réforme du régime de l'assurance
accidents du travail des exploitants agricoles
M. le président. M.
Charles de Courson a présenté une question, n° 1730, ainsi rédigée :
« M. Charles de Courson
interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la loi du
30 novembre 2001 portant amélioration de la couverture des non-salariés
agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, qui
a totalement réorganisé le système d'assurance accidents du travail des
exploitants agricoles. Lors du vote de la loi il avait pris l'engagement de
préciser les modalités de la procédure d'affiliation par voie réglementaire.
N'ayant pu, compte tenu des délais, agir par la voie d'un décret ou d'un arrêté,
il a pris le 13 décembre 2001, une circulaire, adressée aux préfets et aux
services déconcentrés du ministère, ainsi qu'à la MSA et au groupement
d'assureurs. Mais certaines caisses de MSA semblent avoir méconnu cette
circulaire. Certaines d'entre elles ont en effet adressé aux agriculteurs de
leur ressort territorial des courriers les incitant à s'affilier directement et
immédiatement auprès d'elles-mêmes. De même, certaines caisses ont distribué aux
agriculteurs des bulletins d'adhésion immédiatement après des réunions
d'information. Les méthodes utilisées par certaines caisses MSA paraissent ainsi
en totale contradiction avec les objectifs fixés par sa circulaire. De plus, les
procédures qu'elles emploient peuvent s'avérer déroutantes, voire trompeuses,
pour des agriculteurs qui n'ont pas nécessairement connaissance de la
possibilité de choix qui leur est offerte. Aussi il aimerait connaître ses
intentions afin d'éviter que sa circulaire ne continue à être bafouée par
certaines caisses de mutualité sociale agricole dont il a la responsabilité de
la tutelle. »
La parole est à
M. Charles de Courson, pour exposer sa question.
M. Charles
de Courson. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche,
la loi du 30 novembre 2001 portant amélioration de la couverture des
non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies
professionnelles a totalement réorganisé le système d'assurance accidents du
travail des exploitants agricoles.
Lors de l'examen de ce texte,
j'avais proposé de sous-amender un amendement du Gouvernement sur le régime
transitoire, et suggére d'introduire une disposition organisant une procédure
d'affiliation en deux temps. Aux termes de ce sous-amendement, les bulletins
d'adhésion devaient être envoyés entre le 1er janvier et le
15 février 2002 par les assureurs et par la MSA à leurs assurés
respectifs actuels, les assujettis devant retourner leur bulletin d'adhésion à
l'organisme qu'ils auraient alors choisi. Dans un second temps, les caisses de
MSA n'auraient adressé de bulletins d'adhésion qu'aux seules personnes non
affiliées. En égard à l'engagement que vous aviez pris, monsieur le ministre, de
préciser les modalités de la procédure d'affiliation par voie réglementaire,
j'avais retiré ce sous-amendement.
Cependant, compte tenu des délais,
vous n'avez pu agir par la voie d'un décret ou d'un arrêté. Aussi avez-vous
signé, le 13 décembre 2001, une circulaire, adressée aux préfets et
aux services déconcentrés du ministère, ainsi qu'à la MSA et au groupement
d'assureurs. Or certaines caisses de MSA semblent avoir méconnu cette
circulaire. Je tiens à votre disposition les preuves de cette affirmation.
Une part d'entre elles ont en effet
adressé aux agriculteurs de leur ressort territorial des courriers les incitant
à s'affilier directement et immédiatement auprès d'elles-mêmes. D'autres ont
distribué aux agriculteurs des bulletins d'adhésion immédiatement après des
réunions d'information. Les méthodes utilisées par certaines caisses MSA
paraissent ainsi en totale contradiction avec les objectifs fixés par votre
circulaire. De plus, les procédures qu'elles emploient peuvent s'avérer
déroutantes, voire trompeuses, pour des agriculteurs qui n'ont pas
nécessairement connaissance de la possibilité de choix qui leur est offerte.
Monsieur le ministre, que
comptez-vous faire pour éviter que votre circulaire ne continue à être bafouée
par certaines caisses de mutualité sociale agricole dont vous avez la
responsabilité et la tutelle ?
M. le président. La
parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.
Nous poursuivons là, monsieur de Courson, un débat que nous avons déjà eu
longuement à propos de la réforme de l'AAEXA. D'ailleurs, je me félicite que
vous vous fassiez aujourd'hui le défenseur vigilant de l'application d'une loi
que vous avez combattue dans cet hémicycle.
M. Charles
de Courson. Il ne s'agit que de l'application de la circulaire
!
M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche. Cela prouve que vous êtes, vous aussi,
légitimiste, comme j'ai pu l'être tout à l'heure à propos du contrat vendanges.
Je respecte scrupuleusement la volonté du législateur, tout comme vous voulez
appliquer scrupuleusement une réforme que vous avez vigoureusement combattue.
La loi du 30 novembre 2001,
que la majorité et le Gouvernement ont soutenue contre l'avis de votre groupe,
et qui améliore considérablement la couverture des non-salariés agricoles contre
les accidents du travail et les maladies professionnelles, a maintenu la
pluralité de gestionnaires de ce risque de sécurité sociale entre la Mutualité
sociale agricole, d'une part, et les entreprises d'assurance et les mutuelles,
d'autre part. Dans ce dispositif, qui constitue désormais une véritable branche
de la sécurité sociale, la MSA se voit confier un rôle essentiel de caisse
pivot, garante de l'unité du régime et du contrôle du respect de l'obligation
d'assurance faite aux non-salariés agricoles.
Il est exact que, afin de concilier
la préoccupation des entreprises d'assurance de proposer la nouvelle couverture
en priorité à leurs adhérents actuels et la généralisation rapide du nouveau
dispositif, je m'étais engagé à prendre les mesures nécessaires de façon à
privilégier un envoi des bulletins d'adhésion, du début janvier à la mi-février,
par les sociétés d'assurance et, après la mi-février, par les caisses de MSA. A
l'évidence, ces dispositions n'étaient pas de niveau législatif. C'est la raison
pour laquelle je vous avais demandé, monsieur de Courson, de retirer un
amendement lors des débats parlementaires, ce dont vous aviez bien voulu
convenir.
Ces mesures ont donc
été précisées dans une circulaire du 13 décembre 2001 ; elles ont
recueilli le consensus de la caisse centrale de MSA, des assureurs et du
Gouvernement. Ce dernier a donc scrupuleusement mis en oeuvre ses engagements et
veillé à l'application d'un des principes essentiels de cette réforme que
constitue le libre choix de l'organisme assureur par les non-salariés
agricoles.
Dans votre question,
vous faites état de défaillances que vous auriez repérées sur le terrain de la
part de caisses de MSA. Hélas, on peut en dire au moins autant des assureurs
puisque les exemples de pressions sur leurs adhérents pour obtenir une
reconduction pure et simple, quasiment tacite, de leurs adhésions auprès de leur
ancien assureur se sont multipliées.
Dans plusieurs départements,
notamment dans le Gers, le Pas-de-Calais, le Maine-et-Loire, le Rhône, le Var et
d'autres, les bulletins d'adhésion ont été envoyés par les assureurs sans qu'y
soit jointe, contrairement aux engagements pris, la liste des organismes entre
lesquels les non-salariés agricoles pouvaient choisir.
Une grande compagnie d'assurances,
dont vous aviez défendu d'ailleurs l'efficacité, et que je ne saurais nommer
pour ne pas en faire la publicité - ce n'est pas mon rôle - dans ses
groupements du Sud, de l'Est, du Centre-Atlantique et dans bien d'autres encore,
a ainsi adressé le bulletin d'adhésion à ses adhérents actuels accompagnés d'une
enveloppe à retourner au groupement des assureurs autres que les caisses de
MSA.
Dans de nombreux
départements, des formules comminatoires enjoignant un retour du bulletin
d'adhésion à l'entreprise d'assureur expéditrice, avant une date butoir, ont été
utilisées.
Enfin une information
tendancieuse, voire erronée, a été parfois dispensée par les assureurs
contredisant l'information objective dont le support avait été arrêté de concert
entre le ministère, la MSA et les assureurs eux-mêmes.
Alors, monsieur de Courson, je suis
au courant des faits dont vous avez fait état. Je pense, d'une manière plus
équilibrée, que les torts sont largement partagés. C'est pourquoi j'invite
fermement, et j'espère que vous le ferez comme moi, les assureurs et la
Mutualité sociale agricole, et pas seulement tel ou tel intervenant, à respecter
scrupuleusement les termes de la circulaire du 13 décembre 2001.
M. le président. La
parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles
de Courson. Monsieur le ministre, je tiens d'abord à préciser que
la position de l'opposition nationale n'était pas conforme à ce que vous venez
d'indiquer. Nous étions en effet favorables à la réévaluation des prestations et
au contrôle effectif de l'affiliation obligatoire car il y avait là une
défaillance totale imputable, du reste, au ministère.
M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche. Non !
M. Charles
de Courson. Mais si, et je l'ai montré dans mon rapport. Nous
souhaitions qu'un véritable effort de prévention soit consenti. C'est sur le
maintien du pluralisme qu'a porté le débat.
Venons-en au fond de la question
que j'ai posée. Comme le dit le vieil adage du droit romain, nemo auditur propriam turpitudinem allegans, les
turpitudes des uns n'excusent pas celles des autres. Le problème porte sur le
respect des dispositions de cette circulaire qui avaient fait l'objet d'un
accord unanime. Je le rappelle, ce point avait été soulevé dans le recours
devant le Conseil constitutionnel et, dans sa réponse, le Gouvernement avait
indiqué que les modalités permettant de maintenir une concurrence normale
avaient été précisées lors des débats. Il avait même ajouté qu'en tout état de
cause s'il arrivait que la loi donne lieu à des abus, en particulier qu'une
caisse de MSA agisse en méconnaissance des dispositions de l'ordonnance
de 1986, il appartiendrait au Conseil de la concurrence, et le cas échéant
aux jurdictions compétentes, de prononcer des sanctions prévues par ce même
titre.
Monsieur le ministre,
allez-vous sévir à l'égard des uns comme des autres ? Allez-vous saisir le
Conseil de la concurrence au motif que la circulaire, rédigée d'ailleurs et
comme vous l'avez rappelé, conjointement avec la CCMSA et le groupement des
assureurs, a été violée ? Certes, des dérives ont été constatées de part et
d'autre et on peut le regretter. Mais vous êtes le représentant de l'Etat de
droit et c'est aux termes d'un engagement pris devant le Conseil constitutionnel
que cette disposition n'a pas été annulée. Alors, monsieur le ministre,
allez-vous saisir le Conseil de la concurrence ?
M. le président. La
parole est à M. le ministre.
M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche. Ce n'est pas la question que vous m'avez
posée initialement.
M. Charles
de Courson. Si.
M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche. Non. Dans votre première intervention,
vous vous êtes borné, faisant preuve d'ailleurs en cela d'un certain
aveuglement, à souligner les défaillances de la MSA sans voir que celles des
assureurs étaient au moins aussi importantes. Je ne méconnais pas, quant à moi,
ces infractions à la circulaire. Et je n'exclus pas effectivement de saisir le
Conseil de la concurrence.