FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 246  de  M.   Mitterrand Gilbert ( Socialiste - Gironde ) QOSD
Ministère interrogé :  santé
Ministère attributaire :  santé
Question publiée au JO le :  25/03/1998  page :  2099
Réponse publiée au JO le :  01/04/1998  page :  2224
Rubrique :  fonction publique hospitalière
Tête d'analyse :  contractuels
Analyse :  concours internes. accès
Texte de la QUESTION : Consécutivement à l'accord national conclu le 14 mai 1996 entre le ministre de la fonction publique et la majorité des syndicats de la fonction publique, un cadre juridique dérogatoire a été arrêté en vue de résorber l'emploi précaire dans les trois fonctions publiques. La loi du 16 décembre 1996 et, notamment, le décret du 25 avril 1997 précisent le cadre juridique propre à la fonction publique hospitalière et les modalités des ouvertures de concours. Ainsi, jusqu'en décembre de l'an 2000, des concours réservés peuvent être ouverts, à l'échelon départemental, au bénéfice des agents contractuels exerçant depuis quatre années des fonctions permanentes normalement dévolues à des agents titulaires. Le texte prévoit l'établissement d'une liste d'aptitude départementale arrêtant, par ordre alphabétique et dans la limite du nombre de postes ouverts, les noms des agents déclarés admis à l'issue des épreuves. La loi dispose par ailleurs que les agents reçus sont recrutés par les établissements ayant ouvert des postes, quel que soit leur établissement d'origine. Si les objectifs de cette loi sont louables et doivent être encouragés, il semblerait que dans un certain nombre de cas, les personnels de certains établissements hospitaliers n'aient pas toujours intérêt à recourir à ce dispositif. Prenons l'exemple d'un centre hospitalier de Libourne. D'un point de vue théorique, ce centre hospitalier a la possibilité d'offir au concours onze postes dans le grade d'agent administratif et 2 postes dans celui de secrétaire médicale, et ce, sans amputer ses crédits de remplacement. Une vingtaine d'agents contractuels de cet hôpital réunissent les conditions requises pour concourir. Une vingtaine à Libourne, certes, mais plusieurs centaines au CHU de Bordeaux ! Le rapport entre le nombre de candidats potentiels au concours fait statistiquement peser une lourde incertitude sur les personnels contractuels de l'hôpital ayant pris l'initiative d'ouvrir ces postes. On aboutit alors au paradoxe selon lequel la lutte contre la précarité de l'emploi dans un hôpital comme Libourne se traduira, inévitablement ou presque, par la perte de l'emploi pour un certain nombre de ses agents contractuels. Cet exemple, qui n'est pas isolé, explique le peu de résultats obtenus par cette loi. A partir de ces données, M. Gilbert Mitterrand demande à M. le secrétaire d'Etat à la santé si l'on peut envisager, une modification des modalités d'ouverture des concours dans la fonction publique hospitalière de nature à surmonter cet obstacle légitime.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Gilbert Mitterrand a présenté une question, n° 246, ainsi rédigée:
«Consécutivement à l'accord national conclu le 14 mai 1996 entre le ministre de la fonction publique et la majorité des syndicats de la fonction publique, un cadre juridique dérogatoire a été arrêté en vue de résorber l'emploi précaire dans les trois fonctions publiques. La loi du 16 décembre 1996 et, notamment, le décret du 25 avril 1997 précisent le cadre juridique propre à la fonction publique hospitalière et les modalités des ouvertures de concours. Ainsi, jusqu'en décembre de l'an 2000, des concours réservés peuvent être ouverts, à l'échelon départemental, au bénéfice des agents contractuels exerçant depuis quatre années des fonctions permanentes normalement dévolues à des agents titulaires. Le texte prévoit l'établissement d'une liste d'aptitude départementale arrêtant par ordre alphabétique et dans la limite du nombre de postes ouverts les noms des agents déclarés admis à l'issue des épreuves. La loi dispose par ailleurs que les agents reçus sont recrutés par les établissements ayant ouvert des postes, quel que soit leur établissement d'origine. Si les objectifs de cette loi sont louables et doivent être encouragés, il semblerait que, dans un certain nombre de cas, les personnels de certains établissements hospitaliers n'aient pas toujours intérêt à recourir à ce dispositif. Prenons l'exemple du centre hospitalier de Libourne. D'un point de vue théorique, ce centre hospitalier a la possibilité d'offrir au concours onze postes dans le grade d'agent administratif et deux postes dans celui de secrétaire médicale, et ce sans amputer ses crédits de remplacement. Une vingtaine d'agents contractuels de cet hôpital réunissent les conditions requises pour concourir. Une vingtaine à Libourne, certes, mais plusieurs centaines au CHU de Bordeaux ! Le rapport entre le nombre de postes ouverts et le nombre de candidats potentiels au concours fait statistiquement peser une lourde incertitude sur les personnels contractuels de l'hôpital ayant pris l'initiative d'ouvrir ces postes. On aboutit alors au paradoxe selon lequel la lutte contre la précarité de l'emploi dans un hôpital comme Libourne se traduira, inévitablement ou presque, par la perte de l'emploi pour un certain nombre de ses agents contractuels. Cet exemple, qui n'est pas isolé, explique le peu de résultat obtenu par cette loi. A partir de ces données, M. Gilbert Mitterrand demande à M. le secrétaire d'Etat à la santé si l'on peut envisager une modification des modalités d'ouverture des concours dans la fonction publique hospitalière de nature à surmonter cet obstacle légitime.»
La parole est à M. Gilbert Mitterrand, pour exposer sa question.
M. Gilbert Mitterrand. C'est un plaisir pour moi que d'interroger M. le secrétaire d'Etat, qui connaît bien Libourne et son hôpital: mais ma question est plus large et porte sur la résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique hospitalière. Tel est l'objectif de la loi de 1996 dont le décret de 1997 précise le cadre juridique.
Selon la loi, il reste encore trois ans pour ouvrir des concours au bénéfice des agents contractuels remplissant les conditions requises. Titulariser est, évidemment, la meilleure façon de lutter contre l'emploi précaire dans la fonction publique. Or peu d'hôpitaux semblent disposés à ouvrir ces concours.
Il y a peut-être plusieurs raisons; j'en citerai deux, prises sur le terrain, à Libourne. D'abord ce concours est départemental; surtout les reçus sont présentés dans l'ordre alphabétique, non dans celui des notes. Le risque est donc grand d'être reçu au concours, mais de perdre son poste, sur lequel on était contractuel, au profit d'un autre contractuel, lui aussi reçu au concours, venant d'un autre hôpital du département. Ce risque est d'autant plus grand qu'est importante la disproportion entre le nombre de postes ouverts au concours dans un hôpital et le nombre de candidats potentiels dans le département. J'insiste d'autant moins sur ce point que le concours départemental est déjà une dérogation puisque les concours sont d'habitude nationaux.
Surtout, dans un département, un centre hospitalier, qui par sa taille écrase les autres, ne peut qu'être avantagé par l'ouverture d'un concours; cet avantage est encore aggravé par le classement alphabétique des reçus. De par sa masse, il emploie beaucoup plus de candidats au concours que les petits hôpitaux. Voilà pourquoi finalement les petits hôpitaux n'ouvrent pas de concours qui aboutirait, pour titulariser quelqu'un qui occupe depuis quatre ans un emploi permanent, à lui faire perdre son emploi. Quand le gros hôpital est à 30, 40 ou 50 kilomètres, la situation n'est pas la même qu'en région parisienne où il suffit de changer de quartier pour retrouver son emploi.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette loi pour la résorption de l'emploi précaire a-t-elle atteint ses objectifs ? Si ce n'est pas le cas, dans quelle direction accepteriez-vous de la modifier pour lever les obstacles constatés, soit en abandonnant les listes départementales, soit en abandonnant le classement alphabétique, soit en autorisant les directeurs d'établissement à choisir les reçus sur la liste alphabétique ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le député, vous me plongez dans l'embarras ! J'ai bien compris qu'un établissement plus important que celui auquel vous avez fait allusion, à 30 kilomètres de Libourne, risquait de constituer un pôle d'attraction miroir aux alouettes !
Je comprends bien que la liste alphabétique des résultats pénalise, d'une certaine manière, ceux qui bénéficiaient déjà d'un poste dit de proximité.
La loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 dans ses articles 8 à 10 a défini l'organisation des concours réservés pour la résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique hospitalière. Le problème que vous soulevez, monsieur le député, concerne l'inadéquation entre le nombre de postes déclarés au concours au niveau départemental et le nombre de candidats.
Cette situation entraîne, pour les établissements ouvrant des postes, d'une part, des incertitudes sur la réussite de leurs propres contractuels aux concours et, d'autre part, le risque de devoir recruter des agents d'autres établissements du département, ce qui peut conduire à licencier les contractuels qui occupaient les postes offerts aux concours dans l'établissement précis. La durée d'application du dispositif étant de quatre ans, il est donc difficile, dès la première année, de faire le bilan. En effet, l'année 1997 a été la première année de mise en oeuvre; des formations préparant aux concours ont été organisées et les concours ont eu lieu tardivement. Les agents non titulaires peuvent se présenter aux différents concours départementaux qui seront ouverts pendant la durée du plan de résorption. Il n'est pas envisageable de modifier, pour le moment, les dispositions législatives, faute, je l'ai dit, de bilan à ce jour.
Les objectifs du protocole de résorption de l'emploi précaire seront rappelés aux établissements publics de santé, assortis de préconisations, notamment en ce qui concerne la possibilité de transformer les crédits de remplacement en crédits permanents destinées à financer des postes.
Par ailleurs, le suivi du dispositif déjà assuré depuis 1997 nous oblige, à moins de changer la loi, à poursuivre ce bilan au moins pendant l'application du protocole.
Cette réponse risque de vous décevoir, mais je reconnais que cette préoccupation est tout à fait légitime pour les établissements hospitaliers.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Mitterrand.
M. Gilbert Mitterrand. Monsieur le secrétaire d'Etat, l'hôpital de Libourne - c'est un exemple parmi d'autres - aurait réellement souhaité améliorer le bilan que vous attendez pour l'an 2000. Nous aurions, dès demain matin, treize postes à pourvoir. Nous n'ouvrirons pas de concours car nous ne voulons pas être contraints de licencier onze personnes au bénéfice de onze autres contractuels. C'est un risque que nous ne pouvons pas courir dans des bassins d'emploi assez restreints.
M. le secrétaire d'Etat à la santé. Je comprends.
M. Gilbert Mitterrand. Nous ne pourrons donc pas participer à la résorption de l'emploi précaire. Pourtant, croyez bien que ce serait notre voeu le plus cher.
SOC 11 REP_PUB Aquitaine O