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M. Valéry Giscard d'Estaing. Mes chers collègues, je vous demande d'abord de m'excuser si ma voix manque un peu de volume, mais je l'ai un peu perdue dans les forêts d'Auvergne (Sourires) où je suis allé, avec d'autres d'ailleurs, constater l'étendue des dégâts. Malheureusement la perte de ma voix ne suffira pas à faire repousser les arbres. (Sourires.) La question je pose, au nom du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance, s'adresse à M. le Premier ministre et porte sur la date de convocation du Congrès du Parlement, le 24 janvier prochain. Vous avez engagé, monsieur le Premier ministre, avec l'accord du Président de la République, une procédure de révision de la Constitution. Or chacun sait ici qu'il s'agit d'un acte grave, parce que le premier caractère de la Constitution doit être sa stabilité. Je regrette donc la banalisation de la réforme de la Constitution (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République) car c'est la troisième que l'on nous présente en douze mois ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Mme Odette Grzegrzulka. Nous travaillons, nous ! M. Arnaud Montebourg. Vive l'Europe ! M. le président. S'il vous plaît, monsieur Montebourg, taisez-vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) M. Valéry Giscard d'Estaing. Cette fois-ci la révision concerne un aspect de la réforme de la justice, un aspect seulement puisque cette réforme fait l'objet de sept textes, dont six législatifs, deux seulement ayant été adoptés à ce jour. Adressant vos voeux à la presse, monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré: «Le 24 janvier, à Versailles, les Français verront, parmi leurs représentants, ceux qui veulent l'indépendance de la justice et ceux qui, en réalité, ne l'acceptent pas.» (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.) M. Edouard Landrain. Attendez la suite ! M. Valéry Giscard d'Estaing. Le moins que l'on puisse dire est que, s'agissant d'une réforme constitutionnelle, il s'agit d'une présentation simplificatrice. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Cet argument n'est pas acceptable pour un groupe humaniste et libéral comme le nôtre. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Au surplus, mes chers collègues, il n'a aucune vraisemblance, car la rédaction de l'article 65 de la Constitution, que vous nous demandez de modifier, provient d'une initiative de votre famille politique. Mme Véronique Neiertz. Et alors ? M. Valéry Giscard d'Estaing. C'est en effet en 1992 que le président Mitterrand a demandé à un comité consultatif, présidé par le doyen Vedel, de présenter des propositions de modification de l'article 65 qui allaient aboutir au texte actuellement en vigueur. Le projet a été déposé par le gouvernement Bérégovoy en 1993 puis, en raison du changement de majorité, il a été repris par celui d'Edouard Balladur. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il a été voté par l'ensemble des députés, notamment des députés socialistes. M. Didier Boulaud. Nous n'étions pas nombreux ! M. Valéry Giscard d'Estaing. Il porte les signatures de François Mitterrand et d'Edouard Balladur. («Ah !» sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! M. Valéry Giscard d'Estaing. A cet égard, je veux formuler une remarque à propos de l'argument, souvent répété, selon lequel le vote législatif devrait automatiquement entraîner le vote constitutionnel: or ils sont de nature différente. Sinon, la même procédure s'appliquerait. Souvenez-vous d'ailleurs que, lors de la réforme de 1993, le groupe socialiste à l'Assemblée nationale s'est abstenu, avant de voter pour au Congrès. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) M. Jean-Claude Lefort. Et la question ? M. Valéry Giscard d'Estaing. Monsieur le Premier ministre, la difficulté dans laquelle vous vous êtes placé (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) tient au fait que vous voulez nous faire avaler la coquille avant que le Parlement ne se soit prononcé sur le contenu. Un député du groupe socialiste. Et qui a convoqué le Parlement ? M. Valéry Giscard d'Estaing. Je vais vous répondre tout à l'heure ! M. Jean-Claude Lefort et Mme Odette Grzegrzulka. La question ! M. Valéry Giscard d'Estaing. Il reste, en effet, deux lois importantes à adopter: celle qui détermine les relations entre le ministère de la justice et les procureurs - cette loi n'a été examinée qu'en première lecture - et celle qui fixe le nouveau statut des magistrats, en s'engageant dans la voie, que je juge dangereuse, de la mise en cause de leur responsabilité individuelle. Plusieurs députés du groupe socialiste. La question ! M. Valéry Giscard d'Estaing. En toute logique, et en simple bon sens, la réforme constitutionnelle devrait, si elle est nécessaire, couronner l'édifice, et non précéder les débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Veuillez m'excuser, je voudrais, en réalité, poser deux questions au nom du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. La situation dans laquelle on a enfermé le Parlement n'est bonne pour personne. Car si le Gouvernement persiste, il court à un échec, le premier dans une procédure de ce genre. Et quel que soit l'art des sophistes, un échec est toujours un échec ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Et l'opposition ne peut pas donner son accord à un texte constitutionnel sans être assurée du contenu qu'il abritera. Il reste alors une solution possible, celle de rétablir l'ordre naturel des débats: l'adoption des lois sur la justice doit précéder la réforme de la Constitution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Un député du groupe socialiste. Parlez-en à M. Chirac ! M. Valéry Giscard d'Estaing. Pour cela, il faut renvoyer à une date ultérieure le congrès de Versailles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Vous nous direz - vous nous l'avez déjà dit - que c'est une prérogative du Président de la République. Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui ! M. Valéry Giscard d'Estaing. Mais puisque, dans nos institutions, le Parlement a pour seul interlocuteur le Premier ministre, c'est à vous, monsieur le Premier ministre, que notre question s'adresse. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) M. le président. Un peu de silence, M. Giscard d'Estaing va achever de poser sa question. M. Valéry Giscard d'Estaing. Si vous me permettez de la formuler ! Monsieur le Premier ministre, pensez-vous pouvoir transmettre au Président de la République (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) le souhait de notre groupe, et sans doute celui de beaucoup d'autres, de voir la date du Congrès sur la révision constitutionnelle reportée après l'adoption des projets de loi sur la réforme de la justice, pour en tirer sereinement les conclusions. M. le président. Voulez-vous conclure, je vous prie - parce que votre temps de parole est écoulé. M. Valéry Giscard d'Estaing. Monsieur le président, j'aurai conclu d'autant plus rapidement qu'il y aura moins d'interruptions ! Monsieur le Premier ministre, en conclusion - puisque vous m'y appelez, monsieur le président - il s'agit d'une réforme de la Constitution. Mais qu'est-ce que la Constitution ? C'est la charte de tous les citoyens. Une réforme de la Constitution se gagne par la persuasion, elle ne s'arrache pas par la contrainte. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants se lèvent et applaudissent. - Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) M. Didier Boulaud. Giscard à la barre ! M. Jean-Claude Lefort. Giscard, Président ! (Rires sur les bancs du groupe communiste.) M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. (Protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. Henri Plagnol. Dégonflé ! Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le Président, vous vous êtes d'abord interrogé sur les réformes constitutionnelles. («Ouh ! sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Mme la garde des sceaux. Je voudrais rappeler sur quoi ont porté les réformes constitutionnelles qui ont été conduites par ce Gouvernement devant le Congrès à Versailles: la révision du traité d'Amsterdam négociée par l'ancienne majorité, la modification du statut de la Nouvelle-Calédonie... M. Maurice Leroy. La réponse n'est vraiment pas au niveau ! Mme la garde des sceaux. ... - il s'agissait de confirmer les accords qui ont enfin restauré la paix civile en Nouvelle-Calédonie -... M. Maurice Leroy. Hors sujet ! Mme la garde des sceaux. ... l'institution de la Cour pénale internationale, car il nous faut une justice internationale, et la parité pour les femmes et les hommes dans la vie publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Fallait-il, monsieur le Président, renoncer à ces réformes extrêmement importantes qui portent aussi bien sur notre position internationale que sur de grandes réformes de société ? Ensuite, vous vous êtes interrogé sur la signification du vote qu'aura à émettre le Congrès, le 24 janvier prochain. Eh bien, oui, il s'agira, le 24 janvier, de confirmer le vote émis, d'ailleurs de façon massive, il y a un an... (Protestations sur les bancs des groupes Union pour la démocratie française, Rassemblement pour la République, et Démocratie libérale) ... par cette assemblée, mais aussi par le Sénat, réunis en Congrès, lequel, je le rappelle, a voté massivement la loi constitutionnelle: 697 voix pour, 62 contre. Vous-même, monsieur le Président, avez voté pour, le 3 juin 1998. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Il s'agit donc, et ce n'est pas une présentation simplificatrice, d'accroître l'indépendance de la magistrature puisque les procureurs auront la garantie que leur nomination ne pourra plus jamais être soumise à des manipulations politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. Maurice Leroy. Vous voulez le non, vous allez l'avoir ! Mme la garde des sceaux. Cette réforme, vous avez raison, vient de loin puisqu'elle fait suite à la réforme constitutionnelle du Conseil supérieur de la magistrature décidée par cette assemblée, réunie également avec le Sénat en Congrès en juillet 1993, réforme qui avait été, en effet, initiée par M. Mitterrand, conduite par le gouvernement de M. Balladur avec M. Méhaignerie, garde des sceaux, qui a été votée par la gauche, alors dans l'opposition, et qui en constitue l'étape immédiatement précédente puisqu'elle visait à donner des garanties de nomination aux magistrats du siège. («C'est faux !» sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Et ce dont il sera question, le 24 janvier prochain, c'est de prolonger la réforme de 1993 en donnant aux magistrats du parquet les mêmes garanties que cette réforme avait conférées aux magistrats du siège. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Celle que le Congrès sera appelé à voter le 24 janvier a été engagée par M. Chirac et conduite par le gouvernement de M. Jospin. M. Jean-Luc Préel. Qui ne sait pas nous répondre ! Mme la garde des sceaux. J'ai eu l'honneur de la présenter au Parlement. Et j'espère que, comme la gauche l'a fait il y a sept ans, la droite saura, dépassant les réflexes politiciens («Ouh !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) trouver la voie de l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Quant au report du Congrès, vous savez très bien, monsieur le Président, que la décision de le convoquer et d'en fixer la date appartient au Président de la République, dont ce gouvernement respecte les prérogatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) |