Texte de la QUESTION :
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M. Jean Michel attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'application de l'article 116 du code de procédure pénale et son interprétation jurisprudentielle. Le texte, dans sa rédaction du 24 août 1993, contribue à assurer un dialogue équilibré et respectueux des droits de la défense entre le magistrat instructeur et la personne qu'il met en examen, en imposant au juge de « faire connaître expressément chacun des faits » pour lesquels la personne est mise en examen. Cependant, la jurisprudence procède à une interprétation minimaliste du texte qui le vide de son contenu et prive la défense de ses droits. Il arrive ainsi qu'une personne demeure des mois sans savoir exactement quels faits lui sont reprochés et sans pouvoir en conséquence faire valoir ses arguments. Il lui demande donc si des mesures pratiques indispensables au respect des droits de la défense sont envisagées pour renforcer l'article 116 du code de procédure pénale qui fait obligation au juge d'instruction de notifier précisément à tous les mis en examen les charges qui pèsent sur eux, c'est-à-dire en les obligeant, comme l'a voulu le législateur, à ne pas mentionner que l'incrimination retenue à leur encontre, mais également une description précise des faits dont ils sont personnellement auteurs et qui justifient cette incrimination.
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Texte de la REPONSE :
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la garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que la question qu'il évoque a été longuement examinée par le Gouvernement lors de la préparation du projet de loi renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 30 mars 1999. Certains préconisent en effet de renforcer les conditions et le formalisme de la mise en examen, notamment en demandant au juge d'instruction de motiver sa décision et en permettant de faire appel d'une mise en examen devant la chambre d'accusation. Il apparaît toutefois que de telles modifications de notre droit ne sont nullement souhaitables. En effet, depuis les réformes intervenues en 1993, les textes actuels, et notamment les premiers alinéas des articles 80-1 et 116 du code de procédure pénale, indiquent déjà de façon précise que le juge d'instruction ne peut mettre en examen une personne que s'il existe contre elle des indices de culpabilité et qu'il doit faire connaître expressément à cette personne chacun des faits dont il est saisi et pour lesquelles elle est mise en examen, ainsi que la qualification juridique de ces faits. Cette exigence est prescrite à peine de nullité et, contrairement à ce qu'indique l'honorable parlementaire, les chambres d'accusation n'hésitent pas à annuler des procédures qui ne respecteraient pas cette formalité, comme le rappelle une décision récente de la chambre d'accusation de Versailles, dont la presse s'est fait largement l'écho. Exiger une motivation de la mise en examen conduirait le juge à récapituler au surplus les différents indices qui pèsent contre la personne, et serait dès lors de nature à porter atteinte à sa présomption d'innocence, et à rendre plus difficile l'obtention ultérieure d'une décision de non-lieu. Cet inconvénient serait d'autant plus fort en cas d'appel, si la chambre d'accusation venait à confirmer la décision du juge d'instruction. C'est d'ailleurs pourquoi la quasi-totalité des organisations professionnelles d'avocats ont fait clairement connaître à Mme le garde des sceaux, qui les avait interrogés sur cette question précise, leur opposition à une telle réforme.
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