FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 19443  de  M.   Alaize Stéphane ( Socialiste - Ardèche ) QE
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  21/09/1998  page :  5134
Réponse publiée au JO le :  09/11/1998  page :  6118
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Sierra Leone
Analyse :  droits de l'homme
Texte de la QUESTION : M. Stéphane Alaize attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation politique et économique de la Sierra Leone. En effet, le Président Kabbah, à son retour d'exil en Guinée qui a duré un an, a trouvé un pays où la guerre civile n'est pas terminée, avec notamment des poches de résistance armée dans le nord du pays. De plus, de graves problèmes économiques et alimentaires persistent. La conférence que l'Organisation des Nations unies a consacrée en juillet 1998 à la Sierra Leone n'a malheureusement pas débouché sur des décisions concrètes. Il lui demande s'il ne jugerait pas opportun d'apporter une aide financière et technique au gouvernement du Président Kabbat et de proposer à l'Organisation des Nations unies la mise en place d'un organe international de surveillance des droits de l'homme en Sierra Leone.
Texte de la REPONSE : Comme le sait l'honorable parlementaire, le Président Ahmad Tejan kabbah, élu en mars 1996 après quatre années de régime militaire puis renversé le 25 mai 1997 par le coup d'Etat du commandant Koromah, est rentré à Freetown le 10 mars 1998, après 9 mois d'exil à Conakry. La France avait été le premier pays à déplorer le coup d'Etat en mai 1997. Elle a appelé avec constance à la restauration pleine et entière de la légalité constitutionnelle et soutenu l'action de la CEDEAO, de l'OUA et de l'ONU dans ce sens. Elle a refusé tout contact avec la junte et interrompu sa coopération. Aujourd'hui, elle apporte une aide financière et technique significative à la Sierra Leone (subvention à l'ONG « ACF » pour ses programmes hydrauliques en Guinée, au bénéfice des réfugiés sierra léonais ; fourniture de matériel médical et de médicaments à l'hôpital de Forecarah en Guinée pour faire face à l'afflux de réfugiés sierra léonais). Lors de la conférence spéciale sur la Sierra Leone convoquée par le secrétaire général des Nations unies le 30 juillet 1998, la France a annoncé une contribution de 1 MFF au programme de l'UNICEF pour la protection des enfants affectés par le conflit, afin de permettre notamment la réintégration dans une vie normale des enfants soldats et la reconstitution des familles disloquées par la guerre. L'action ainsi soutenue s'inscrit dans le cadre des efforts de réconciliation nationale entrepris par le gouvernement de Sierra Leone. En matière de droits de l'homme, la situation reste fragile. Depuis que la junte a été chassée du pouvoir, ses partisans semblent s'être concentrés dans les zones montagneuses du nord et de l'est du pays où ils se livrent à de nombreuses et graves exactions contre les populations civiles. A Freetown, les procès pour trahison se succèdent devant la Haute Cour de justice : le chef historique du Front révolutionnaire uni, Foday Sankoh, ainsi que 21 personnes, parmi lesquelles Joseph Momoh, Président de la Sierra Leone de 1982 à 1992, comparaissent actuellement ; le 19 octobre 1998, 16 civils ont été reconnus coupables de trahison et encourent désormais la peine de mort ; le 25 août dernier, 16 civils dont cinq journalistes avaient été condamnés à mort pour collusion avec la junte (la procédure d'appel est en cours). La Cour martiale a également condamné à mort 34 militaires pour avoir collaboré avec la junte de mai 1997 à février dernier. Parmi eux, 24 ont été exécutés à Freetown le 19 octobre 1998. Sans se prononcer sur les forfaits dont ils ont pu se rendre coupables, la France déplore qu'ils n'aient pu faire appel du jugement prononcé contre eux et estime que la multiplication des condamnations à la peine capitale va à l'encontre de la nécessaire recherche d'une réconciliation nationale. L'Union européenne a également condamné ces exécutions en rappelant son opposition à la peine de mort. L'organisation des Nations unies s'est beaucoup impliquée dans le processus de rétablissement de la paix en Sierra Leone (mise en oeuvre d'un embargo sur les armes et sur le pétrole par la résolution 1132 du 8 octobre 1997 ; désignation d'un représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, M. Francis Okello ; mise en place d'un fonds d'affectation spécial, alimenté par des contributions volontaires ; organisation d'une conférence spéciale sur la Sierra Leone le 30 juillet 1998). A l'heure actuelle, son rôle en ce qui concerne la surveillance du processus de paix et des droits de l'homme reste essentiel. Ainsi, la résolution 1181 du 13 juillet 1998 a créé la mission d'observation des Nations unies en Sierra Leone (MONUSIL) et autorisé le déploiement d'un maximum de 70 observateurs militaires. La MONUSIL, qui devrait permettre de suivre l'avancement du processus de paix, aura pour mandat principal d'aider le gouvernement sierra léonais et l'ECOMOG à mettre en oeuvre le plan de désarmement, de démobilisation et de réinsertion adopté par le Gouvernement sierra léonais le 15 juillet 1998. A l'heure actuelle, environ 2000 soldats ont d'ores et déjà été démobilisés. Au sein de la MONUSIL, une unité comprenant cinq membres et consacrée à la surveillance des droits de l'homme a également été mise en place. Enfin, la résolution 1181 renforce le bureau de liaison de l'ONU, ouvert à Freetown en mars 1998, par des spécialistes des questions militaires, des droits de l'homme et de l'information. Des efforts importants sont donc menés afin de favoriser la réconciliation nationale et le retour à la paix en Sierra Leone.
SOC 11 REP_PUB Rhône-Alpes O