FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 247  de  M.   Caresche Christophe ( Socialiste - Paris ) QOSD
Ministère interrogé :  santé
Ministère attributaire :  santé
Question publiée au JO le :  25/03/1998  page :  2100
Réponse publiée au JO le :  01/04/1998  page :  2227
Rubrique :  fonction publique hospitalière
Tête d'analyse :  durée du travail
Analyse :  personnels de nuit. réglementation
Texte de la QUESTION : Un mouvement de grève est actuellement en cours dans plusieurs hôpitaux de l'Assistance publique -hôpitaux de Paris (AP - HP) - Saint-Louis, Bichat... Cette action suivie par les personnels de nuit est consécutive à des désaccords profonds entre la direction et les intéressés quant aux modalités d'application des « accords Durieux » concernant les 35 heures de nuit. Ces modalités, précisées dans une note datée du 5 mai 1997, se traduisent dans les faits, non pas dans une réduction du temps de travail négociée lors du protocole Durieux, mais par un aménagement du temps de travail. Ces personnels de nuit des hôpitaux doivent travailler 35 heures hebdomadaires sur la base de dix heures par jour dont sept de travail et trois de récupération selon l'AP - HP et sur un planning de quatorze jours. Les trois heures de récupération sont réelles lorsque le travail est effectué, les agents sont alors bien en 35 heures. Mais lorsqu'ils sont absents (repos supplémentaire, maladie, accident de travail, enfants malades...), les trois heures de récupération disparaissent, faisant passer ces agents sous un nouveau régime supérieur à 35 heures. L'administration de l'AP - HP confond la notion de travail effectif avec la notion de travail effectué. Le personnel est débiteur de trois heures par jour d'absence. Il voit apparaître une notion de débit-crédit qui est le résultat d'une annualisation du temps de travail, annualisation qui n'est précisée par aucun texte, règlement ou accord, sauf pour le temps partiel, ce qui n'est pas le cas de figure. Le personnel refusant de plus en plus massivement l'application de la note du 5 mai, M. Christophe Caresche demande à M. le secrétaire d'Etat à la santé s'il pourrait envisager d'intervenir auprès de la direction générale de l'Assistance publique afin de procéder au retrait de cette note, dans le but de rouvrir de nouvelles négociations permettant d'aboutir à un résultat plus conforme à l'esprit des accords Durieux sur la réduction du temps de travail et de déboucher sur l'application effective des 35 heures.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Christophe Caresche a présenté une question, n° 247, ainsi rédigée:
«Un mouvement de grève est actuellement en cours dans plusieurs hôpitaux de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) (Saint-Louis, Bichat...). Cette action, suivie par les personnels de nuit, est consécutive à des désaccords profonds entre la direction et les intéressés quant aux modalités d'application des «accords Durieux» concernant les trente-cinq heures de nuit. Ces modalités, précisées dans une note datée du 5 mai 1997, se traduisent dans les faits, non pas par une réduction du temps de travail négociée lors du protocole Durieux, mais par un aménagement du temps de travail. Ces personnels de nuit des hôpitaux doivent travailler trente-cinq heures hebdomadaires sur la base de dix heures par jour dont sept de travail et trois de récupération selon l'AP-HP et sur un planning de quatorze jours. Les trois heures de récupération sont réelles lorsque le travail est effectué, les agents sont alors bien en trente-cinq heures. Mais lorsqu'ils sont absents (repos supplémentaire, maladie, accident de travail, enfants malades...), les trois heures de récupération disparaissent, faisant passer ces agents sous un nouveau régime supérieur à trente-cinq heures. L'administration de l'AP-HP confond la notion de travail effectif avec la notion de travail effectué. Le personnel est débiteur de trois heures par jour d'absence. Il voit apparaître une notion de débit-crédit qui est le résultat d'une annualisation du temps de travail, annualisation qui n'est précisée par aucun texte, réglement ou accord, sauf pour le temps partiel, ce qui n'est pas le cas de figure. Le personnel refusant de plus en plus massivement l'application de la note du 5 mai, M. Christophe Caresche demande à M. le secrétaire d'Etat à la santé s'il pourrait envisager d'intervenir auprès de la direction générale de l'Assistance publique afin de procéder au retrait de cette note dans le but de rouvrir de nouvelles négociations permettant d'aboutir à un résultat plus conforme à l'esprit des accords Durieux sur la réduction du temps de travail et de déboucher sur l'application effective des trente-cinq heures.»
La parole est à M. Christophe Caresche, pour exposer sa question.
M. Christophe Caresche. Monsieur le secrétaire d'Etat à la santé, un conflit oppose actuellement certaines catégories des personnels de l'Assistance publique et l'Assistance publique elle-même. Il concerne la mise en place du protocole d'accord adopté sous l'égide de M. Durieux, concernant les 35 heures que doivent effectuer notamment les infirmières qui travaillent la nuit.
Or, par une note datée du 5 mai 1997, l'Assistance publique est, en quelque sorte, revenue sur ses engagements en donnant le décompte assez technique de la durée du travail: les infirmières de nuit doivent travailler dix heures quotidiennes sur un planning de quatorze jours. L'administration considère que ces nuits de dix heures se décomposent en sept heures de travail et trois heures de récupération, ces dernières étant réelles lorsque le travail est effectué; les agents sont alors bien en 35 heures. Mais lorsqu'ils sont absents - repos supplémentaire, maladie, accident de travail, enfants malades - les trois heures de récupération disparaissent, faisant passer ces agents sous un nouveau régime supérieur à 35 heures.
Au moment où l'on discute des 35 heures pour tous, les infirmières de nuit se verraient paradoxalement imposer cette note, par un régime qui, dans les faits, se traduirait par une augmentation de leur temps de travail !
Cette question a soulevé une grande émotion. C'est pourquoi, je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous interveniez auprès de l'Assistance publique pour lui faire part de nos préoccupations. Il y a là matière à rouvrir les discussions. C'est en ce sens que je souhaitais vous poser ma question.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Votre question, monsieur le député, est tout à fait pertinente; elle illustre la difficulté d'adapter toute mesure sociale aux hôpitaux, où le travail est si particulier.
Ainsi, la réduction du temps de travail pour les agents exerçant la nuit est en partie motivée - et ce fut d'ailleurs une longue négociation - par la nécessité de prendre en compte la pénibilité du travail de nuit, en termes notamment de perturbation des rythmes biologiques, de difficultés d'organisation de la vie familiale et d'isolement professionnel.
Dans la pratique, à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, la durée du travail de nuit - qui devrait d'ailleurs théoriquement, si l'on se réfère à la réglementation actuelle, être de sept heures par vacation - prévoit des vacations de dix heures, vous l'avez dit, cela restant dans les limites prévues par l'ordonnance du 26 mars 1982 relative à l'organisation du travail dans la fonction publique hospitalière.
Par conséquent, chaque fois qu'un agent travaille de nuit, son établissement doit lui rendre trois heures, qu'il a effectuées en plus de l'horaire théorique.
Autrement dit, la compensation quotidienne conduisant, sur un planning, à offrir aux agents concernés un repos récupérateur de trois heures est conditionnée par l'exercice effectif des fonctions, cette notion étant synonyme de travail effectué.
Lorsque l'agent ne vient pas travailler, il ne peut naturellement bénéficier d'aucune récupération, mais son administration ne peut rien lui débiter, puisque son absence est couverte par un congé de maladie ou une autorisation d'absence.
Ainsi, il apparaît, monsieur le député, que l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris n'a pas remis en cause les accords Durieux de 1991 et, à ma connaissance, elle n'a donné aucune instruction visant à instaurer un système de «débit-crédit» - mais je me renseignerai davantage.
Cela dit, il est avéré que la pratique des horaires atypiques dans la fonction publique hospitalière suscite des difficultés d'application très grandes et d'interprétation diverses par rapport à la réglementation existante.
C'est pourquoi cette situation sera analysée par la mission que le Gouvernement vient de confier à M. Jacques Roché, dans la perspective de l'instauration des 35 heures dans la fonction publique - dans les trois fonctions publiques; mais nous n'en sommes pas là !
S'il apparaît que de nouvelles dispositions sont nécessaires, monsieur le député, j'entends bien en tenir compte et donc rénover le dispositif de la réglementation touchant à l'organisation et à l'aménagement du temps de travail dans la fonction publique hospitalière, qui intégrera la spécificité des fonctionnements.
Je le répète, la négociation fut longue et très difficile. L'Assistance publique - Hôpitaux de Paris est comme une ville très particulière ! Ce protocole a entraîné la création de plus de 6 000 emplois. Pourtant, le dispositif n'est pas encore satisfaisant, vous avez raison. Il nous faudra donc en tenir compte lors de la négociation future. Il s'agit là d'un milieu très spécifique qu'il faut manier avec précaution.
M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
M. Christophe Caresche. Voici, en fait, ce qui s'est passé: les choses allaient, semble-t-il, assez bien; on avait trouvé une forme de fonctionnement qui donnait satisfaction à la fois au personnel de l'Assistance publique et à ses responsables. Mais la note du 5 mai 1997 a voulu - du moins c'est ce que j'ai compris - préciser les choses, et ce faisant, elle a créé quelques problèmes. Cela dit, il n'est pas non plus satisfaisant qu'un mouvement de grève perdure ainsi.
L'Assistance publique pourrait envisager de revenir au régime qui prévalait avant ladite note, précisément dans la perspective, que vous avez indiquée, des initiatives qui vont être prises, et elle pourrait différer les décisions pendant ces quelques mois, puisque les choses devraient maintenant aller assez vite. Ce serait de nature à prouver une réelle compréhension des personnels et une intention de remettre sur la table certains éléments dans un cadre plus général. Si ce geste était fait, les choses iraient, je pense, dans le bon sens.
SOC 11 REP_PUB Ile-de-France O