FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 2312  de  M.   Liberti François ( Communiste - Hérault ) QG
Ministère interrogé :  Premier Ministre
Ministère attributaire :  Premier Ministre
Question publiée au JO le :  18/10/2000  page :  6862
Réponse publiée au JO le :  18/10/2000  page :  6862
Rubrique :  chômage : indemnisation
Tête d'analyse :  régime d'assurance chômage
Analyse :  réforme
DEBAT : M. le président. La parole est à M. François Liberti.
M. François Liberti. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Les dernières tractations portant sur la réforme de l'assurance chômage ont une fois de plus montré l'intransigeance du patronat français. Destiné de nouveau à arracher l'agrément du Gouvernement, ce compromis de dernière minute a un goût d'autant plus amer qu'il fut trouvé lors de la journée mondiale du refus de la misère.
Bien qu'il ne soit pas encore à la disposition de tous les partenaires sociaux, le texte de ce projet de convention semble s'attacher davantage à satisfaire les exigences financières du MEDEF qu'à répondre véritablement aux attentes sociales des chômeurs. C'est pourquoi les députés communistes réaffirment leur souhait de voir s'instaurer un débat citoyen, qui permettrait à tous ceux, sans exclusion, qui sont privés d'emploi, d'accéder à une meilleure indemnisation.
Cette meilleure prise en charge doit s'accompagner d'une consolidation du dispositif de reclassement et d'une formation choisie de qualité, seuls garants d'un retour à l'emploi efficace. Rappelons-le une fois encore, 41 % seulement des chômeurs sont aujourd'hui indemnisés par l'UNEDIC, les autres relevant uniquement de la solidarité nationale. C'est pourquoi nous continuons à juger nécessaire une extension de la couverture, une réduction de la période de référence pour l'indemnisation, toujours fixée à quatre mois de cotisations sur les dix-huit derniers mois, ainsi que la non-dégressivité des allocations chômage. La grande loi d'ensemble, pour refondre l'UNEDIC dans le progrès social, que nous exigeons doit donc aller dans le sens de l'affectation de nouveaux moyens massifs de financement et non vers la réduction des cotisations sociales que les employeurs rattachent à la baisse du coût du travail.
Monsieur le Premier ministre, dans un contexte d'excédent des caisses de l'UNEDIC, et face au MEDEF, qui, tout en agitant le spectre d'une prétendue étatisation, se satisfait d'écarter la représentation syndicale majoritaire et persiste à jouer au chantage pour clarifier, sur le dos des chômeurs, ses relations financières avec l'Etat, quelles garanties comptez-vous mettre en oeuvre pour faire échouer cette nouvelle tentative dont nous nous accordions tous à dire, jusqu'à présent, qu'elle restait dangereuse pour l'égalité et la liberté des chômeurs dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur divers bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, lorsque le MEDEF a proposé aux organisations syndicales, dès le début de 1999, d'ouvrir plusieurs chantiers de négociation, et que celles-ci ont accepté, le Gouvernement a accueilli cette initiative avec intérêt.
M. Yves Bur. Avec méfiance !
M. le Premier ministre. Nous sommes en effet favorables à une démarche contractuelle. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Thierry Mariani. On voit le résultat !
M. André Santini. L'exercice est difficile, monsieur le Premier ministre !
M. le Premier ministre. Dans le même temps, le Gouvernement a rappelé aux partenaires sociaux, et notamment au patronat, qu'il aurait, le moment venu, son mot à dire. Dans le domaine de compétence du législateur, les propositions sont sans doute les bienvenues, mais c'est au Gouvernement et au Parlement qu'il appartient de décider en dernier ressort. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Thierry Mariani. Martine n'est pas d'accord !
M. Lucien Degauchy. Démagogie !
M. le Premier ministre. Dans le cas de l'assurance chômage, le Gouvernement, par la voix de Martine Aubry et de Laurent Fabius, a fait part très tôt de ses inquiétudes sur certaines propositions en discussion, et notamment sur le risque de la mise en place d'un système à double vitesse dans l'aide à la recherche d'un emploi. Les ministres ont rappelé la nécessité de trouver un accord financièrement équilibré englobant une nécessaire clarification des relations entre l'Etat et l'UNEDIC. Mais ces mises en garde n'ont pas été entendues par les signataires de l'accord du 14 juin et de la convention du 29 juin conclus entre le patronat et deux organisations syndicales.
M. Yves Bur. Excellente convention !
M. le Premier ministre. Si le Gouvernement partageait certains des objectifs affichés, comme le développement d'une aide personnalisée aux demandeurs d'emploi, il a dû constater à l'époque que les dispositions concrètes de la convention ne coïncidaient pas avec ces objectifs et, pour certaines d'entre elles, comportaient des risques importants pour les chômeurs. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Le Gouvernement a donc logiquement refusé son agrément à ce texte et appelé les partenaires sociaux à le renégocier.
Le nouveau texte, présenté le 23 septembre avec une organisation syndicale signataire de plus...
M. Thierry Mariani. Laquelle ?
M. Jacques Godfrain. Citez-la !
M. le Premier ministre. ... a apporté certaines évolutions, en particulier en termes de couverture chômage. Mais il n'a pas répondu pleinement aux objections du Gouvernement,...
M. Christian Jacob. De la majorité plurielle ?
M. le Premier ministre. ... notamment sur la question des sanctions et de l'équilibre financier.
M. Thierry Mariani. Démago !
M. le Premier ministre. Mme Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a donc repris, avec l'énergie et la détermination qu'on lui connaît (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) les discussions avec les organisations signataires et non signataires. Elle leur a fait clairement connaître les objections du Gouvernement en cherchant à aboutir à une solution négociée permettant d'envisager l'agrément du Gouvernement et donc d'éviter une action par décret.
C'est à ce stade des discussions qu'elle m'a demandé, le week-end dernier, d'intervenir personnellement, notamment auprès du président du MEDEF. (Exclamations et rires sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Thierry Mariani. Zorro est arrivé !
M. Christian Jacob. Et les chevilles, ça va ?
M. le Premier ministre. Ce sont des choses que vous ne faisiez pas quand vous étiez aux responsabilités. Et aujourd'hui, vous n'avez rien à faire si ce n'est critiquer et vous diviser ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Je suis intervenu, non pour négocier ou pour passer un accord qui n'est pas de ma compétence, mais pour éclairer les parties concernées sur les conditions qui permettraient au Gouvernement d'envisager un agrément, ce qui est de ma responsabilité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Christian Jacob. Mégalo !
M. le Premier ministre. Parmi ces conditions, il y a notamment le refus du Gouvernement d'accepter une modification du régime légal et réglementaire de contrôle et de sanctions des chômeurs. Celui-ci ne doit pas être un instrument de culpabilisation ou de chantage vis-à-vis des demandeurs d'emploi et il ne peut relever pour nous que du service public de l'emploi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) En particulier, il doit être clair que le refus de signer tel ou tel document ne saurait constituer en soi un motif de suppression des allocations. (Mêmes mouvements.)
Il semble aujourd'hui que les choses bougent («Ah !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et que les organisations signataires du précédent accord soient prêtes désormais à prendre en compte ces exigences et à présenter un nouveau texte. C'est l'ensemble des organisations syndicales et professionnelles qui doit être réuni pour en discuter, chaque organisation devant avoir la possibilité de faire valoir son point de vue. Le Gouvernement sera attentif au respect de cette procédure. Il examinera le nouveau texte proposé après qu'aura eu lieu une telle rencontre.
Dans cette affaire, le Gouvernement est constamment resté fidèle à ses principes. (Exclamations sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. André Santini. Ca c'est sûr !
M. le Premier ministre. Il respecte le dialogue social, mais il est aussi le garant de l'intérêt général, le gardien vigilant des droits des salariés et des chômeurs. Il a refusé ce qui ne pouvait être accepté et a recherché une issue par la négociation. Beaucoup la jugeaient impossible. Nous sommes - espérons-le - en passe de la trouver. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)
M. Thierry Mariani. Cette réponse était bien longue, monsieur le président !
M. le président. J'ai considéré que le sujet était suffisamment important pour justifier une réponse un peu plus longue que d'habitude. Mais chacun apprécie comme il l'entend.
M. Thierry Mariani. C'est le RPR qui va en subir les conséquences puisque c'est le dernier à intervenir aujourd'hui !
COM 11 REP_PUB Languedoc-Roussillon O