FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 1887  de  M.   Sarre Georges ( Radical, Citoyen et Vert - Paris ) QG
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  24/02/2000  page :  1165
Réponse publiée au JO le :  24/02/2000  page :  1165
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  télécommunications
Analyse :  réseau Echelon. attitude de la France
DEBAT : M. le président. La parole est à M. Georges Sarre.
M. Georges Sarre. Ma question concerne le dispositif Echelon, c'est-à-dire le système d'espionnage mis en place à l'échelle de la planète. Depuis peu, en effet, des documents américains ont apporté la preuve de l'existence d'une surveillance de tous les instants de notre pays et de nombreux autres, à l'exception, évidemment, des Etats-Unis d'Amérique, de l'Angleterre, de la Nouvelle-Zélande, de l'Australie et du Canada.
M. Jean-Claude Lefort. C'est vrai !
M. Georges Sarre. De quoi s'agit-il ? A l'issue de la Seconde Guerre mondiale et avec le début de la guerre froide, a été mis en place un dispositif de surveillance pour contrôler l'URSS et ses alliés. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement de la République.)
M. Bernard Deflesselles. Heureusement !
M. Georges Sarre. Avec la chute du mur de Berlin et l'effondrement du système soviétique, on était en droit de s'attendre à la disparition de telles pratiques. Or le système a été complété, modernisé et développé, et il a continué à être utilisé sur l'ensemble de la planète. Ce type d'espionnage concerne tous les secteurs: la défense, évidemment, mais aussi l'industrie, la recherche et le commerce. En France, Thomson et Airbus en ont particulièrement pâti.
Je considère pour ma part que cette affaire est très grave. Comment un pays comme le nôtre qui se targue, à juste titre, de défendre les libertés individuelles et collectives, et d'avoir institué une commission comme la CNIL, a-t-il pu accepter pendant des années de telles pratiques dans le plus grand silence ? En deux ans, j'ai interrogé trois fois le Gouvernement sur ce sujet. Mais je n'ai reçu que des réponses floues et vagues.
M. Yves Fromion. Comme toujours !
M. Georges Sarre. Aujourd'hui, j'aimerais savoir ce que les autorités françaises ont fait ou comptent entreprendre. Qu'a décidé le Président de la République, M. Jacques Chirac ? («Ah !» sur les bancs du groupe socialiste.) Quelle initiative le Gouvernement va-t-il prendre dans les prochains jours ? Quelles démarches a-t-il effectuées ? Il s'agit, en effet, de pays alliés. Souvenez-vous de la rencontre de Saint-Malo: est-ce que l'Angleterre, parlant alors pour la première fois d'identité européenne de défense, y a apporté sa contribution sous cette forme particulièrement originale ? Il serait temps que l'hypocrisie cesse de gouverner la vie politique et diplomatique et que l'on en finisse avec les attitudes de bien-pensants, y compris sur nos bancs. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, comme vous venez de le rappeler, le système Echelon a été mis en place par les Etats-Unis en 1948, avec le concours de l'Angleterre, du Canada, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie. A l'origine, il a été créé pour recueillir des informations sur la situation militaire des éventuels adversaires de ces pays. Mais aujourd'hui il semble, en effet, que ce réseau soit détourné à des fins d'espionnage économique et de veille concurrentielle, ce qui appelle de notre part une particulière vigilance. («Très bien !» sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Yves Frannion La guerre ! Très bien !
Mme la garde des sceaux. Comment se prémunir contre l'espionnage économique et comment assurer la sécurité des informations qui transitent par les nouvelles technologies ?
D'abord, il convient de s'assurer de la plus grande prudence dans la transmission de ces informations. Ainsi, le contenu des communications ne doit jamais comporter d'informations vitales, surtout lorsque la liaison est relayée par un satellite de rediffusion, principalement dans les connexions internationales.
Par ailleurs, le Gouvernement a arrêté un certain nombre de mesures pour permettre à nos opérateurs de se prémunir contre l'espionnage économique. Pour assurer la protection des informations susceptibles d'être interceptées, il a pris, l'année dernière, la décision de permettre aux opérateurs privés, entreprises ou particuliers, de chiffrer leurs informations, c'est-à-dire de les coder afin justement de les protéger. Il a également dégagé les moyens nécessaires aux instituts de recherche pour permettre à notre pays de progresser en matière de cryptologie, c'est-à-dire de codage des informations confidentielles.
En outre, le ministre de l'intérieur contribue, dans son domaine de compétence, à la lutte contre les interceptions de télécommunications grâce aux structures spécialisées de la police nationale chargées de la criminalité informatique. Le Premier ministre a aussi annoncé récemment la création, au sein de la police judiciaire, d'un office central chargé de lutter contre la criminalité liée aux nouvelles technologies de l'information.
Enfin, M. Chevènement et moi-même participons aux travaux de l'Union européenne et des institutions internationales visant à harmoniser les règles de droit pour lutter contre cette nouvelle forme de criminalité et contre la délinquance liée à la haute technologie.
Telles sont, monsieur le député, les mesures qui ont été prises par le Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
RCV 11 REP_PUB Ile-de-France O