FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 19632  de  M.   Sarre Georges ( Radical, Citoyen et Vert - Paris ) QE
Ministère interrogé :  éducation nationale, recherche et technologie
Ministère attributaire :  éducation nationale, recherche et technologie
Question publiée au JO le :  28/09/1998  page :  5252
Réponse publiée au JO le :  24/05/1999  page :  3143
Date de signalisat° :  17/05/1999
Rubrique :  enseignement
Tête d'analyse :  établissements
Analyse :  objets publicitaires. distribution. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Georges Sarre attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur l'accélération préoccupante des offensives publicitaires des entreprises privées en milieu scolaire, sous couvert de sensibiliser les élèves à quelques grandes thématiques - santé, respect de l'environnement, sécurité domestique, voire monnaie unique européenne -, alors même que plusieurs circulaires ministérielles interdisent pourtant « les pratiques commerciales dans les établissements publics d'enseignement ». Les élèves de l'enseignement public sont ainsi de plus en plus sollicités par les annonceurs au sein même de leurs établissements, sous des formes sans cesse renouvelées : distributions gratuites d'échantillons ; reproduction de publicités dans les livrets de présentation et les cartes de cantine des établissements, voire dans les livres scolaires ; conventions de partenariat passées par des municipalités, ou les fédérations responsables des activités sportives périscolaires, avec des entreprises privées fournissant du matériel pédagogique sur la nutrition et des produits à prix réduit en échange d'une exclusivité ; implantation de distributeurs de boissons dans les établissements ; intervention multiforme des entreprises lors des fêtes de fin d'année. Deux formes particulières d'intrusion du secteur marchand en milieu scolaire sont à signaler. D'une part, le développement de l'affichage publicitaire sur les enceintes ou murs extérieurs des établissements scolaires, pratique « relativement fréquente dans les grandes villes de province » et qui concernerait « quelques dizaines de chefs d'établissement à Paris », selon la société d'affichage Giraudy. Il rappelle à ce sujet que, selon les tribunaux administratifs, les conseils d'administration n'ont pourtant pas compétence pour négocier ce genre de contrats, par ailleurs dommageables en ce qu'ils portent atteinte à la neutralité scolaire, amorcent une logique de privatisation des établissements qui verraient leurs ressources propres remplacer progressivement les dotations des collectivités locales, et remettent donc en cause la stabilité des ressources et l'égalité entre établissements. D'autre part, la fourniture, gratuite ou à bas prix, aux enseignants de « mallettes pédagogiques ». Apparues à la fin des années quatre-vingt, ces supports de cours toujours plus sophistiqués - associant diapositives, cassettes vidéo, cahiers d'exercices ou de jeux pour les élèves, guide pour l'enseignant, échantillons de produits, voire CD-ROM - sont en plein développement. Confectionnés par des agences de communication en liaison avec les nouveaux départements « pédagogiques » des entreprises et avec la participation de membres de l'éducation nationale cautionnant la démarche, ces matériels pédagogiques sponsorisés - dont les meilleurs devraient être bientôt labellisés par le ministère - répondraient, selon leurs promoteurs, à une demande des enseignants et infirmeries scolaires de supports de qualité plus vivants et plus ludiques, et pallieraient ainsi un manque. S'inscrivant en faux contre cette logique opportuniste de privatisation insidieuse de l'équipement et du fonctionnement des établissements d'enseignement de la République, qui ne sauraient être l'enjeu des stratégies d'image d'entreprises en quête de parts de marché, il lui demande donc de faire au plus tôt le point sur ces pratiques dommageables et de lui indiquer les mesures envisagées afin de mettre un terme à ce harcèlement publicitaire des enfants et adolescents en milieu scolaire, contraire aux circulaires ministérielles.
Texte de la REPONSE : Malgré la pression qui peut être exercée par les entreprises commerciales pour s'introduire dans les établissements scolaires, compte tenu du marché potentiel que représentent les élèves, il convient de souligner que les chefs d'établissement sont majoritairement vigilants pour assurer la protection du milieu scolaire contre les pratiques commerciales. La publicité au sein des établissements scolaires reste rigoureusement interdite, en vertu du principe fondamental de neutralité du service public d'enseignement. Les circulaires n° II-67-290 du 3 juillet 1967 et n° 76-440 du 10 décembre 1976, entre autres, relatives à l'interdiction des pratiques commerciales dans les établissements publics d'enseignement, rappellent que les enseignants et les élèves ne peuvent en aucun cas être concernés directement ou indirectement par quelque publicité commerciale que ce soit. Le respect de la neutralité ne doit pas toutefois conduire à refuser systématiquement l'introduction dans les établissements scolaires d'éléments susceptibles de contribuer à l'exercice de leur mission éducative. Ainsi, par exemple, il ne serait pas judicieux de s'opposer à l'installation de distributeurs de boissons ou d'alimentation dans les locaux scolaires au seul motif de la présence de marques publicitaires sur ceux-ci, dès lors que la mise à la disposition des élèves de ce type de matériel améliore effectivement la vie collective dans l'établissement, en contribuant à en faire un lieu de sociabilité. Le respect du principe de neutralité interdit en particulier l'affichage de messages publicitaires à l'intérieur des locaux scolaires. En revanche, l'apposition d'affiches publicitaires sur l'enceinte des locaux scolaires ne contrevient pas au principe de neutralité. La légalité des opérations d'affichage doit être appréciée au regard des règles juridiques applicables à la domanialité publique. Il appartient à la collectivité territoriale propriétaire des bâtiments scolaires publics de prendre les décisions relatives tant au principe qu'aux modalités de l'affichage sur les bâtiments. Si le conseil d'administration de l'établissement public peut formuler à l'égard du principe d'affichage publicitaire des propositions, c'est à la collectivité qu'il revient d'autoriser la location d'un emplacement publicitaire situé sur l'enceinte extérieure de l'établissement. Les restrictions aux opérations d'affichage sur ces bâtiments découlent de la jurisprudence sur la domanialité publique, qui exclut les affichages incompatibles avec les missions du service public de l'éducation, notamment l'affichage à caractère politique, érotique, ou en faveur de consommations dangereuses pour la santé. Pour ce qui concerne les produits à caractère pédagogique distribués à l'initiative d'entreprises privées, plutôt que de s'opposer systématiquement et sans discernement à leur diffusion auprès des élèves, il paraît plus opportun de s'assurer, dans le cadre d'un partenariat positif, de leur intérêt vis-à-vis des programmes et des contenus d'enseignement, ainsi que de l'absence de références publicitaires constitutives d'une incitation à la consommation, avant d'autoriser leur diffusion. Ainsi, si la qualité des documents pédagogiques peut être garantie, ceux-ci peuvent participer d'une manière non négligeable en particulier à l'éducation à la consommation et à l'éducation à la santé des jeunes élèves, à condition de respecter les principes généraux de l'école.
RCV 11 REP_PUB Ile-de-France O