Texte de la QUESTION :
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M. Maxime Gremetz attire l'attention de M. le ministre de la défense sur des informations fournies par une délégation franco-européenne composée de médecins et de juristes, s'étant rendue en mai dernier en Irak. Ces informations portent sur l'usage d'uranium appauvri par les Etats coalisés, lors de la guerre du Golfe. En effet, des observateurs allemands, américains et irakiens ont pu constater une contamination de certaines régions de l'Irak, suite à l'usage en 1991 d'armes dans la composition desquelles entre de l'uranium 238 ou uranium appauvri. Plus d'un million de munitions de ce type aurait été utilisé au cours de ce conflit par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Les médecins irakiens mais également étrangers ont observé une augmentation considérable des cas de leucémies en Irak : de 50 % à Bagdad à 350 % à Al Muthana, qu'ils imputent à l'uranium appauvri. Un rapport de l'United kingdom Atomic Energy Authority estime pour sa part à 500 000 le nombre de décès résultant de l'usage de telles armes en Irak. Dans le même temps, il semble que la France ait fait le choix, elle aussi, comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, Israël, l'Allemagne, la Russie, de s'engager sur la voie de la prolifération de l'uranium appauvri. Ainsi, le char-Leclerc est-il capable de tirer des obus-flèches à base d'uranium appauvri. Pour fabriquer ceux-ci, des entreprises françaises importent des Etats-Unis de l'uranium appauvri, alors que les stocks français provenant de notre industrie électro-nucléaire sont importants. Mais la question essentielle est la suivante : pourquoi notre pays devrait-il produire de telles armes, dont les effets provoquent sur les populations concernées leucémies malformations, anomalies spermatiques et génétiques ? Ne s'agit-il pas là, au demeurant, d'un alignement le plus complet sur les choix stratégiques et industriels de nos voisins d'outre-Atlantique qui trouvent dans ces nouvelles armes un débouché à faible coût pour les déchets de leur industrie nucléaire ? Il lui demande d'intervenir pour interdire la production d'armes à base d'uranium appauvri.
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Texte de la REPONSE :
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L'utilisation d'uranium appauvri dans la fabrication de munitions de type obus flèche résulte des propriétés physiques uniques de ce métal, qui lui confèrent une capacité de pénétration des blindages d'acier les plus résistants, supérieure à celle d'autres métaux comme le tungstène. Une munition « flèche » à uranium appauvri a été mise au point et fabriquée sous l'égide de la délégation générale pour l'armement, afin d'équiper notamment le char Leclerc. Ce type de munition a également été retenu par plusieurs pays de l'OTAN. Cette évolution dans le choix des munitions résulte, pour l'essentiel, de la nécessité de pénétrer des blindages de plus en plus performants (nouveaux matériaux, éléments réactifs). En effet, tout autre choix technologique impliquerait une baisse prévisionnelle des capacités opérationnelles de nos forces, et notamment du corps de bataille aéroterrestre, élément essentiel en cas de conflit de forte ou moyenne intensité. La France, qui utilise de l'uranium appauvri provenant de son industrie électronucléaire, en importe parfois des Etats-Unis pour subvenir à des besoins ponctuels. L'uranium appauvri a plusieurs utilisations ; il peut notamment entrer dans la fabrication de combustibles nucléaires à base d'oxydes mixtes de plutonium et d'uranium qui alimentent de nombreuses centrales nucléaires classiques ou les réacteurs à neutrons rapides de type Phénix. S'agissant de la toxicité pour l'être humain, l'uranium 238 ne présente pas de risque significatif lié au rayonnement de la matière dans son état de produit fini. A l'instar d'autres métaux lourds, il présente toutefois une toxicité à partir de doses relativement faibles s'apparentant à celles d'autres métaux lourds (plomb, mercure, etc.). Son absorption par l'organisme, via l'ingestion de produits contaminés, demeure néanmoins possible. Il est cependant peu probable que les doses absorbées de cette façon puissent provoquer sur la santé humaine les effets allégués, à l'échelle indiquée, dans le rapport de l'organisation non gouvernementale britannique. Dans le cas irakien, les zones présumées contaminées se situent au sud de ce pays, dans une région très peu peuplée car semi-désertique. L'uranium appauvri, qui ne constitue pas une substance prohibée au regard de la législation internationale ou européenne, est classé en France dans le groupe des nucléïdes de faible radiotoxicité. Le décret n° 66-450 du 20 juin 1966 modifié par le décret n° 88-521 du 18 avril 1988 fixe les limites d'absorption de ce produit par ingestion ou inhalation, ainsi que les limites dérivées de concentration dans l'air. Enfin, pour éviter tout risque de détournement à des fins nucléaires militaires, l'uranium appauvri est contrôlé par l'agence internationale de l'énergie atomique de Vienne en tant que matériau source.
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