Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Analyse : |
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DEBAT : |
M. Joseph Tyrode. Monsieur le ministre des affaires étrangères, ma question concerne les exactions russes en Tchétchénie. M. Pierre Lellouche. Ah ! M. Joseph Tyrode. Aucun mot ne peut résumer ce que vivent actuellement les Tchétchènes. Les témoignages sont intolérables: villages rasés, exécutions massives, arrestations de civils - hommes, femmes, enfants - sans discernement, mise en place des camps de filtration où les tortures, viols, pressions psychologiques sont le quotidien des prisonniers. Ces images ne font qu'amplifier notre incompréhension face à la faiblesse des réactions de la communauté internationale. Ce n'est pas une simple guerre de combattants, c'est le massacre systématique d'une population que les Russes s'efforcent de soumettre depuis près d'un siècle. Dans cinquante ans, les députés qui siégeront à notre place devront-ils voter une loi pour reconnaître le génocide tchétchène comme nous l'avons fait pour le génocide arménien ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.) La communauté européenne s'est mobilisée à juste titre contre l'extrême droite autrichienne. L'attitude de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité lors de la réunion des ministres des affaires sociales européens a été à cet égard exemplaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Mais si nous devons être attentifs à toutes les poussées extrémistes, notre vigilance doit s'exercer au-delà des frontières européennes, contre toutes les violations des droits de l'homme. Notre pays a su agir à l'occasion de faits tout aussi dramatiques au Timor-Oriental et au Kosovo. Ne doit-il pas, avec ses partenaires européens, condamner plus fermement les agissements russes et proposer la suspension des aides économiques que perçoit la Russie ? Mme Muguette Jacquaint. Très juste ! M. Joseph Tyrode. En outre, le Gouvernement militera-t-il pour la mise en place d'une commission d'enquête internationale sur les crimes commis en Tchétchénie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères. M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, vous vous étonnez de l'insuffisance des réactions internationales. Je dois dire que je partage votre étonnement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste - «Ah !» sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Chaque fois que les autorités françaises se sont exprimées, chaque fois que le Gouvernement s'est exprimé, soit pour qualifier les massacres, soit pour exiger la solution politique, soit pour réclamer l'accès immédiat des organisations humanitaires, soit pour demander l'arrêt des exactions pendant et après la reprise de contrôle de Grozny, vous avez pu noter, vous l'avez dit vous-même, que la voix de la France s'était élevée dans un relatif isolement. Je dois apporter à votre assemblée des éléments d'analyse sur la position de nos partenaires occidentaux. Une partie d'entre eux reprend à son compte l'argumentation selon laquelle il est nécessaire d'empêcher l'afghanisation de l'ensemble de la région, considérant qu'au-delà de la lutte du peuple tchéchène, se pose le problème du terrorisme international lié à l'Afghanistan. Une autre partie considère qu'employer des moyens tels que les sanctions économiques n'aboutirait qu'à empêcher la Russie de rembourser les dettes qu'elle nous doit ou à aggraver la situation de la population (Exclamations sur divers bancs du groupe Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je ne fais que répéter ce qu'une grande partie de nos partenaires nous répondent lorsque nous avons ce type de discussion avec eux ! Ils estiment que cela n'aurait d'autre effet qu'accroître les difficultés de ce pays, sorti des ruines de l'Union soviétique, à devenir un grand pays moderne, démocratique et pacifique. Cela n'a pas empêché la France de dire ce qu'elle a dit. Cela ne l'a pas empêché d'être en pointe. Nous pensons avoir le devoir à la fois de mener une vraie politique franco-russe, euro-russe, de long terme - c'est notre intérêt - et d'exiger des Russes l'arrêt de ces comportements en Tchétchénie. Nous sommes, je crois, le seul pays qui arrive à faire les deux de cette façon. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) |