FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 19328  de  M.   Asensi François ( Communiste - Seine-Saint-Denis ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  21/09/1998  page :  5169
Réponse publiée au JO le :  02/11/1998  page :  6046
Rubrique :  famille
Tête d'analyse :  divorce
Analyse :  prestation compensatoire. réforme
Texte de la QUESTION : M. François Asensi souhaite attirer l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les problèmes posés par l'application des articles 270 à 281.1 du code civil traitant des effets du divorce et plus précisément de la prestation compensatoire instituée par la loi n° 75.617 du 11 juillet 1975. Ces articles prévoient que « l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ». Sur 118 056 divorces prononcés en 1994, 15 419 ont donné lieu au versement d'une prestation compensatoire. Dans la plupart des cas, les tribunaux condamnent l'un des époux en activité à verser à l'autre cette prestation sous la forme d'une rente qui est indexée sur l'évolution du coût de la vie. Elle est due à vie au créancier. A la mort de l'époux débiteur, la charge de la rente passe à ses héritiers. De part son caractère indemnitaire et forfaitaire, elle n'est, contrairement à la pension alimentaire versée aux enfants par le parent qui n'en a pas la garde, pratiquement jamais révisée, la diminution des ressources de l'époux débiteur, en situation de grande précarité économique, ne constituant pas une circonstance suffisante, pas plus qu'un changement des conditions de vie de l'ex-conjoint ou conjointe qui peut se remarier avec quelqu'un de fortuné. A ce jour, la Cour de cassation n'a confirmé que deux révisions, dans des cas particulièrement dramatiques. D'une façon générale, la pratique a consacré la rente compensatoire comme règle d'attribution et le capital comme exception. Une proposition de loi tendant à la modification des dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de divorce a été examinée par le Sénat le 25 février dernier. Ce texte de compromis a été voté à l'unanimité par les Sénateurs. La principale mesure est d'autoriser la révision de la rente versée par l'époux « en cas de changement substantiel dans les ressources ou les besoins des parties ». De même, la durée de la prestation compensatoire, fixée par le juge, pourra être viagère et des possibilités de convertir la rente en capital seront désormais possibles. Cependant, pour remédier définitivement à des situations dramatiques, il lui demande si elle envisage de faire réviser, à l'occasion du prochain débat parlementaire sur la prestation compensatoire, le caractère transmissible de la rente aux héritiers.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'un certain assouplissement des conditions de modification de la prestation compensatoire paraît en effet s'imposer eu égard au contexte socio-économique, sans qu'il y ait lieu cependant de revenir à un régime comparable à celui des pensions alimentaires avant la réforme de 1975, dont les inconvénients ont été unanimement dénoncés. Lors de la discussion au Sénat des deux propositions de loi de MM. About et Pagès relatives à la prestation compensatoire, le 25 février 1998, le Gouvernement a déposé différents amendements en ce sens. La question a de surcroît été examinée dans le cadre de la mission sur l'adaptation du droit de la famille à l'évolution de la société, confiée à Irène Thêry qui a déposé son rapport en mai dernier. Dans l'attente de la discussion à l'Assemblée nationale du texte adopté par le Sénat en première lecture, les réflexions engagées à la chancellerie sur ce sujet vont se poursuivre au sein du groupe de travail pluridisciplinaire, qui a été installé par le garde des sceaux le 31 août 1998, sous la présidence de Mme Dekeuwer-Defossez, dans le but de présenter des propositions de réforme du droit de la famille. Toutefois, il semble difficile de systématiser la suppression de plein droit de la prestation compensatoire en cas de remariage ou de concubinage notoire de son bénéficiaire. Une telle solution méconnaîtrait en effet le pouvoir d'appréciation du juge en fonction des circonstances de l'espèce. De la même façon, il paraît difficilement envisageable de rendre intransmissible, dans tous les cas, la charge de la rente aux héritiers du débiteur. L'intransmissibilité, posée en principe absolu, pourrait conduire en effet à des situations difficilement supportables pour le créancier dont il y a lieu de rappeler que, dans la plupart des cas, il s'agit de femmes s'étant consacrées exclusivement pendant de longues années à l'éducation des enfants et se trouvant sans qualification ni revenu autre que la rente accordée.
COM 11 REP_PUB Ile-de-France O