FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 23624  de  M.   Dominati Laurent ( Démocratie libérale et indépendants - Paris ) QE
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  11/01/1999  page :  157
Réponse publiée au JO le :  15/03/1999  page :  1602
Rubrique :  hôtellerie et restauration
Tête d'analyse :  établissements
Analyse :  racolage commercial. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Laurent Dominati fait part à M. le ministre de l'intérieur de l'inquiétude des habitants des quartiers de Paris à très forte concentration d'établissements de restauration ou de cafés de nuit, devant une jurisprudence récente annulant la fermeture administrative de certains d'entre eux pour « racolage d'une clientèle commerciale sur la voie publique », en violation des dispositions de l'arrêté du préfet de police du 26 juin 1933, texte qui, selon l'appréciation juridictionnelle, « n'étant pas au nombre des lois et règlements relatifs aux débits de boisson et restaurants, ne peut, en tout état de cause, servir de fondement à une mesure administrative de fermeture d'un restaurant ». En posant qu'un arrêté de fermeture d'un commerce de ce type ne pourrait être prononcé qu'en vertu de l'article L. 62 du code des débits de boissons et des mesures de lutte contre l'alcoolisme, les décisions de justice en question rendent pratiquement inapplicable, pour toute une catégorie de professionnels, la sanction du racolage commercial sur la voie publique. Il lui demande donc, dans ces conditions, de bien vouloir lui indiquer si elle considère que le racolage commercial de la part d'exploitants de cafés ou de restaurants peut aussi donner lieu à des pratiques attentatoires à la tranquillité des citoyens, comme à l'ordre, à la santé ou à la moralité publics et si ces pratiques doivent, à ce titre, être sanctionnées, quelle que soit la qualité ou l'activité professionnelle des auteurs.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire appelle l'attention du ministre de l'intérieur sur les désagréments causés aux habitants de certains quartiers de Paris par des pratiques liées à l'exploitation d'établissements de restauration et de débits de boissons fonctionnant la nuit. L'arrêté du préfet de police du 26 juin 1933, auquel se réfère l'auteur de la question, vise à interdire l'interpellation des passants par les commerçants. Il précise en outre que « les infractions au présent arrêté seront constatées par des procès-verbaux ou des rapports qui seront transmis aux tribunaux compétents ». Il est vrai qu'un tel arrêté ne saurait servir de fondement à l'intervention d'une mesure prononçant la fermeture administrative d'un établissement commercial. Un tel acte administratif ne peut, en effet, que rappeler que les excès constatés donneront lieu à la saisine de la juridiction compétente à laquelle il appartient d'examiner les suites à réserver à chaque affaire dont elle est ainsi saisie. Quant à la suspension, même provisoire, de l'exercice d'une liberté publique, elle ne saurait résulter que de l'application d'un texte de nature législative. Ainsi est-ce à juste titre que l'honorable parlementaire mentionne la disposition législative du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme (art. L. 62 issu de l'ordonnance n° 59-107 du 7 janvier 1959) qui constitue le fondement juridique des mesures administratives de fermeture des débits de boissons. Telle est bien, au demeurant, la position de la Cour de cassation. La haute juridiction judiciaire a ainsi décidé que l'arrêté du préfet de police qui prévoit que les dérives auxquelles pouvaient donner lieu certaines pratiques commerciales seraient, après constatations par procès-verbaux, « transmises aux tribunaux compétents » et qui laisse donc le soin à ces derniers de prononcer les mesures appropriées, est légal (Cass. Crim. 8 avril 1992). La même juridiction a pu préciser qu'un tel arrêté du préfet de police ne pouvait servir de fondement à l'intervention d'une mesure de fermeture administrative. L'article L. 62 précité dispose que « la fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée » par arrêté pour une durée n'excédant pas six mois, soit à la suite d'infraction aux lois et règlements relatifs à ces établissements, soit en vue de préserver l'ordre, la santé ou la moralité publics. Les décisions prises sur le fondement de ce texte législatif sont susceptibles d'être déférées devant le juge administratif qui procède à un contrôle approfondi des circonstances de chaque espèce et notamment de l'adéquation entre les troubles à l'ordre, la santé ou la moralité publics invoqués et la mesure administrative adoptée. En ce qui concerne la notion de « racolage », celle-ci figure au code pénal dans le sens précis de « racolage d'autrui en vue de l'inciter à des relations sexuelles » (art. L. 625-8 de ce code). En revanche, aucun texte ne comporte l'expression « racolage commercial ». Dans ces conditions, le problème soulevé par l'honorable parlementaire doit être appréhendé au regard de la notion de « trouble à la tranquillité publique ». A cet égard, le maire et, à Paris, le préfet de police détiennent, en application des dispositions du code général des collectivités territoriales, un certain nombre de prérogatives en matière de police municipale, laquelle comprend « le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes acccompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits, y compris les bruits de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ». Pour autant, l'intervention des mesures administratives ne peut prendre la forme d'une interdiction de caractère général et absolu, mais, au contraire, viser une situation particulière et bien entendu mentionner de façon précise les éléments de fait et de droit qui ont rendu son édiction nécessaire.
DL 11 REP_PUB Ile-de-France O