était d'un montant de 32 000 francs dans sa dernière version, et n'a maintenu que l'exonération des charges sociales. Il lui demande donc s'il mène actuellement une réflexion pour élaborer un nouveau dispositif d'aide financière aux chômeurs désirant créer ou reprendre une entreprise, et, dans l'affirmative, si un projet est déjà rédigé et à quelle date il compte le rendre public. Aujourd'hui, l'allocation unique dégressive (AUD) étant supprimée au demandeur d'emploi qui crée ou reprend une entreprise, beaucoup renoncent à leur projet. Il souhaiterait savoir s'il envisage un projet qui permettrait de conserver une allocation chômage pendant la période de démarrage. Il conviendrait peut-être d'adapter la convention de coopération, qui permet à une entreprise de bénéficier de l'AUD d'un chômeur qu'elle embauche, au chômeur créateur lui-même. Il faudrait savoir si, en cas d'échec, le créateur retrouverait son droit aux indemnités ASSEDIC. Enfin, il lui demande s'il envisage de donner le statut de salarié au créateur d'entreprise individuelle, pour qu'il puisse bénéficier d'une protection et de l'exonération des charges liées à ce statut, tout comme un gérant minoritaire dans le cas où son contrat de salarié est différent de son mandat social. Cette mesure encourageait l'initiative individuelle en donnant aux créateurs de leur « propre emploi » les mêmes garanties qu'un salarié.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Yves Cochet a présenté une question, n° 162, ainsi rédigée:
«M. Yves Cochet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'insuffisance des moyens dont disposent les chômeurs pour créer ou reprendre une entreprise. «Trente-sept mesures pour simplifier la vie des PME» ont été présentées en décembre par le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises et entreront progressivement en application courant 1998. Certaines de ces mesures facilitent la création d'une entreprise, mais uniquement d'un point de vue administratif et ne s'adressent pas spécifiquement aux chômeurs. Or, ces derniers sont potentiellement porteurs de nombreux projets pour créer leur propre emploi et en générer d'autres. Par exemple, près de 30 % des créateurs sont des cadres ou assimilés et 43 % étaient au chômage avant de créer leur entreprise. Pour eux, la logique du traitement économique du chômage doit permettre de transformer les «dépenses passives» en «dépenses actives». Le dispositif de l'aide au chômeur créateur repreneur d'entreprise, l'ACCRE, issu de la loi de finances de 1997, a supprimé au 1er janvier 1997 le volet «aide financière forfaitaire», qui était d'un montant de 32 000 francs dans sa dernière version, et n'a maintenu que l'exonération des charges sociales. Il lui demande donc s'il mène actuellement une réflexion pour élaborer un nouveau dispositif d'aide financière aux chômeurs désirant créer ou reprendre une entreprise et, dans l'affirmative, si un projet est déjà rédigé et à quelle date il compte le rendre public. Aujourd'hui, l'allocation unique dégressive (AUD) étant supprimée au demandeur d'emploi qui crée ou reprend une entreprise, beaucoup renoncent à leur projet. Il souhaiterait savoir s'il envisage un projet qui permettrait de conserver une allocation chômage pendant la période de démarrage. Il conviendrait peut-être d'adapter la convention de coopération, qui permet à une entreprise de bénéficier de l'AUD d'un chômeur qu'elle embauche, au chômeur créateur lui-même. Il faudrait savoir si, en cas d'échec, le créateur retrouverait son droit aux indemnités ASSEDIC. Enfin, il lui demande s'il envisage de donner le statut de salarié au créateur d'entreprise individuelle, pour qu'il puisse bénéficier d'une protection et de l'exonération des charges liées à ce statut, tout comme un gérant minoritaire dans le cas où son contrat de salarié est différent de son mandat social. Cette mesure encouragerait l'initiative individuelle en donnant aux créateurs de leur «propre emploi» les mêmes garanties qu'un salarié.»
La parole est à M. Yves Cochet, pour exposer sa question.
M. Yves Cochet. Monsieur le président, plusieurs habitants, chômeurs de ma circonscription du Val-d'Oise, cadres, anciens cadres ou non, m'ont interrogé sur le dispositif qui leur permettait auparavant d'être créateurs ou repreneurs d'entreprises et de transformer ainsi les dépenses passives du chômage en dépenses actives.
De quoi s'agit-il ? De deux dispositifs qui sont actuellement en difficulté.
Le premier est l'aide au chômeur créateur repreneur d'entreprise, l'ACCRE, qui a été créé il y a plus de vingt ans. Or, le 1er janvier 1997, un des volets, l'aide financière forfaitaire, qui était d'un montant de 32 000 francs dans sa dernière version, a été supprimée; l'exonération des charges sociales a certes été maintenue pendant un an, mais ce n'est pas suffisant. J'ai eu plusieurs contacts avec des responsables de sociétés coopératives ouvrières de production, qui ont vu depuis un an leurs possibilités de créations d'emplois chuter de 50 % du fait de cette insuffisance de l'ACCRE.
D'où ma première question: le Gouvernement a-t-il ouvert une réflexion pour élaborer un nouveau dispositif d'aide financière aux chômeurs qui désireraient créer ou reprendre une entreprise ?
Le deuxième dispositif dont les chômeurs bénéficient actuellement, si l'on peut dire, est l'allocation unique dégressive, l'AUD.
Evidemment, dès que le demandeur d'emploi crée ou reprend une entreprise, il perd l'AUD. L'effet pervers de cette sanction est que le chômeur préférera peut-être rester chômeur passif, assisté, plutôt que de créer une entreprise d'un ou deux salariés. S'il continuait à toucher l'AUD, cela l'aiderait à mettre en place son entreprise et cette aide serait donc beaucoup moins stérile au point de vue de la création d'emplois.
Ma deuxième question est donc la suivante: envisagez-vous que les chômeurs puissent conserver l'allocation chômage pendant la période de démarrage d'une entreprise reprise ou créée par eux ? Par exemple, il conviendrait d'adapter la convention de coopération, qui permet à une entreprise de bénéficier de l'AUD d'un chômeur qu'elle embauche, et d'en faire bénéficier le chômeur créateur lui-même.
J'en viens à ma troisième question: le créateur d'entreprise individuelle ne pourrait-il avoir le statut de salarié, de telle manière qu'il puisse bénéficier d'une protection et de l'exonération des charges liées à ce statut, comme un gérant minoritaire dans le cas où son contrat de salarié est différent de son mandat social ? Cette troisième mesure encouragerait l'initiative individuelle en donnant aux créateurs leur propre emploi, mais aussi les mêmes garanties que celles dont bénéficie un salarié.
Voilà trois propositions qui permettraient d'accentuer la lutte contre le chômage, lutte dans laquelle nous sommes évidemment solidaires avec le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
M. Jacques Dondoux, secrétaire d'Etat au commerce extérieur. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Dominique Strauss-Kahn, qui ne peut être présent ce matin et j'espère que la réponse que je vais faire vous donnera satisfaction.
Le soutien à la création d'entreprise, qui permet de favoriser l'insertion des chômeurs par l'économique, est au centre des préoccupations du Gouvernement.
Notre action en matière d'aide à la création d'entreprise prend diverses formes.
En premier lieu, la politique économique générale que nous conduisons, en favorisant le développement économique, encourage l'émergence de projets nouveaux. Pour que des entreprises nouvelles se créent, il faut que les orientations de la politique économique soient clairement tournées vers la croissance, croissance que nous voulons solidaire.
Dans ce cadre, le Gouvernement travaille aussi activement à l'allégement des formalités pesant sur les entreprises, pour que leurs énergies puissent être mobilisées sur leur fonction première, qui est de produire, en réponse à la demande des marchés. Vous avez cité l'important programme de simplification que, avec Marylise Lebranchu, Dominique Strauss-Kahn a lancé, suite au rapport de votre collègue Dominique Baert.
C'est dans ce cadre général que s'insèrent les dispositifs financiers d'aide à la création d'entreprise. L'Etat intervient dans trois directions.
Tout d'abord, pour accroître les chances de succès des nouvelles entreprises en renforçant la formation des créateurs, l'Etat finance des chèques-formation: cela permet aux nouveaux entrepreneurs de bénéficier d'un accompagnement personnalisé et d'une aide à la préparation de leur projet d'entreprise. A cet effet, un crédit de 40 millions de francs a été voté par votre assemblée en 1998.
Ensuite, les charges pesant sur les entreprises nouvelles sont allégées: après avis d'une commission départementale d'experts, le préfet peut accorder une exonération de charges sociales valable une année. Plus de 32 000 personnes en ont bénéficié en 1997, ce qui représente un effort de la collectivité de plus d'un milliard de francs. J'ajoute que le basculement de la cotisation d'assurance maladie vers la CSG, voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, s'est traduit par un allégement substantiel de la cotisation maladie qui pèse sur les nouvelles entreprises.
Enfin, le financement initial des projets est soutenu: les systèmes de garantie publics, en garantissant une partie des prêts, interviennent pour faciliter l'accès au crédit des jeunes entreprises.
Au total, M. Dominique Strauss-Kahn a le sentiment que cet ensemble de leviers permet d'encourager la création d'entreprises dans notre pays, notamment en direction des chômeurs qui souhaitent créer leur propre entreprise. A cet égard, vous proposez deux types de mesures nouvelles sur lesquelles vous souhaitez connaître l'avis du Gouvernement.
Votre proposition concernant le statut des créateurs d'entreprise ouvre un champ d'analyse qui dépasse largement le seul cadre de la création d'entreprise. Soyez assuré que, dans toutes les décisions que prend le Gouvernement sur ces questions, l'impact sur la situation des entreprises nouvelles est naturellement pris en compte, avec le souci de faciliter leurs actions.
S'agissant de la poursuite temporaire du versement des indemnités chômage aux bénéficiaires de l'allocation unique dégressive, nous butons sur une question de compétence des différents intervenants en matière d'indemnisation du chômage. En effet, les règles applicables à ces allocations relèvent de la compétence des partenaires sociaux, gestionnaires de l'UNEDIC. L'Etat, pour sa part, a déjà prévu un mécanisme de ce type en ce qui concerne les personnes qui perçoivent l'allocation de solidarité spécifique, pour lesquelles le maintien de l'allocation pendant six mois est prévu en cas de création d'une entreprise.
Vous me permettrez d'ajouter que les problèmes posés par la création des SCOP sont importants. Il y a dans ma circonscription, dont Jean Pontier est maintenant chargé de défendre les intérêts, une SCOP ayant repris une société qui avait déposé son bilan. La principale difficulté est celle des fonds propres. Il faudra trouver, sur les plans législatif et réglementaire, une solution pour que, en cas de mutation technologique, ces SCOP arrivent à suivre, c'est-à-dire, après avoir créé l'emploi, à le maintenir.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Je suis globalement satisfait de cette réponse, monsieur le secrétaire d'Etat. J'en connaissais déjà la teneur générale; mais j'attendais avec beaucoup d'impatience la partie concernant plus particulièrement les chômeurs qui veulent devenir créateurs ou repreneurs d'entreprise. En effet, si les mesures annoncées par Mme Lebranchu sont intéressantes, elles ont un caractère administratif et ne s'adressent pas spécifiquement aux chômeurs.
Je note également avec satisfaction l'intention du Gouvernement d'agir en faveur des SCOP. Ce secteur de l'économie solidaire doit être, notamment pour ce qui concerne la reprise ou la création d'entreprise par des chômeurs, une illustration de la politique gouvernementale. Ce ne sont pas seulement ceux qui ont de l'argent qui doivent pouvoir créer des entreprises et je connais, comme vous, monsieur le secrétaire d'Etat, plusieurs associations de chômeurs qui, avec des banques solidaires, cherchent des systèmes de financement pour créer des entreprises.
RCV 11 REP_PUB Ile-de-France O