LUTTE CONTRE LE PIRATAGE DES
LOGICIELS
M. le président.
M. Henri Plagnol a présenté une question, n° 1639, ainsi rédigée :
« M. Henri Plagnol attire
l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur les
conséquences du piratage des logiciels. Nul ne peut ignorer que la reproduction
illicite de logiciels et la commercialisation des copies contrefaisantes sont
préjudiciables non seulement aux éditeurs de logiciels, mais également aux
revendeurs légaux ainsi qu'aux consommateurs. En outre, il en résulte une réelle
perte de recettes fiscales pour l'Etat, qu'il s'agisse de l'impôt sur les
sociétés ou de la TVA. Aujourd'hui, avec un taux de 40 %, la France affiche
toujours un taux de piratage des logiciels supérieur à la moyenne européenne,
qui est de 34 %. Alors que le développement des nouvelles technologies en
France est porteur de croissance, le piratage constitue un frein à la croissance
du secteur et décourage les entrepreneurs français comme les investisseurs
étrangers. Les pertes causées sur le marché français par le piratage ont été
estimées à 3,2 milliards de francs pour l'année 1999. Des milliers
d'emplois n'ont pas été créés et ne le seront pas en raison du découragement des
investisseurs. Aujourd'hui, tous ces professionnels sont inquiets de l'absence
de mobilisation du gouvernement sur ce sujet. Certes, celui-ci a bien lancé un
programme de recherche dit RIAM. Son utilité n'est pas discutable. Certes le
conseil supérieur de la propriété intellectuelle et artistique (CSPLA) évoque ce
sujet, mais une action concrète et efficace est désormais indispensable. La
commission de Bruxelles se mobilise sur le sujet. Nous ne pouvons demeurer à la
traîne d'un mouvement qui se généralise en faveur de la défense de la propriété
intellectuelle. Pour préserver la propriété intellectuelle et le développement
de ce secteur, la lutte contre le piratage des contenus numériques doit devenir
une priorité du gouvernement. La société de l'information ne doit pas être une
société de non-droit. Il lui demande quelles sont ses intentions dans ce
domaine. »
La parole est à
M. Henri Plagnol, pour exposer sa question.
M. Henri Plagnol.
Monsieur le ministre délégué chargé des affaires européennes, je souhaite
attirer l'attention du Gouvernement sur les conséquences du piratage des
logiciels pour l'industrie et l'économie françaises. Nul n'ignore en effet que
la reproduction illicite de logiciels et la commercialisation des copies
contrefaisantes sont préjudiciables, non seulement pour les éditeurs de
logiciels, mais également pour leurs revendeurs légaux et pour les
consommateurs.
En outre, il en
résulte une perte de recettes fiscales pour l'Etat, qu'il s'agisse de l'impôt
sur les sociétés ou de la TVA.
Il faut le redire, les logiciels
professionnels et de loisirs sont protégés par le droit d'auteur. Et derrière la
petite galette en plastique ou le programme téléchargé par l'Internet, il y a
des milliers d'heures de travail, de recherche, de création. La valeur du
logiciel réside bien dans l'immatériel.
Or, aujourd'hui, la France affiche
toujours un taux de piratage des logiciels supérieur à la moyenne européenne :
40 % contre 34 %. Alors que le développement des nouvelles technologies
dans notre pays est porteur de croissance, le piratage constitue un frein à la
croissance du secteur et décourage les entrepreneurs français comme les
investisseurs étrangers.
Les
pertes causées sur le marché français par le piratage ont été estimées à
3,2 milliards de francs pour l'année 1999. Des milliers d'emplois
n'ont pas été créés et ne le seront pas en raison du découragement des
investisseurs. La piraterie de logiciels constitue donc non seulement un
préjudice grave pour les éditeurs de logiciels, mais également pour la société
dans son ensemble.
Il est temps
qu'une prise de conscience ait lieu sur cette question et qu'on ne se borne plus
à des effets d'annonce. Qu'est devenue la grande campagne de sensibilisation
promise par le Premier ministre lors du MILIA, le 12 février 2001,
pour la rentrée de septembre 2001 sur le thème de la piraterie des contenus
numériques, notamment les logiciels professionnels et de jeux ?
Pourtant, l'attente est forte chez
tous les professionnels du contenu numérique, du logiciel professionnel comme de
loisir. La défense de la propriété intellectuelle reste pour eux un élément
essentiel du développement de leur secteur au plan de l'économie et de la
création culturelle.
Aujourd'hui, tous ces
professionnels sont inquiets du fait de l'absence de mobilisation du
Gouvernement sur ce sujet. Certes, celui-ci a lancé un programme de recherche,
dit RIAM, dont l'utilité n'est pas discutable. Certes, le Conseil supérieur de
la propriété intellectuelle et artistique évoque ce sujet. Mais une action
concrète et efficace est désormais indispensable.
D'ailleurs, monsieur le ministre,
la Commission de Bruxelles se mobilise sur le sujet. Nous ne pouvons demeurer à
la traîne d'un mouvement qui se généralise en faveur de la défense de la
propriété intellectuelle. Au-delà du pirate en culotte courte, nous savons tous
en effet qu'il y a aussi, et surtout, de véritables pratiques délictueuses de
plus en plus organisées avec des réseaux criminels, qui se livrent à la
contrefaçon et au trafic.
Pour
préserver la propriété intellectuelle et le développement de ce secteur, la
lutte contre le piratage des contenus numériques doit devenir une priorité du
Gouvernement. La société de l'information ne doit pas être une société de
non-droit.
M. le président. La
parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires
européennes. Monsieur le député, en installant le Conseil supérieur de la
propriété littéraire et artistique en mai 2001, la ministre de la culture
et de la communication a relevé la préoccupation que vous soulevez quant aux
risques que peut comporter pour les titulaires de droits, en particulier les
éditeurs de logiciels, la reproduction illicite et la commercialisation de
copies contrefaites liées au développement des réseaux numériques, étant bien
consciente que cela ne se limitait pas au piratage en culotte courte.
En effet, dans une économie de plus
en plus fondée sur l'innovation, la connaissance et la création intellectuelle,
les réseaux interconnectés participent au développement de la contrefaçon
numérique qui constitue une menace réelle pour l'économie de la créativité et le
développement de l'innovation. Elle affecte notamment les petites structures qui
n'ont pas nécessairement les moyens de se procurer les outils adéquats pour
mener une action efficace.
Cette
préoccupation n'est pas seulement celle du ministère de la culture, elle est
également celle du secrétariat d'Etat à l'industrie qui a confié la présidence
du Comité national anticontrefaçon à Mme Brigitte Douay, députée du Nord,
par ailleurs membre du Conseil supérieur de la propriété littéraire et
artistique en tant que personnalité qualifiée. Les travaux engagés par le
Gouvernement en concertation avec les professionnels pour envisager les moyens
adaptés à la modernisation de la lutte contre la contrefaçon, de manière très
concrète et pragmatique, ont fait apparaître l'importance de la dimension
européenne et même mondiale de cette question.
A la suite du Livre vert sur la
contrefaçon et la piraterie, la Commission européenne a confirmé son initiative
d'une directive sur ce sujet qui est actuellement en cours de rédaction par les
services de Bruxelles. Les autorités françaises ont appuyé cette initiative et
participent activement aux discussions pour assurer la défense renforcée des
droits d'auteur et des droits voisins sur le plan communautaire.
Sur le plan national, Mme Brigitte
Douay a indiqué au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique
que le groupe de travail du Comité national anti-contrefaçon avait recommandé
prioritairement deux types d'actions : une extension du pouvoir de saisie des
douanes, le développement de l'information sur la propriété intellectuelle
auprès d'utilisateurs de nouvelles technologies, en particulier du jeune public,
et une responsabilité accrue des acteurs des réseaux.
Le projet de loi sur la société de
l'information, déposé sur le bureau de votre assemblée en juin 2001,
confirme que la procédure d'urgence de la contrefaçon est applicable à
l'encontre d'intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour
porter atteinte au droit d'auteur. En outre, les services du ministère de la
justice et le ministère de la culture et de la communication ont entrepris de
mettre à jour les orientations du ministère public en matière de lutte contre la
contrefaçon, en s'appuyant notamment sur l'action réalisée par les agents
assermentés par le ministère de la culture et de la communication ou sur les
difficultés qu'ils peuvent rencontrer.
La réflexion et les études sur les
protections technologiques contre la piraterie se poursuivent, notamment dans le
cadre des travaux menés par le RIAM mis en place conjointenement par le
ministère de la culture, le ministère de la recherche et le secrétariat d'Etat à
l'industrie, en relation avec le comité national anti-contrefaçon, afin de
définir les moyens d'actions utiles pour la mise en place de mesures techniques
de protection à l'usage des différentes catégories d'acteurs.
Enfin, la préparation par les
pouvoirs publics et les professionnels d'une campagne de sensibilisation sur les
réseaux, qui n'est pas chose simple, est en voie d'achèvement et contribuera à
toucher les jeunes publics, en particulier sur la contrefaçon de logiciels.
Monsieur le député, il s'agit là
- vous le savez mieux que quiconque - d'un sujet très complexe dont on
voit, à travers cette longue réponse, qu'il doit être traité sous différents
angles. Soyez certain que le Gouvernement est déterminé à s'attaquer à ce
problème.
M. le président. La
parole est à M. Henri Plagnol.
M. Henri Plagnol.
Merci, monsieur le ministre, pour cette réponse très circonstanciée.