FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 19829  de  M.   Sarre Georges ( Radical, Citoyen et Vert - Paris ) QE
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  05/10/1998  page :  5363
Réponse publiée au JO le :  30/11/1998  page :  6551
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  transports aériens
Analyse :  air Afrique. équilibre financier. attitude de la France
Texte de la QUESTION : M. Georges Sarre attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le devenir de la compagnie aérienne Air Afrique, sachant que le Consortium de réalisation du Crédit lyonnais vient d'exiger d'elle qu'elle règle ses arriérés de crédit (soit 1,83 milliard de francs) avant le 15 octobre 1998, faute de quoi il envisagerait de demander sa mise en liquidation judiciaire dès le lendemain. La mise à exécution d'un tel ultimatum, adressée à une compagnie qui souffrait en juillet 1998 d'un endettement de quelque 185 milliards de francs CFA (soit quatre fois ses fonds propres), auquel il fallait ajouter une charge annuelle de la dette de 12 milliards de francs CFA, ne manquerait pas, en effet, de lui être fatal, vidant par là même de tout sens les efforts notables récemment accomplis par Air Afrique pour redresser sa situation financière comme les tentatives multilatérales de sortie de crise actuellement envisagées par ses actionnaires. Il souligne ainsi l'amélioration notable de la gestion et du résultat d'exploitation d'Air Afrique en 1997, en vue du premier grand objectif de son plan stratégique 1998-2000 : le retour aux bénéfices. Ainsi, la compagnie a-t-elle réduit ses pertes comptables à 6,6 milliards de francs CFA pour l'exercice 1997 (contre 23,3 milliards de francs CFA pour l'exercice 1996) et généré un bénéfice net d'exploitation de 7,3 milliards de francs CFA avant frais financiers, en 1997 (contre une perte d'exploitation de 3,6 milliards de francs CFA en 1996). De même, Air Afrique a transporté, en 1997, 100 000 passagers de plus qu'en 1996 (soit 936 908 au total), dans un contexte de reprise mondiale du trafic aérien dont elle devrait profiter, ce qui devrait améliorer sa position dans la négociation du rééchelonnement de sa dette. Il s'interroge par ailleurs sur les intentions des partenaires français d'Air Afrique - à savoir l'Agence française de développement et Air France, qui détiennent respectivement 9,12 et 12,7 % du capital de la compagnie -, au regard de l'appel qui leur a été lancé de Bamako, le 29 juillet dernier, par les ministres des transports des onze Etats africains actionnaires, en vue de participer à la réalisation du second grand objectif de la compagnie d'ici à l'an 2000 : l'ouverture de son capital à hauteur de 19 % pour assurer la viabilité éonomique de l'entreprise. Au vu des réticences exprimées depuis lors par ses partenaires français à ce sujet - qui pourraient être interprétées comme une volonté de se désengager - comme de la mise en place en juillet dernier, lors de la réunion de Barnako, d'un comité d'experts « chargé d'élaborer dans les meilleurs délais un plan de restructuration devant conduire à terme à la mise en oeuvre d'un processus de privatisation », il insiste sur le caractère éminemment politique de ce dossier, compte tenu du mandat de service public d'Air Afrique qui implique - conformément aux objectifs afichés lors de sa création par le traité de Yaoundé en 1961 - de continuer à desservir toutes les liaisons de son réseau, y compris les Etats enclavés (tel le Burkina Faso) correspondant à des lignes économiquement déficitaires mais d'importance stratégique pour les pays concernés. Dans ce contexte, convaincu que les seules considérations financières ne sauraient dicter l'attitude du gouvernement en la matière, il demande donc à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de lui indiquer au plus tôt la position de la France sur ce dossier, au regard notamment de la menace de mise en liquidation judiciaire d'Air Afrique par le Consortium de réalisation du Crédit lyonnais.
Texte de la REPONSE : Malgré plusieurs plans de redressement que la France a soutenus financièrement, la compagnie africaine de transport aérien Air Afrique se trouve depuis trois ans dans l'impossibilité de faire face aux échéances des crédits qui lui avaient été accordés pour l'achat de six appareils Airbus, dont cinq ont fait l'objet d'un financement garanti par les agences de crédit export anglaise, allemande et française. Par le passé, la France a déjà très largement soutenu la compagnie Air Afrique, les concours français à la compagnie approchant 1 milliard de francs depuis 1989. Le dernier soutien apporté par la France en janvier 1996, dont il avait été convenu qu'il serait le dernier, était lié à un engagement des Etats membres de restructurer la compagnie. Un plan de restructuration de la dette, avantageux pour la compagnie, avait été négocié avec le Crédit lyonnais, et non le Consortium de réalisation, et les assureurs-crédit français, britannique et allemand. Ce plan comprenait, d'une part, la création d'une société de patrimoine dont le capital de 310 millions de francs (apporté par l'ASECNA et par chacun des onze Etats membres) devait contribuer à l'apurement des arriérés, et, d'autre part, un rééchelonnement sur 15 ans du solde de la dette. La contribution effective des Etats se limitait fin juillet au 1/3 du montant prévu. La compagnie et ses actionnaires n'ont pas été en mesure de concrétiser les engagements pris dans ce cadre. Les banques et les assureurs-crédit ont d'abord accepté d'octroyer de nouveaux délais pour laisser toutes les chances au plan de se réaliser. Malgré d'importants efforts dans lesquels la France s'est impliquée, il a bien fallu constater l'absence de progrès significatifs et de perspectives positives. Les créanciers français mais aussi allemand et anglais ont donc dû conjointement se résoudre à mettre en oeuvre les procédures de recouvrement normales en la circonstance, impliquant notamment d'engager la repossession de quatre aéronefs A 310-300, ce qui a été fait le 7 juillet dernier. Depuis lors, et dans le cadre normal des relations entre créanciers et débiteur, les banques et les assureurs-crédit français, allemand et britannique ont notifié le montant des dettes dont la compagnie aérienne est redevable. Ce montant s'élève à 1,35 milliard de francs français. Il appartient désormais à la compagnie aérienne, à ses dirigeants comme à ses actionnaires, de proposer aux créanciers et aux assureurs-crédit français et étrangers une sortie crédible à cette situation de crise. Dans ce cadre, un comité d'experts a été mis en place lors de la réunion des ministres actionnaires d'Air Afrique à Bamako le 29 juillet dernier, afin d'élaborer un plan de restructuration devant conduire à terme à la mise en oeuvre d'un processus de privatisation. Suite à la décision des actionnaires africains, le comité des experts a rendu un premier rapport sur la restructuration de la gestion technique de la compagnie : politique commerciale, stratégie d'alliance, plans d'amélioration de la productivité et de la rentabilité. Ce rapport, dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il a été réalisé par des professionnels, s'il propose une restructuration opérationnelle de l'entreprise, ne répond cependant pas à la préoccupation à court terme de la compagnie concernant sa restructuration financière. C'est pourquoi un second rapport, spécifiquement consacré aux questions financières, a été commandé à un cabinet d'expert-comptable par le ministre ivoirien des transports, M. Adama Coulibaly, actuel président du comité des ministres actionnaires d'Air Afrique. Dans le cadre d'une procédure d'ouverture de capital, des opérateurs privés pourraient être amenés à prendre des participations dans la compagnie aérienne africaine. A l'inverse, une implication directe de l'Etat français n'est pas apparu opportune. Conscient de l'importance pour l'Afrique de disposer de transports aériens de qualité, la France ne ménagera pas ses efforts pour obtenir une restructuration du secteur aérien en Afrique, laquelle suppose avant tout des transporteurs aériens performants et compétitifs.
RCV 11 REP_PUB Ile-de-France O