Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Pierre Abelin appelle l'attention de Mme la ministre de la jeunesse et des sports sur les méthodes actuelles de dépistage du dopage, et plus particulièrement de celui à l'érythropoïétine (EPO). En effet, une étude publiée récemment dans le très sérieux hebdomadaire médical britannique The Lancet établit que la méthode mise en place par les autorités cyclistes ne présentent pas les garanties suffisantes de fiabilité. Selon les conclusions de l'étude, certains sportifs peuvent présenter naturellement les stigmates du dopage sans avoir jamais recouru à l'EPO, et les contrôles actuels qui se bornent à calculer l'hématocrite, c'est-à-dire la proportion du volume des globules rouges par rapport au volume du sang, le seuil de normalité étant fixé à cinquante, peuvent aboutir à l'exclusion de sportifs qui présentent naturellement un taux supérieur à ce seuil. Ces conclusions résultent de l'étude d'un groupe de quarante-six athlètes de haut niveau des deux sexes et d'un groupe contrôle de 278 personnes ne pratiquant pas d'activité sportive. A l'issue de cette étude, aucune différence statistique n'a pu être trouvée entre les deux groupes, et les auteurs expliquent en outre avoir trouvé chez trois athlètes et quatre non-sportifs un taux d'hématocrite supérieur à cinquante. Ils en concluent qu'il existe naturellement dans la population des individus dont le taux de globules rouges est plus élevé que la norme de l'Union cycliste internationale, cette caractéristique physiologique correspondant selon toute vraisemblance à une aptitude particulière à l'exercice physique et sportif. En conséquence, conformément aux conclusions des auteurs de cette étude et à celles du directeur du Laboratoire national de dépistage du dopage, il lui demande dans quelle mesure la concertation actuelle entre les milieux sportifs et les pouvoirs publics pourrait aboutir sur la mise en oeuvre des méthodes toxicologiques existantes qui, à partir de prélèvements sanguins et urinaires, permettent de distinguer l'EPO naturelle de celle qui ne l'est pas, et donc de sanctionner à coup sûr, rétablissant de manière non équivoque la réalité des performances de chacun.
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Texte de la REPONSE :
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Mme la ministre de la jeunesse et des sports, alertée par les nombreux problèmes liés au manque de coordination dans le dépistage des substances dopantes, tant au plan national qu'international, a décidé d'attribuer au futur Conseil national de prévention et de lutte contre le dopage (CNPLD), dont la création est prévue dans le cadre du projet de loi sur la protection de la santé des sportifs, la mission et les moyens d'organiser et d'harmoniser la recherche, de guider et soutenir scientifiquement les fédérations sportives. La remise en cause de certaines orientations scientifiques prises par des fédérations internationales, comme le souligne une récente étude publiée dans un hebdomadaire médical britannique, est parfois recevable. Concernant l'hématocrite, paramètre de référence de l'union cycliste internationale pour le dépistage de l'érythropoiétine (EPO), une réflexion antérieure au Tour de France 1998 a été largement engagée entre le ministère de la jeunesse et des sports et la Fédération française de cyclisme. Une des conclusions a révélé que l'hématocrite ne peut à lui seul infirmer ou confirmer une prise d'érythropoiétine dans le cadre des contrôles antidopage. En effet, retenir un paramètre unique, qui ne permet pas une interprétation médicale pertinente et un seuil arbitrairement fixé à 50 %, présente le risque de voir sanctionner des sportifs innocents (très peu de sportifs sont concernés puisque l'adaptation normale à l'endurance consiste en une augmentation du volume plasmatique et donc une baisse physiologique de la valeur hématocrite), mais surtout de voir ce seuil être interprété par beaucoup comme un seuil de tolérance autorisant l'usage de l'EPO. Par ailleurs, cette valeur limite peut encourager les manipulations sanguines artificielles, très dangereuses, visant à créer une hémodilution pour abaisser la valeur trouvée lors du contrôle. Il apparaît donc préférable de réaliser un profil hématologique complet autorisant un diagnostic médical en conformité avec les règles professionnelles. Tenant compte de toutes ces données, madame la ministre a décidé de développer une démarche de santé publique et de mettre en place les conditions d'un suivi médical et biologique systématique des sportifs de très haut niveau, de toutes disciplines et en tout lieu (entraînement, compétition et stages). Ce suivi comprendra des visites médicales régulières accompagnées de prélèvements sanguins qui seront notamment réalisés grâce à la première unité médicale mobile acquise début 1998. Cette unité, à l'image des antennes mobiles de médecine du travail, est organisée sous la forme d'un laboratoire d'analyses biologiques. On peut raisonnablement penser que l'ensemble des données biologiques recueillies permettra un suivi médical longitudinal et non plus ponctuel et un diagnostic global. Enfin, le laboratoire national de dépistage du dopage a développé une technologie permettant l'analyse des profils isoélectriques de l'EPO dans l'urine sans purification préalable, qui devrait permettre de séparer l'EPO endogène de l'EPO recombinante consommée à des fins de dopage.
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