FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 18842  de  M.   Reitzer Jean-Luc ( Rassemblement pour la République - Haut-Rhin ) QE
Ministère interrogé :  aménagement du territoire et environnement
Ministère attributaire :  aménagement du territoire et environnement
Question publiée au JO le :  07/09/1998  page :  4860
Réponse publiée au JO le :  17/04/2000  page :  2434
Rubrique :  eau
Tête d'analyse :  politique de l'eau
Analyse :  redevance. conséquences. industries extractives
Texte de la QUESTION : M. Jean-Luc Reitzer attire l'attention de Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur le projet d'instauration d'une nouvelle redevance au titre de la « modification du régime des eaux », à laquelle seraient notamment assujetties les entreprises procédant à l'extraction de matériaux dans le lit majeur des cours d'eau et dans les nappes alluviales. Perçue au profit des agences financières de bassin, cette redevance aurait pour objet de financer la lutte contre les risques naturels d'inondation. Les producteurs de matériaux s'interrogent sur le bien-fondé et les conséquences économiques de cette nouvelle redevance, qui leur paraît injustifiée. En effet, il n'est pas démontré, loin de là, que les extractions de matériaux alluvionnaires ont un quelconque effet sur les risques d'inondation. D'autre part, l'évolution importante de la réglementation qui détermine les conditions particulièrement exigentes auxquelles sont soumises les autorisations d'ouverture de carrières, la mise en place des SDAGE et des schémas départementaux des carrières, les progrès techniques constatés dans les exploitations sont propres à garantir l'absence d'impact sur les inondations. Par ailleurs, il est clair qu'une telle redevance renchérirait le coût des matériaux, et donc des ouvrages, avec des répercussions sur les budgets des maîtres d'ouvrage, et notamment des collectivités territoriales. Il lui demande en conséquence si elle n'envisage pas de réexaminer le fond de ce problème et éviter ainsi que des décisions soient prises sans une analyse préalable sérieuse du bien-fondé de la mesure envisagée et de ses conséquences sur le plan économique.
Texte de la REPONSE : La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative à l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux granulats, notamment de ses conséquences sur les professionnels des carrières. La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) n'est pas un impôt supplémentaire. C'est un instrument de modernisation, de simplification et de plus grande efficacité de la fiscalité écologique, à prélèvement globaux constants. A cet effet, la TGAP a une vocation universelle vis-à-vis de l'ensemble des activités polluantes ; elle est le cadre d'accueil de la future écotaxe, actuellement en discussion sur le plan communautaire. En effet, jusqu'à présent, la fiscalité de l'environnement reposait sur un très grand nombre de taxes affectées, au rendement inégal et dont la fonction était de procurer les ressources nécessaires à la réparation des dommages occasionnés à l'environnement par les activités polluantes. Cette fonction permettait donc de réparer les dommages, dans les limites des ressources collectées ; elle n'incitait, en revanche, qu'insuffisamment à la limitation des activités polluantes et à l'adoption de comportements vertueux et plus respectueux de la préservation d'un environnement de qualité. A cet égard, la fiscalité de l'environnement traditionnelle, faute d'adresser un signal-prix au niveau nécessaire, ne permettait pas d'appliquer dans sa plénitude le principe pollueur-payeur, Il s'agit aujourd'hui de mieux pouvoir prévenir afin, demain, de moins réparer. La TGAP, en déconnectant le rendement de l'instrument fiscal du montant des ressources nécessaires à la réparation des dommages - qu'il faut, sans aucun doute, poursuivre -, permettra d'adresser un signal-prix approprié. A titre d'exemple, l'augmentation de 50 % de la taxe sur la mise en décharge, votée en 1998 par le Parlement dans le cadre de la TGAP, a été combinée avec la réduction de 20,6 % à 5,5 % du taux de TVA appliquée aux activités de collecte sélective, de tri et de valorisation matière. A travers ces deux mesures, le Gouvernement, conformément à la communication de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement du 28 août 1998 au conseil des ministres, a clairement indiqué aux acteurs concernés qu'il souhaitait privilégier, dans les différents modes de traitement des déchets ménagers, la collecte séparative sur la mise en décharge et sur le recours à l'incinération, pour lequel le taux applicable de TVA demeure inchangé. Les pollutions de l'eau avaient vocation à être parties prenantes de la TGAP. Mais le système français de gestion de l'eau, fondé sur une gestion par bassin versant et sur le principe de « l'eau paye l'eau », est un système qui, malgré quelques imperfections auxquelles il convient de remédier, a fait preuve d'efficacité depuis plus de trente ans : ce système fait d'ailleurs largement école tant sur le plan communautaire qu'au-delà. La ministre a donc souhaité préserver, valoriser et améliorer le système français de l'eau, ainsi qu'elle l'avait indiqué lors de la communication effectuée sur ce sujet, en conseil des ministres, le 20 mai 1998. Les conditions dans lequelles l'eau serait partie prenante de la TGAP, n'ont donc été décidées qu'après la concertation la plus large et la plus approfondie possible et ont été validées par la conférence des présidents de comité de bassin. Cette concertation a, en effet, permis de dégager des principes d'application de la fiscalité environnementale au secteur de l'eau qui permette une meilleure application du principe « pollueur-payeur » garantissant ce qui fait la force du système français de l'eau. Ainsi, le système des redevances sera intégralement préservé pour financer les actions d'intérêt commun dans chaque bassin, telles qu'elles sont définies dans la loi sur l'eau de 1964. Leur système sera rendu constitutionnel par le vote d'une loi de programmation quinquennale qui fixera les assiettes des redevances et en encadrera le taux. Ces redevances seront réformées en profondeur pour les rendre davantage conformes au principe « pollueur-payeur ». Les concertations en cours concernent notamment la redevance sur la pollution domestique qui est, pour l'heure, à la fois peu compréhensible et peu équitable, et sans lien direct avec la pollution rejetée. La TGAP elle-même ne s'appliquera pas aux redevances mais regroupera des prélèvements sur des produits polluants non concernés par le système des agences de l'eau. Ont ainsi été décidées pour 2000 la taxation des produits polluants dans les lessives, dont les phosphates, celle des produits phytosanitaires et celle des granulats. La taxe sur les granulats s'applique, comme le souhaitait d'ailleurs la profession des carriers, à l'ensemble de ces matériaux, quelle que soit leur provenance. Elle est motivée par l'importance de l'impact de ces extractions sur les milieux naturels, les paysages, la ressource en eau, et, quand elle s'exerce dans les vallées alluviales, le fonctionnement des écosystèmes alluviaux. Elle vise à inciter à l'utilisation préférentielle de matériaux de recyclage, tels que les produits de démolition. Compte tenu de son taux modique (0,60 F/t), elle représente moins de 2 % du prix de ces matériaux : il semble donc peu vraisemblabe qu'elle puisse mettre en péril l'équilibre des exploitations concernées. La loi de financement de la sécurité sociale a instauré la taxation des produits polluants mentionnés. La réforme des redevances des agences de l'eau fera l'objet, quant à elle, d'une loi de programmation sur l'eau que le Gouvernement projette de déposer sur le bureau du Parlement, au plus tard au début de l'année 2001.
RPR 11 REP_PUB Alsace O