Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Analyse : |
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Texte de la REPONSE : |
«M. Louis de Broissia appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur l'implantation d'une salle de cinéma multiplexe à Quétigny en Côte-d'Or. Elle connaît bien ce dossier et n'est pas sans savoir l'inquiétude que représente ce projet pour les différents partenaires concernés par la situation du cinéma, à Dijon, et plus particulièrement par l'avenir du cinéma «art et essai» L'Eldorado. Cette implantation, rejetée dans un premier temps par la commission départementale puis acceptée par la commission nationale, sans que les intervenants locaux aient été consultés, menace non seulement l'animation du centre-ville de Dijon, qui sera alors déserté par les jeunes étudiants qui viennent de la périphérie, pour aller au cinéma, mais également le cinéma L'Eldorado à Dijon. Spécialiste «art et essai», L'Eldorado craint, devant la prévisible désaffection du public, la diffusion de ce genre cinématographique par les autres cinémas de Dijon désireux de compenser des pertes de fréquentation. Devant ces circonstances, Mme le ministre a désigné, en janvier dernier, un médiateur en la personne du directeur de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) afin d'engager un tour de table des différents intervenants sur ce dossier. Aujourd'hui, l'évolution de ce dossier ne manque pas de préoccuper les partenaires dijonnais. C'est pourquoi M. de Broissia souhaiterait connaître précisément l'état des discussions engagées par le directeur de la DRAC, les conclusions auxquelles cette mission l'ont conduit, et enfin quelle suite sera réservée à ce dossier d'importance.» La parole est à M. Louis de Broissia, pour exposer sa question. M. Louis de Broissia. Permettez-moi d'abord, monsieur le président, de me féliciter de l'élection de notre amie Nicole Catala à la vice-présidence de l'Assemblée. Quant à la question que je souhaite poser à Mme le ministre de la culture et de la communication, elle relève de l'actualité locale bourguignonne, plus particulièrement dijonnaise. Madame le ministre, vous connaissez le dossier de l'ensemble des salles de cinéma et de la création des multiplexes. Je crois d'ailleurs savoir qu'en tant qu'élue strasbourgeoise vous avez été confrontée à des problèmes identiques à ceux que je vais évoquer. Ainsi, vous pouvez mesurer l'inquiétude que suscite le projet d'installation d'un très grand multiplexe dans une commune périphérique de Dijon, à côté du campus de l'université de Bourgogne, qui reçoit 30 000 étudiants, et alors même que Dijon abrite un très vieux cinéma d'art et d'essai, L'Eldorado, qui est une des gloires de la culture dijonnaise. L'ensemble des élus et des partenaires de la vie associative est particulièrement inquiet de la procédure qui a permis l'aboutissement favorable, pour le moment en tout cas, du dossier. La commission départementale d'équipement cinématographique a, dans un premier temps, rejeté la demande, qui a, dans un deuxième temps, été acceptée par la commission nationale d'équipement commercial, suivant en cela l'esprit et la règle de la loi. Les intervenants locaux n'ont pas été consultés sur cette installation, qui pourrait menacer l'animation du centre-ville de Dijon, lequel risquerait d'être déserté par les milliers de jeunes qui sortent de leur campus situé sur les hauteurs de la ville pour se rendre, notamment, dans des cinémas d'art et d'essai. L'Eldorado, ce grand spécialiste national d'art et d'essai, craint une désaffection de son public, puisque les autres salles du centre-ville auraient le même genre de programmation. Je vous avais saisie de la situation, madame le ministre, et un membre de votre cabinet a bien voulu me recevoir. Vous avez désigné, au mois de janvier dernier, un médiateur en la personne du directeur régional des affaires culturelles. Nous attendons ses conclusions. Je souhaite que vous me répondiez non pas simplement quant au respect de la règle de la loi, mais aussi quant au respect de son esprit. Selon une formule que vous connaissez bien, la règle tue, la lettre tue, mais l'esprit vivifie. M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Louis de Broissia, je vous remercie de me poser une telle question, qui traduit l'inquiétude que ressentent de nombreux élus face au développement de projets de multiplexes. Ces installations peuvent en effet remettre en question l'équilibre de l'exploitation des salles d'art et d'essai ou de salles plus petites que les grands ensembles de distribution cinématographique. Le projet de multiplexe à Quétigny, dans la banlieue de Dijon, prévoit douze salles et 2 368 fauteuils. Il a été rejeté par la commission départementale d'équipement cinématograhique le 21 juillet 1997, par trois voix pour, deux contre et deux abstentions.Un recours a ensuite été formé par trois des membres de la commission départementale d'équipement cinématographique afin que le dossier soit examiné par la commission nationale d'équipement commercial. Cette commission s'est réunie le 4 novembre dernier et a rendu un avis favorable. Je regrette qu'aucune demande d'audition autre que celle du maire de Quétigny n'ai été déposée auprès de la commission nationale dans les trois mois et demi qui ont séparé la réunion de la commission départementale d'équipement cinématographique de celle de la commission nationale d'équipement commercial. Il est en effet souhaitable que les élus ou les représentants d'association concernés par un projet de multiplexe puissent être, dans leur ensemble, entendus par la commission nationale après avoir manifesté le souhait de l'être. Je sais que la construction d'un nouvel équipement à Quétigny va rendre délicate l'exploitation des salles à Dijon. Toutefois, compte tenu du nombre et du poids relatif des différents exploitants, on ne peut parler dans cette agglomération de risque d'abus de position dominante de l'un ou de l'autre des opérateurs. J'ai cependant voulu engager une démarche afin de préserver l'existence et l'activité de L'Eldorado, en demandant à M. Michel Clément, directeur régional des affaires culturelles de Bourgogne, de réunir les différentes parties pour parvenir à un accord tout en sauvegardant dans les meilleures conditions l'exploitation «art et essai» dans la ville de Dijon. J'ai par ailleurs souhaité introduire, dans la réforme des aides à l'exploitation, une modification favorisant les exploitants indépendants et, en particulier, les petites salles telles que les salles d'art et d'essai: les salles de cinéma multiplexes pourraient contribuer d'une manière plus importante au financement de ce soutien, ce qui aboutirait à un rééquilibrage en faveur des exploitants indépendants et des salles d'art et d'essai. J'ai également, tenant compte des problèmes posés par les projets de multiplexes, souhaité que le seuil de 1 500 places soit abaissé à 1 000. Cette disposition devrait être votée incessamment par le Parlement. Dans l'attente du résultat des négociations et de la médiation engagée par M. Clément, je resterai en contact avec les élus locaux et vous-même, monsieur le député, qui êtes en quelque sorte le porte-parole des élus de Dijon. M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia. M. Louis de Broissia. Madame le ministre, je vous remercie d'abord de suivre avec beaucoup d'attention ce dossier tant au plan départemental qu'au plan national. La question importante est en effet celle du seuil. Au-delà de 1 500 places, une grande agglomération comme celle de Dijon peut être déstabilisée, surtout lorsque le public fréquentant les salles de cinémas est très jeune, comme c'est le cas dans les villes universitaires. Il y a un risque de «ghettoïsation», si ce néologisme m'est accordé, des jeunes qui, installés dans des campus à l'extérieur de la cité, recevront une culture cinématographique également à l'extérieur et se rendront dans des fast-food, toujours à l'extérieur. Ce n'est pas de cette façon que l'on intégrera les jeunes étudiants de l'université de Bourgogne dans la capitale des ducs de Bourgogne. Je vous le répète, madame le ministre, la lettre de la loi a été indubitablement respectée. Mais son esprit a été sans aucun doute oublié. M. le président. Mon cher collègue, «ghettoïsation» vous sera accordé. Quant à fast-food, c'est moins sûr. (Sourires.) La parole est à Mme la ministre. Mme la ministre de la culture et de la communication. Monsieur de Broissia, nous n'avons aujourd'hui aucune possibilité d'introduire des contraintes en matière de programmation. Mais le bon équilibre des choses veut que l'on retienne l'offre cinématographique d'une agglomération dans son ensemble et non pas des communes prises séparément. Nous distribuerons un guide aux élus amenés à prendre des décisions lorsqu'ils sont sollicités pour l'implantation de salles multiplexes. Ces équipements doivent être considérés non seulement eu égard à l'équilibre de l'offre cinématographique dans les centres-villes, dans la périphérie et à l'échelle départementale, mais aussi eu égard à l'offre culturelle dans les autres disciplines artistiques, telles que le théâtre, l'opéra et la musique. En effet, je considère que ces équipements sont des équipements culturels. Il importe en conséquence de ne pas les placer à part et de les intégrer dans les réseaux d'activité culturelle. Même s'il s'agit de lieux privés, leurs tarifications et leurs programmations comme les déplacements qu'ils supposent comptent dans la vie locale: ils peuvent désagréger, contribuer à désagréger ou, à tout le moins, fragiliser le tissu de l'offre culturelle locale. |