TARIFICATION DES ÉTABLISSEMENTS
HÉBERGEANT DES PERSONNES ÂGÉES
Mme la présidente. Mme Sylvia Bassot a présenté une question, n° 1670, ainsi rédigée :
« Mme Sylvia Bassot souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur une difficulté que rencontrent les maisons de retraite dans le cadre de la réforme de la tarification des établissements hébergeant des personnes âgées. Ce nouveau dispositif comporte des dysfonctionnements allant à l'encontre de l'objectif recherché, à savoir l'amélioration de la prise en charge des soins des personnes âgées. La réforme dote chaque établissement d'une enveloppe globale pour les soins et pour l'ensemble des résidents. Son montant est fixé par la DDASS et forfaitise les dépenses concernant les médicaments pour l'ensemble des personnes hébergées dans la structure. Ainsi, les résidents des établissements ne peuvent plus se procurer eux-mêmes les médicaments prescrits par le médecin ni se les faire rembourser puisque tout est centralisé par l'établissement. Cette dotation globale limite le budget médicament par résident et par jour. De ce fait les maisons de retraite sont obligées, pour ne pas dépasser leur budget soin, de limiter l'accueil des personnes âgées souffrant d'une pathologie lourde, souvent récurrente nécessitant une prescription médicamenteuse coûteuse. Cette discrimination n'est pas supportable alors que la réforme se veut une avancée. Face à cette situation, elle lui demande d'indiquer si l'on peut envisager de mettre en place, en fonction des pathologies, un dispositif autorisant les DDASS à attribuer des dotations particulières pour faire face à des situations spécifiques, ou mieux encore un dispositif qui autoriserait le remboursement de certains médicaments coûteux directement au patient, sur le budget risque de la sécurité sociale, complété le cas échéant par la mutuelle de la personne. »
La parole est à Mme Sylvia Bassot, pour exposer sa question.
Mme Sylvia Bassot. Madame la ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées, je souhaitais appeler l'attention de Mme Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur une difficulté que rencontrent les maisons de retraite dans le cadre de la réforme de la tarification des établissements hébergeant des personnes âgées.
Ce nouveau dispositif souffre de dysfonctionnements qui vont à l'encontre de l'objectif recherché, à savoir l'amélioration de la prise en charge des soins aux personnes âgées.
Avant la réforme, les établissements étaient ou n'étaient pas médicalisés, selon qu'ils avaient pu ou non ouvrir une section de cure médicale financée par l'assurance maladie. Ce système n'était pas sans inconvénients, sur le plan notamment de l'équité entre les différents établissements.
Afin de gommer ces disparités, chaque établissement se voit désormais attribuer une enveloppe globale pour les soins et pour l'ensemble des résidents. Son montant est fixé par la DDASS et forfaitise les dépenses de médicaments pour l'ensemble des personnes hébergées dans la structure. Ainsi, les résidents des établissements ne peuvent plus se procurer eux-mêmes les médicaments prescrits par le médecin ni se les faire rembourser puisque tout est centralisé par l'établissement qui les héberge. Le problème est que cette dotation globale limite le budget « médicament » par résident et par jour. De ce fait, les maisons de retraite sont obligées, pour ne pas dépasser leur budget « soins », de limiter l'accueil des personnes âgées souffrant d'une pathologie lourde, souvent récurrente, nécessitant une prescription médicamenteuse coûteuse.
Cette discrimination n'est pas supportable, alors que la réforme se veut une avancée ; elle l'est d'autant moins que les médicaments seraient remboursés sans plafond si la personne était soignée à domicile.
L'équilibre du budget « soins » ne peut être en piochant dans l'enveloppe dépendance ; cela serait contraire à l'esprit de la loi.
On ne peut pas non plus faire le pari que les dépenses médicamenteuses seront plus ou moins importantes d'une année sur l'autre, ni qu'un lissage pourra se faire entre des résidents dont l'état de santé est fragilisé par l'âge.
Face à cette situation, pouvez-vous m'indiquer, madame la ministre, si l'on peut envisager de mettre en place, en fonction des pathologies, un dispositif autorisant les DDASS à attribuer des dotations particulières pour faire face à des situations spécifiques ou, mieux encore, un système qui autoriserait le remboursement de certains médicaments coûteux directement au patient, sur le budget risque de la sécurité sociale, complété, le cas échéant, par la mutuelle de l'intéressé ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux
personnes handicapées Madame la députée, la réforme des établissements hébergeant des personnes âgées a pour objectif essentiel d'améliorer la qualité du service offert aux personnes hébergées, et notament la qualité des soins. Dans cet esprit, elle donne aux établissements des moyens nouveaux et considérables : le plan de médicalisation de l'assurance maladie prévoit chaque année une enveloppe de mesures nouvelles nettes de plus de 180 millions d'euros.
Elle prévoit également, en plus de ces mesures nouvelles, de donner aux établissements, au fur et à mesure qu'ils signeront des conventions, la contrepartie des frais de médecine de ville et notamment de médicaments qui étaient communément consommés par les résidents avant la convention. Les établissements disposeront donc d'enveloppes suffisantes pour bien financer les médicaments. Rappelons que le nouveau système abandonne le plafonnement forfaitaire des dépenses médicales pour adopter une tarification tenant compte des coûts réels et de l'état de santé des résidents.
De surcroît, les traitements très coûteux, tels les traitements anti-cancéreux ou les dialyses, seront, comme c'était déjà le cas auparavant, pris en charge hors du budget de l'établissement.
Enfin, pour rassurer les établissements sur ce point, s'il apparaissait dans les prochaines années, ce que l'on ne peut que souhaiter, des molécules efficaces contre certaines des maladies liées à l'âge - Alzheimer ou Parkinson - mais de coût très élevé, elles pourraient être financées sur des enveloppes spécifiques, comme cela s'est déjà fait dans un tout autre domaine pour les médicaments concernant le SIDA.
Afin de poursuivre cet objectif essentiel qu'est la qualité des soins, la réforme a mis en place un dispositif d'ensemble ambitieux mais réaliste, puisqu'il fonctionne déjà dans les quelque cinq cents établissements qui ont signé leur convention.
La réforme demande en effet à chaque établissement d'établir, dans le cadre de son projet d'établissement un « projet de soins », un projet médical en quelque sorte, qui sera élaboré et suivi sous l'égide d'un médecin coordonnateur, en concertation avec les médecins traitants et le personnel soignant de l'établissement, qu'il soit libéral ou salarié. Un programme spécial de formation pour ces médecins coordonnateurs actuellement se met en place.
Vous voyez donc que la question de la gestion des médicaments doit être replacée dans le cadre de l'ensemble de ce dispositif et de ce projet de soins dont le but est de mieux coordonner les efforts des professionnels.
Les spécialistes s'accordent à dire que, sur ce point, ce n'est pas la qualité qui fait la quantité, mais bien la compétence et la coordination. Il est donc essentiel que, en plus de la compétence médicale, la compétence pharmaceutique - c'est d'ailleurs l'objet essentiel de votre question - soit elle aussi présente et active : d'où la présence permanente de pharmaciens dans les établissements importants, et la présence du pharmacien d'officine dans la plupart des autres, ceux-ci pouvant dès lors être associés à la définition du projet de soins de l'établissement.
Le ministère de la santé a engagé des discussions avec les représentants de la profession pharmaceutique sur les modalités selon lesquelles l'officine de proximité de la maison de retraite pourrait être efficacement associée à l'équipe médicale de l'établissement, moyennant évidemment rémunération. Les discussions en cours devraient aboutir favorablement, tant le recours accru à ces professionnels de proximité du médicament peut être décisif, non seulement pour rationaliser la prescription - je pense notamment à une politique des génériques - mais aussi et surtout, pour mieux soigner.
Mme la présidente. La
parole est à Mme Sylvia Bassot.
Mme Sylvia Bassot. Je vous remercie de votre réponse. Il n'empêche que, dans l'Orne, où nous comptons de nombreux établissements pour personnes âgées, des pensionnaires se voient refuser l'accès à certains produits très onéreux, tels les anti-douleur, au motif que le budget médicaments de l'établissement ne le permet pas. Il faut rapidement trouver des solutions, faute de quoi nous irons vers une médecine à deux vitesses. Doit-on en conclure qu'il vaut mieux dans ce pays être riche, beau et bien portant que personne âgée en établissement ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau. Ça, c'est sûr !