FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 169  de  M.   Dauge Yves ( Socialiste - Indre-et-Loire ) QOSD
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  04/02/1998  page :  1024
Réponse publiée au JO le :  11/02/1998  page :  1361
Rubrique :  marchés publics
Tête d'analyse :  sous-traitance
Analyse :  réglementation
Texte de la QUESTION : M. Yves Dauge attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conditions dans lesquelles sont passés les marchés publics lorsqu'ils sont soumissionnés par les grandes entreprises qui font appel à des entreprises plus petites pour sous-traiter et ce parfois dans des conditions défavorables aux artisans et aux PME. Il lui demande s'il ne serait pas possible de réglementer de façon plus stricte les modalités de recours à la sous-traitance en établissant notamment une liste des lots et des entreprises susceptibles de sous-traiter une partie du marché public. En outre, les paiements aux petites et moyennes entreprises ne devraient pas transiter par l'entreprise principale mais par le maître d'ouvrage (paiement direct obligatoire). Il conviendrait également de respecter une proportion de 50 % maximum de sous-traitance. Enfin, en cas de défaillance d'une entreprise en cours de chantier, il serait opportun de pouvoir faire appel directement à d'autres entreprises ayant déjà répondu sans refaire un appel d'offre complet du lot concerné.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Yves Dauge a présenté une question, n° 169, ainsi rédigée:
«M. Yves Dauge attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conditions dans lesquelles sont passés les marchés publics lorsqu'ils sont soumissionnés par les grandes entreprises qui font appel à des entreprises plus petites pour sous-traiter et ce parfois dans des conditions défavorables aux artisans et aux PME. Il lui demande s'il ne serait pas possible de réglementer de façon plus stricte les modalités de recours à la sous-traitance en établissant notamment une liste des lots et des entreprises susceptibles de sous-traiter une partie d'un marché public. En outre, les paiements aux petites et moyennes entreprises ne devraient pas transiter par l'entreprise principale mais par le maître d'ouvrage (paiement direct obligatoire). Il conviendrait également de respecter une proportion de 50 % maximum de sous-traitance. Enfin, en cas de défaillance d'une entreprise en cours de chantier, il serait opportun de pouvoir faire appel directement à d'autres entreprises ayant déjà répondu sans refaire un appel d'offres complet du lot concerné.»
La parole est à M. Yves Dauge, pour exposer sa question.
M. Yves Dauge. Les chambres de métiers, entre autres, se posent des questions sur les modalités de sous-traitance de marchés publics par de grandes entreprises, qui sont souvent défavorables aux petites et moyennes entreprises, aux artisans et aux commerçants.
Plusieurs propositions ont déjà été faites pour assurer plus de rigueur, plus de transparence, plus de sécurité à ces modalités. On a proposé, par exemple, l'établissement d'une liste des entreprises qui pourraient sous-traiter, d'une liste des lots pouvant être sous-traités, de la proportion du marché - par exemple 50 % - qui pourrait faire l'objet de la sous-traitance, afin d'éviter un recours trop important à cette pratique.
Car certaines grandes entreprises obtiennent les marchés, prennent au passage ce qui leur convient, puis se retournent vers les petites et moyennes entreprises pour exécuter la partie la plus difficile, dans des conditions financières moins intéressantes. Je ne veux pas faire de procès systématique aux grandes entreprises, mais chacun connaît le problème.
Les petites et moyennes entreprises ont aussi suggéré que les maîtres d'ouvrage les paient directement et que leurs paiements ne transitent plus par l'entreprise qui a sous-traité puisque ce sont ces entreprises qui ont fait le travail. Cette modification serait de nature à clarifier le rôle des uns et des autres.
Enfin, lorsqu'une entreprise est défaillante, tout s'arrête et le chantier s'interrompt parfois pour plusieurs mois. Il faut relancer un appel d'offres pour le lot correspondant et tout le monde perd beaucoup d'argent. Les professionnels proposent donc, dans ce cas, de confier l'exécution du travail à l'entreprise dont l'offre se situait immédiatement derrière celle de l'entreprise qui a emporté le marché, sauf si l'écart est trop important. On pourrait ainsi gagner beaucoup de temps et faire en sorte que le chantier reparte immédiatement.
Je souhaite connaître l'avis du Gouvernement sur toutes ces propositions.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
M. Jacques Dondoux, secrétaire d'Etat au commerce extérieur. Monsieur le député, je vous fais part, à nouveau, des regrets de Dominique Strauss-Kahn de ne pouvoir être présent ce matin et vous prie de m'excuser si mes commentaires vous paraissent un peu légers.
Le Gouvernement est particulièrement attentif aux problèmes qui se posent aux PME pour accéder à la commande publique. Celle-ci représente 700 milliards de francs, soit 10 % du produit intérieur brut, ce qui constitue à l'évidence un débouché essentiel pour les petites entreprises, qui ont un potentiel élevé en termes de créations d'emplois. C'est pourquoi la réforme du code des marchés publics s'attachera tout particulièrement aux aspects concernant ces entreprises.
A cet égard, pour le cas de la sous-traitance, sur lequel vous appelez notre attention, il convient de concilier les garanties accordées aux entreprises sous-traitantes et la préoccupation de leur assurer un accès direct aux marchés publics. En effet, l'accès direct confère à l'entreprise un avantage incontestable en termes financiers, tout en améliorant la qualité de la prestation fournie au maître d'ouvrage et la transparence de l'exécution du marché. En outre, le régime de la sous-traitance doit tenir compte de la diversité des modes d'exercice, qui varient fortement d'un secteur à l'autre.
C'est dans ce cadre, monsieur le député, que doivent être examinées vos suggestions. Elles doivent en effet contribuer aux réflexions et aux discussions qui permettront d'améliorer les conditions de l'achat public, conformément au programme de travail que s'est fixé le Gouvernement. Le spectre des solutions examinées, qui sont discutées avec les intéressés, doit cependant être plus large dans la mesure où les suggestions que vous faites risquent de se révéler délicates à mettre en oeuvre ou pénalisantes pour les PME.
Ainsi, demander aux maîtres d'ouvrage de prévoir des lots susceptibles d'être sous-traités ou des listes d'entreprises qui pourraient elles-mêmes sous-traiter un marché public, nécessite un système de préqualification des entreprises amenées à répondre à une mise en consultation. Ce système pourrait se révéler trop lourd pour les entreprises et très pénalisant pour les plus récentes d'entre elles, qui n'ont pas de références antérieures.
De même, instituer un paiement direct obligatoire pourrait se heurter à un obstacle en termes de faisabilité, puisque cela suppose que l'acheteur public puisse identifier toute la chaîne des sous-traitants pour procéder par paiements successifs, jusqu'au règlement du titulaire du marché, qui n'interviendrait qu'en dernier lieu.
Enfin, limiter la sous-traitance à un pourcentage de 50 % repose sur la possibilité de déterminer un seuil pertinent, en dépit de la diversité des situations d'un secteur à l'autre.
Sur chacun de ces points, il conviendra d'examiner les avantages attendus de la mesure au regard de ses inconvénients, voire des impossibilités qui pourraient exister, et de rechercher si d'autres voies ne sont pas préférables en ce qu'elles permettent de faciliter l'accès des PME à la commande publique.
Vous proposez en dernier lieu qu'en cas de défaillance d'une entreprise en cours de chantier, il soit possible d'avoir recours à l'une de celles qui avaient répondu à la consultation, sans organiser de nouvel appel d'offres pour le lot concerné. Votre préoccupation est tout à fait fondée. Le droit des marchés publics permet d'y répondre en permettant de recourir à un marché négocié en cas d'urgence, lorsque l'administration doit remplacer un entrepreneur ou un fournisseur défaillant; ce marché est dispensé de publicité, mais doit comporter une remise en concurrence. Bien entendu, l'acheteur public est libre d'interroger les entreprises qui lui paraissent les plus aptes à exécuter le marché, mais rien ne s'oppose à ce qu'il s'adresse à des entreprises qui avaient répondu à l'appel d'offres initial, sous réserve que leur offre ait été conforme au règlement de la consultation.
J'ajoute, à titre personnel, que, dans son rapport, M. Lorentz a proposé qu'une plus grande publicité soit faite aux marchés passés par les collectivités publiques. Tant que je serai maire - j'appliquerai cette règle aux marchés passés par ma petite commune, car c'est très important. Cependant, sur le plan pratique, faire des lots très séparés suppose une technicité que les petites communes n'ont pas toujours. Je suppose que, sur votre suggestion, monsieur le député, Bercy s'efforcera de recommander aux grandes communes de faire des lots de telle sorte que les PME aient accès aux différents lots, sans être obligées de soumissionner pour l'ensemble.
Votre suggestion, du point de vue d'un petit maire, est bonne.
M. le président. La parole est à M. Yves Dauge.
M. Yves Dauge. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat.
Dans la mesure où ces questions assez techniques doivent faire l'objet d'études dans les prochaines semaines, je souhaite que les organismes professionnels, au premier rang desquels les chambres des métiers, soient associés à la réflexion. Ils ont fait des suggestions. Le moins que l'on puisse faire est d'analyser les avantages et les inconvénients de chacune.
J'espère qu'on arrivera à un accord pour modifier le code des marchés publics sur ce point.
SOC 11 REP_PUB Centre O