FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 2267  de  Mme   Catala Nicole ( Rassemblement pour la République - Paris ) QG
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  04/10/2000  page :  6336
Réponse publiée au JO le :  04/10/2000  page :  6336
Rubrique :  chômage : indemnisation
Tête d'analyse :  régime d'assurance chômage
Analyse :  réforme
DEBAT : M. le président. La parole est à Mme Nicole Catala.
Mme Nicole Catala. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame la ministre, vous aviez la possibilité de quitter vos fonctions ministérielles en approuvant une rénovation en profondeur du système d'assurance chômage. Au lieu de saisir cette possibilité, vous venez de provoquer une crise sans précédent du paritarisme, et de prendre le risque d'une glaciation sociale, pour user des termes employés par un leader syndical (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste)... ou encore, pour reprendre les termes mêmes de Mme Notat, une situation «hallucinante et grotesque».
M. Christian Bataille. La parole est à la réaction !
Mme Nicole Catala. Je ne fais que citer Mme Notat.
(Mêmes mouvements.)
Vous venez, en effet, madame la ministre, de rejeter, pour la seconde fois, l'accord conclu par les partenaires sociaux au terme d'une longue négociation, un accord qui comporte cependant de nombreux points positifs pour les chômeurs.
J'en évoque quelques-uns. La suppression de la dégressivité des allocations qui est un point capital pour de nombreux demandeurs d'emploi, mais également l'élargissement de l'accès à l'indemnisation, l'offre de prestations en nature - formation, transport, logement et, en particulier, une aide à la mobilité géographique lorsqu'elle est nécessaire. Il s'agit aussi de l'assimilation de la démission à un licenciement pour créer une entreprise, et donc de l'ouverture de droits à indemnité dans cette hypothèse.
Cet accord que vous rejetez se situe dans la ligne préconisée par l'OCDE, mais aussi par les instances européennes et, chez nous, par l'inspection générale des affaires sociales qui vous a remis, l'an dernier, un rapport suggérant en particulier de mieux marquer le lien entre indemnisation et recherche d'emploi et de renforcer la synergie entre ASSEDIC et ANPE.
M. François Goulard. Très juste.
Mme Nicole Catala. Quels griefs prétendez-vous formuler à l'encontre de cet accord ?
D'abord, il obligerait les chômeurs à accepter des postes ne correspondant pas à leur qualification. C'est tout à fait faux. Le texte prévoit que les emplois offerts devront être compatibles avec la spécialité ou la formation antérieure du chômeur, ses qualifications validées...
M. le président. Madame Catala, pardonnez-moi, mais évitez de faire les questions et les réponses. Pour laisser le temps à Mme Aubry de répondre !
Mme Nicole Catala. Il faut néanmoins que l'opinion publique soit informée, monsieur le président ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Sur le premier point, madame le ministre, votre argument est parfaitement erroné. Ensuite, vous dites que l'accord impliquerait un lourd déséquilibre financier. En réalité, ce que vous souhaiteriez, c'est ponctionner 20 milliards de francs par an sur l'assurance chômage pour financer des baisses d'impôt ou les 35 heures ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bataille. Nous ne sommes pas à l'école ici !
Mme Nicole Catala. Enfin, vous affirmez que les partenaires sociaux se substitueraient à l'Etat pour prononcer des sanctions. Faux encore, puisque ce sont les services de l'Etat qui prononceront les sanctions que vous avez vous-mêmes instituées en 1992. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme Nicole Catala. Madame la ministre, après avoir ainsi rappelé les données du problème... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Mais ce n'était pas inutile.
L'opinion n'est pas nécessairement informée de toutes ces précisions !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.
Mme Nicole Catala. Je souhaiterais savoir si, comme ce fut le cas en novembre 1982, lorsque M. Bérégovoy prit un décret duquel résultèrent ce que l'on a appeler ensuite «les nouveaux pauvres» - vous vous en souvenez, peut-être ? - vous vous apprêtez à nouveau à intervenir de façon autoritaire dans le système d'assurance chômage, à l'étatiser en quelque sorte, contrairement à l'évolution qui est partout observée chez nos voisins et nos concurrents ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame la députée, jusqu'au dernier jour («C'est quand le dernier jour ?» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République), comme je le fais depuis trois ans, je ferai ce pour quoi le Premier ministre m'a demandé de travailler, c'est-à-dire garantir les droits des chômeurs et des salariés, améliorer la protection sociale dans ce pays, tout en garantissant la compétitivité de notre économie et de nos entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Et c'est sous ce seul aspect que j'examine avec le Gouvernement l'accord UNEDIC.
Un mot, madame la députée, pour vous dire quand même que le flou et la confusion viennent peut-être plus des déclarations contradictoires des signataires eux-mêmes que du Gouvernement. En effet, avec mon collègue Laurent Fabius, nous avons, avant même la signature de l'accord, fait part aux partenaires sociaux de ce qui nous paraissait souhaitable et de ce qui pouvait garantir le droit des chômeurs. Nous l'avons dit avant même que commence la discussion et entre les deux accords.
De M. Deleu, qui nous dit il y a trois jours que rien n'a changé entre les deux accords, ou de Mme Notat qui nous dit que des pas considérables ont été réalisés, qui sème la confusion ? Quand je lis un très bel article de Mme Notat dans Le Monde sur l'accompagnement des chômeurs - je l'approuve, et je veux bien le cosigner, des deux mains ! - et quand je ne vois rien dans l'accord qui corresponde, là encore, qui sème la confusion ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Si effectivement ce que l'on veut, c'est mieux indemniser les chômeurs, c'est mieux les accompagner, il ne faut pas que la quasi-totalité des excédents aille vers des baisses de cotisations et il ne faut pas faire pression sur les chômeurs pour qu'ils acceptent n'importe quel emploi. Il faut financer le PARE - plan d'aide au retour à l'emploi -, c'est-à-dire des dépenses d'accompagnement et de formation, et il faut, madame Catala - je pense que vous y serez sensible -, quand on a 90 à 100 milliards d'excédents, que l'on n'en dépense pas 130 ! Voilà la logique du Gouvernement.
M. Jean-Paul Charié. C'est nouveau !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Mais je crois, peut-être comme vous, que la raison doit toujours l'emporter. Et ce n'est pas au moment où nous sommes d'accord sur les objectifs et où nous avons de l'argent que nous pouvons nous satisfaire de ce désaccord entre des discours et une pratique. Et je travaillerai jusqu'au dernier moment...
M. Yves Fromion et plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. C'est quand le dernier moment ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... sur les consignes du Premier ministre pour qu'un texte puisse être écrit qui protège et accompagne mieux les chômeurs, baisse les cotisations et clarifie les rapports entre l'Etat et l'UNEDIC. (Exclamation sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe démocratie libérale et Indépendants.)
Ainsi vous verrez que le progrès social et le progrès économique y gagneront. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur plusieurs bancs du groupe communiste et sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
RPR 11 REP_PUB Ile-de-France O