FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 257  de  M.   Meylan Michel ( Union pour la démocratie française - Haute-Savoie ) QOSD
Ministère interrogé :  logement
Ministère attributaire :  logement
Question publiée au JO le :  01/04/1998  page :  2312
Réponse publiée au JO le :  08/04/1998  page :  2591
Rubrique :  gens du voyage
Tête d'analyse :  stationnement
Analyse :  réglementation
Texte de la QUESTION : M. Michel Meylan attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur l'article 28 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 qui impose aux communes de plus de 5 000 habitants de prévoir des terrains aménagés sur leur territoire pour assurer les conditions de passage et de séjour des gens du voyage. En application de ce texte, il appartient aux collectivités locales d'assurer le financement des frais de gestion et de fonctionnement des aires d'accueil. Selon le rapport du Sénat n° 283 de M. Jean-Paul Delevoye, le coût de fonctionnement peut être évalué à 20 000 francs par an et par place. Il représente une charge financière importante pour les communes qui se répercute, de facto, sur les impôts locaux de leurs contribuables. De même, le coût d'investissement d'une place est estimé à 100 000 francs et la contribution de l'Etat s'élève uniquement à 35 % des opérations d'aménagement. Or la prise en compte du mode de vie des gens du voyage relève de la solidarité nationale. Il appartient donc à l'Etat, et non aux seules collectivités locales, d'assurer les frais inhérents à l'accueil des nomades. Aussi conviendrait-il de confier aux offices HLM la construction sur des terrains cédés par les communes, ainsi que la gestion et le fonctionnement de ces aires aménagées. Il lui demande donc ce que le Gouvernement compte entreprendre en ce sens afin d'alléger la charge financière des collectivités locales concernées et de lever ainsi un des freins à l'émergence d'aires d'accueil des gens du voyage.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Michel Meylan a présenté une question, n° 257, ainsi rédigée:
«M. Michel Meylan attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur l'article 28 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990, qui impose aux communes de plus de 5 000 habitants de prévoir des terrains aménagés sur leur territoire pour assurer les conditions de passage et de séjour des gens du voyage. En application de ce texte, il appartient aux collectivités locales d'assurer le financement des frais de gestion et de fonctionnement des aires d'accueil. Selon le rapport du Sénat n° 283 de M. Jean-Paul Delevoye, le coût de fonctionnement peut être évalué à 20 000 francs par an et par place. Il représente une charge financière importante pour les communes, qui se répercute, de facto, sur les impôts locaux de ses contribuables. De même, le coût d'investissement d'une place est estimé à 100 000 francs et la contribution de l'Etat s'élève uniquement à 35 % des opérations d'aménagement. Or la prise en compte du mode de vie des gens du voyage relève de la solidarité nationale. Il appartient donc à l'Etat, et non aux seules collectivités locales, d'assurer les frais inhérents à l'accueil des nomades. Aussi conviendrait-il de confier aux offices HLM la construction sur des terrains cédés par les communes, ainsi que la gestion et le fonctionnement de ces aires aménagées. Il lui demande donc ce que le Gouvernement compte entreprendre en ce sens afin d'alléger la charge financière des collectivités locales concernées et de lever ainsi un des freins à l'émergence d'aires d'accueil des gens du voyage.»
La parole est à M. Michel Meylan, pour exposer sa question.
M. Michel Meylan. Monsieur le secrétaire d'Etat au logement, l'article 28 de la loi du 31 mai 1990, relative au droit au logement, comporte l'obligation pour les communes de plus de 5 000 habitants d'aménager des aires d'accueil et de séjour pour les gens du voyage.
Les dispositions de l'article 28, nous les connaissons tous et vous, monsieur le secrétaire d'Etat, encore mieux que nous, puisque vous êtes l'auteur de cette loi.
Pour atténuer les réticences des communes à réaliser ces équipements, vous avez accordé aux maires, en contrepartie de leurs efforts financiers, la possibilité d'engager une procédure d'expulsion en cas d'occupation illicite d'un terrain communal ou privé. Maigre consolation quant on connaît les difficultés qu'ont les maires à mettre en oeuvre cette procédure !
Aujourd'hui, ma question ne concerne pas le renforcement des pouvoirs de police du maire, mais plutôt l'aspect financier de l'aménagement des aires d'accueil.
Les collectivités locales, seules ou dans un cadre intercommunal, doivent assurer le financement de l'aménagement de ces aires d'accueil, mais aussi les frais d'entretien et de fonctionnement.
Selon les chiffres avancés dans le rapport du sénateur Delevoye, la dépense est estimée à 100 000 francs en investissement et à 20 000 francs par an et par place en fonctionnement. Ces sommes font, bien entendu, réfléchir bien des maires.
Certes, dans le cadre du schéma départemental d'accueil des gens du voyage, les collectivités locales ont droit à une participation de l'Etat de 35 % pour les dépenses d'investissement, mais tout le monde s'accorde à dire que c'est peu au regard des sommes à investir.
Il est toujours facile, monsieur le secrétaire d'Etat, de transférer les responsabilités qui incombent à l'Etat sur les collectivités locales, sans se préoccuper des difficultés auxquelles elles sont confrontées pour trouver les recettes nécessaires et expliquer à leurs concitoyens l'augmentation des impôts locaux liée à ces dépenses, dépenses qui concernent uniquement une population en transit, dont le train de vie est parfois, en apparence, supérieur à celui de bon nombre de nos contribuables sédentaires, et qui ne prend pas toujours soin des équipements mis à sa disposition.
Trouvez-vous juste, monsieur le secrétaire d'Etat, de demander à nos contribuables, qui acquittent déjà leur taxe d'habitation avec difficulté en raison de la faiblesse de leur revenu, de participer, eux aussi, à la prise en compte du mode de vie de la communauté des gens du voyage ?
En outre, il est difficile d'évaluer les besoins en stationnement, car on ne connaît pas précisément le nombre de migrants. Selon le rapport de M. Delamon, la population itinérante et semi-sédentaire s'élevait en 1990 à 140 000 personnes. Pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d'Etat, combien de personnes composent aujourd'hui cette population de «nomades» ?
Il serait aussi intéressant de connaître, à partir des éléments fournis par les départements qui ont déjà élaboré des schémas d'accueil des gens du voyage, le coût financier annuel à la charge des collectivités locales.
Au-delà, il me semble que la prise en compte du mode de vie des gens du voyage et, notamment, la mise en oeuvre du droit au logement de cette population itinérante relève avant tout de la solidarité nationale. De ce fait, l'Etat devrait participer, plus qu'il ne le fait actuellement, à la réalisation des équipements.
Aussi, pour lever cette difficulté financière, ne pourrait-on confier aux offices HLM la question du logement des gens du voyage ? Ces organismes pourraient prendre en charge la réalisation ainsi que la gestion et le fonctionnement des aires de passage et de séjour des nomades.
Les collectivités locales peuvent participer à ces opérations, comme elles ont d'ailleurs l'habitude de le faire pour la réalisation des logements sociaux, en mettant par exemple à la disposition des offices HLM des terrains ou en garantissant des prêts.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quel est votre sentiment sur cette proposition qui permettrait de lever un des freins à la mise en place d'aires d'accueil des gens du voyage ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au logement.
M. Louis Besson. secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le député, vous avez noté que je connaissais bien l'existence de l'article 28 de la loi du 31 mai 1990. Rappelons cependant qu'il résultait d'une initiative parlementaire; le Gouvernement, pour sa part, souhaitait plutôt attendre les résultats de la mission confiée au préfet Delamon. Force est de reconnaître, à l'usage, que l'article 28 a été adopté dans des conditions quelque peu anticipées et qu'il ne résout pas tous les problèmes, comme le montre votre question.
Si l'article 28 fait bien obligation aux communes de plus de 5 000 habitants de prévoir des terrains aménagés pour le passage et le séjour des gens du voyage, celles-ci peuvent solliciter des moyens financiers pour les aider, tant en investissement qu'en fonctionnement.
Pour sa part, l'Etat subventionne en investissement les aires d'accueil à hauteur de 35 % de la dépense totale hors taxes, dans la limite d'un plafond par place. S'y ajoutent les financements du Fonds d'action sociale, qui peuvent aller jusqu'à 14 000 francs par emplacement; les autres partenaires - département, région, caisses d'allocations familiales - apportent également leurs concours financiers.
Ainsi, la part d'investissement supportée par la commune est généralement de l'ordre de 20 %, l'apport du terrain pouvant en représenter tout ou partie.
En ce qui concerne le fonctionnement, les bilans établis par les services de l'Etat et les gestionnaires montrent que, dès lors qu'une aire répond à une demande d'accueil des gens du voyage et est bien gérée, l'occupation est effective et les usagers s'acquittent d'une participation financière correspondant en moyenne à 25 % des coûts. Les 75 % restants proviennent généralement des subventions du ministère de l'emploi et de la solidarité, des caisses d'allocations familiales et, dans certains départements, des conseils généraux. Il reste à la charge des communes, en moyenne, entre 20 et 30 % du coût du fonctionnement.
Les gens du voyage, au nombre de 250 à 300 000, se répartissent en trois parties sensiblement égales: les itinérants, les semi-sédentaires et les sédentaires.
Pour ce qui est de l'intervention des organismes HLM, rien ne s'oppose, en l'état actuel des textes, à leur confier l'aménagement des aires. Cette compétence est de droit pour les OPAC. Les offices publics d'HLM le peuvent également sur le fondement d'une délibération de leur autorité locale de rattachement étendant leurs compétences à celles exercées par les OPAC, conformément à l'article L. 421-4, dernier alinéa, du code de la construction et de l'habitat, les sociétés anonymes d'HLM disposent également de cette compétence d'aménageur en vertu de l'article L. 422-2, alinéa 2 du même code. Toutefois, il s'agit d'un aménagement pour compte de tiers, les SA d'HLM doivent y avoir été préalablement autorisées par décision du préfet.
L'analyse des textes juridiques peut autoriser ces organismes à assurer la gestion d'aires aménagées. On peut s'interroger sur les compétences professionnelles nécessaires, qui ne sont pas au coeur des métiers de ces organismes. Néanmoins, ceux qui souhaitent intervenir dans ce domaine ne peuvent qu'y être encouragés. Mais il est bien évident que, faute de recettes couvrant l'intégralité des coûts de fonctionnement, les organismes HLM ne pourront intervenir qu'à titre de prestataires de service pour le compte des communes compétentes.
Le Gouvernement, monsieur le député, est conscient de la nécessité d'améliorer la situation. Des réflexions interministérielles et une concertation avec les associations des gens du voyage ont été engagées. Elles seront poursuivies et déboucheront, si besoin est, sur des modifications législatives pour accroître l'efficacité des dispositions prévues par l'article 28 de la loi du 31 mai 1990.
M. le président. La parole est à M. Michel Meylan.
M. Michel Meylan. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de ces précisions et de cette réponse techniquement bien élaborée. Il suffit maintenant d'un petit coup de pouce, d'une bonne circulaire pour mettre tout le monde au boulot. La loi, vous l'avez rappelé, découlait d'une initiative parlementaire; je n'ai pas de droit d'auteur. Vous êtes bien placé pour mettre tout le monde autour d'une table et vous pouvez compter sur mon soutien.
UDF 11 REP_PUB Rhône-Alpes O