Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Analyse : |
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Texte de la REPONSE : |
«M. Gérard Saumade attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la législation applicable aux campagnes électorales et sur les conséquences qui résultent des décisions du Conseil d'Etat des 10 mai 1996 «élections cantonales de Malakoff» et 2 octobre 1996 «élections municipales de Bassens» relatives à l'application de l'article L. 52-1 du code électoral. Aux termes du deuxième alinéa de cet article, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales. Sous prétexte de garantir la plus grande égalité entre les candidats, le Conseil d'Etat, en considérant que la campagne électorale est une campagne de promotion de la gestion d'une collectivité si elle fait allusion à l'activité du sortant au cours de son mandat et que le compte rendu de mandat constitue une telle campagne même si elle n'émane pas de la collectivité, interdit désormais aux élus sortants de publier un bilan ou un compte rendu du mandat même si la publication de ce document est financée en totalité par le candidat. Cette interdiction profite directement aux autres candidats qui peuvent à loisir critiquer la gestion sans risquer d'être contredits par écrit. Ces décisions ont également pour conséquence de confier aux journalistes d'une presse locale souvent monopolistique le soin d'informer les citoyens. Il observe, en outre, que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques diffuse, par l'intermédiaire de son service Minitel, l'information selon laquelle: «Les thèmes d'une campagne électorale sont en principe libres. Mait tout acte de propagande sur fonds publics est interdit. L'édition de documents relatifs au bilan de mandat est possible dans le cadre de la campagne électorale, dès lors qu'elle est financée régulièrement et retracée dans le compte de campagne.» Que penser de cette contradiction ? Faudra-t-il se baser sur les écarts de voix séparant les candidats pour distinguer ce qui relève de la simple défense de leur action, de la simple allusion à ce qui a été réalisé, de ce qui, au contraire, relève de l'action de communication globale au moyen de supports de communication qui s'apparentent à une campagne publicitaire et qui est, par conséquent, prohibé. Il lui demande si une modification de la législation est envisagée, afin de remédier à cette situation et afin de corriger l'interprétation problématique de la loi qui est faite par le juge, interprétation qui sera directement à l'origine de la multiplication des contentieux.» La parole est à M. Gérard Saumade, pour exposer sa question. M. Gérard Saumade. Ma question au ministre de l'intérieur porte sur la législation applicable aux campagnes électorales. Elle peut paraître curieuse après une campagne, mais on ne parle que de révision des lois électorales, confondant sans doute utilisation du thermomètre et traitement de la fièvre. Ma question concerne des décisions du Conseil d'Etat du 10 mai 1996, «Elections cantonales de Malakoff» et du 2 octobre 1996 «Elections municipales de Bassens», relatives à l'application de l'article L. 52-1 du code électoral. J'ai pu d'autant mieux me rendre compte des difficultés qu'elles posaient que, ne me présentant pas moi-même, j'avais le recul nécessaire à une certaine objectivité. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-1, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales. Sous prétexte de garantir la plus grande égalité entre les candidats, le Conseil d'Etat, en considérant que la campagne électorale est une campagne de promotion de la gestion d'une collectivité si elle fait allusion à l'activité du sortant au cours de son mandat, et que le compte rendu de mandat constitue une telle campagne, interdit désormais aux élus sortants de publier un bilan ou un compte rendu de mandat, même si la publication de ce document est financée en totalité par le candidat. Cette interdiction, qui gêne le sortant, profite directement aux autres candidats, qui peuvent à loisir critiquer la gestion sans risquer d'être contredits par écrit. Ces décisions ont également pour conséquence de confier aux journalistes d'une presse locale souvent monopolistique le soin d'informer les citoyens. J'observe, en outre, que la commission nationale des comptes de campagne - et c'est là où les choses deviennent plus délicates - diffuse, par l'intermédiaire de son service minitel, l'information selon laquelle: «les thèmes d'une campagne électorale sont en principe libres. Mais tout acte de propagande sur fonds publics est interdit. L'édition de documents relatifs au bilan de mandat est possible dans le cadre de la campagne électorale, dès lors qu'elle est financée régulièrement et retracée dans le compte de campagne». Il y a donc contradiction entre l'interprétation du Conseil d'Etat et celle de la Commission nationale des comptes. Faudra-t-il se baser sur les écarts de voix séparant les candidats - ce qui est, je crois, la procédure suivie par le Conseil d'Etat - pour distinguer ce qui relève de la simple défense de leur action, de l'allusion à ce qui a été réalisé, de ce qui, au contraire, relève de l'action de communication globale ? Il y a là un problème. M. le ministre de l'intérieur, que j'ai déjà interrogé sur l'interprétation de la loi, m'a répondu - ce qui est tout à fait évident - que, par décret, on ne peut pas mettre en cause l'autorité de la chose jugée. Je lui demande, par conséquent, si une modification de la législation est envisagée afin de remédier à cette situation et afin de corriger l'interprétation problématique de la loi qui est faite par le juge, interprétation qui risque d'être directement à l'origine de la multiplication des contentieux. M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes. M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, vous posez au ministre de l'intérieur, de façon tout à fait objective et désintéressée, une question qui vous tient à coeur sur l'interprétation de l'article L. 52-1 du code électoral, notamment au regard de la jurisprudence. Dans ses décisions du 10 mai 1996, Elections cantonales de Malakoff, et du 2 octobre 1996, Elections municipales de Bassens, le Conseil d'Etat a effectivement procédé à une interprétation large de l'article précité dans la mesure où il qualifie de campagne de promotion publicitaire des publications municipales présentant un bilan des actions engagées par les collectivités concernées, alors même que leur financement était assuré non pas par des fonds publics, mais personnellement par des candidats. Vous notez, monsieur le député, que cette décision est en contradiction avec la position de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, qui, pour sa part, considère que «l'édition de documents relatifs au bilan de mandat est possible dans le cadre de la campagne électorale, dès lors qu'elle est financée régulièrement et retracée dans le compte de campagne». Il n'appartient évidemment pas au Gouvernement de revenir sur une décision de justice. Vous ne le demandez d'ailleurs pas. Il faut simplement constater que le juge électoral, pour donner leur plein effet aux dispositions de l'article L. 52-1, tel qu'il a été voulu par le législateur, est dans l'obligation de définir précisément ce qui constitue une campagne de promotion publicitaire. Et c'est là qu'est la difficulté. Force est de reconnaître que, en la matière, les supports de communication à la disposition des collectivités sont très diversifiés, rendant ainsi malaisée la définition juridique de la notion de campagne de promotion publicitaire. C'est pourquoi, se livrant dans chaque cas d'espèce qui lui est soumis à une appréciation approfondie des faits et de leurs incidences sur le scrutin, le juge tente de déterminer la frontière entre ce qui est permis et ce qui ne l'est pas, avec pour objectif final de ne remettre en cause les résultats d'une élection que lorsque les irrégularités commises ont pu altérer la sincérité des résultats. Cette attitude est conforme au principe de l'égalité du suffrage et à l'expression de la souveraineté. Dans les cas que vous citez, monsieur Saumade, il semble au ministre de l'intérieur que le Conseil d'Etat n'a pas méconnu les textes applicables. Ce n'est d'ailleurs pas son habitude. Tout d'abord, en décidant de ne pas prendre en compte l'origine du financement de la campagne de promotion publicitaire litigieuse, le juge électoral confirme la position du législateur, qui n'avait pas lui-même souhaité opérer de distinction entre les campagnes financées par les collectivités publiques et celles supportées par les candidats. Je vous concède que l'intention originelle et principale du Parlement, telle qu'elle est transcrite dans les débats, était bien de lutter contre le financement de campagnes électorales par des fonds publics, mais les textes définitifs ont un champ d'application plus large. Quoi qu'il en soit, ils poursuivent un objectif qui est de placer tous les candidats à une élection sur un pied d'égalité. Le juge a considéré que le but fixé par la loi ne serait pas atteint si l'on acceptait qu'un élu sortant puisse disposer de moyens et de supports de campagne inaccessibles à un autre candidat - principe d'égalité, encore une fois. En revanche, il n'a pas exclu la possibilité, pour tous les candidats à une élection, de diffuser des documents de propagande concernant le programme et les projets proposés. Enfin, il a semblé au ministre de l'intérieur que l'on ne pouvait soutenir que l'article L. 52-1 du code électoral et la jurisprudence du Conseil d'Etat laisseraient un élu sortant sans possibilité de répliquer aux attaques de ses adversaires sur son bilan et lui interdiraient de se prévaloir des actions de son mandat, même dans le cas d'une presse monopolistique, comme vous l'avez évoqué. Qui plus est, lorsque ces attaques sont le fait d'organes de presse, le code électoral fait siennes les dispositions plus générales, plus anciennes, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui a institué un droit de réponse en faveur de toute personne nommée ou désignée dans les journaux ou écrits périodiques. Compte tenu de ces éléments, la modification d'une législation voulue par le Parlement - et il faut le souligner - n'apparaît pas aussi nécessaire qu'une lecture aussi attentive que la vôtre des arrêts récents du Conseil d'Etat pourrait le laisser penser. M. le président. Monsieur Saumade, cinq de nos collègues ont encore à poser leur question. Je vous demande donc d'être bref. Vous avez la parole. M. Gérard Saumade. Les services juridiques dont je disposais ont été dans l'incapacité de fournir des conseils sur ce point. C'est pourquoi il me semble qu'il faudrait éclaircir ce texte. Sinon on en arrivera à ce que le Conseil d'Etat juge dans un sens ou dans l'autre selon l'écart de voix entre les candidats, ce qui serait tout de même assez grave. Je souhaite donc simplement un éclaircissement de la législation de façon qu'il n'y ait pas de contestation possible. |