FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 26779  de  M.   Marlin Franck ( Rassemblement pour la République - Essonne ) QE
Ministère interrogé :  anciens combattants
Ministère attributaire :  anciens combattants
Question publiée au JO le :  15/03/1999  page :  1487
Réponse publiée au JO le :  31/05/1999  page :  3274
Rubrique :  anciens combattants et victimes de guerre
Tête d'analyse :  Afrique du Nord
Analyse :  revendications
Texte de la QUESTION : M. Franck Marlin attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur la situation des anciens combattants en Afrique du Nord (AFN). Ces derniers interviennent régulièrement auprès du Gouvernement et des représentants de la nation pour voir satisfaire des revendications qu'ils jugent légitimes au regard des services qu'ils ont rendu à la patrie. Il souhaite rappeler que les anciens d'AFN ont consacré une partie de leur jeunesse à leur pays. Ils ont servi avec bravoure, souvent au péril de leur vie dans des conditions difficiles. Le Gouvernement doit avoir à coeur de leur apporter le témoignage de la nation et le soutien matériel dont ils ont besoin en prenant des mesures complémentaires en direction des plus fragiles, des plus modestes et de ceux qui ont été blessés. Il donne acte au Gouvernement de mesures adoptées dans le cadre du budget 1999 considérées par le monde combattant comme positives mais insuffisantes. Aussi, il souhaite rappeller les revendications non encore satisfaites et qui pourraient le devenir à l'occasion du budget 2000. La retraite professionnelle anticipée à soixante ans en fonction du temps passé sous les drapeaux ; le bénéfice de l'ARPE pour les détenteurs du titre de reconnaissance de la Nation (TRN) ; le bénéfice du TRN pour les militaires ayant servi en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 ; le bénéfice de « campagne double » pour les anciens combattants en AFN fonctionnaires, travailleurs de l'Etat ou assimilés ; le relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste anciens combattants à 110 points ; une augmentation substantielle des crédits de l'ONAC ; la prise en compte effective des psychotraumatismes de guerre, la révision du système de calcul du « rapport constant » par la prise en compte de toutes les primes servies à la fonction publique ; la remise au même niveau de toutes les pensions des plus grands invalides de guerre sont autant de mesures attendues par le monde combattant. En conséquence, il souhaite connaître son appréciation sur les points précités, ainsi que les intentions du Gouvernement dans le cadre du prochain budget de la nation.
Texte de la REPONSE : Les questions posées par l'honorable parlementaire appellent la réponse suivante : 1/ La revendication de la retraite anticipée pour tous les anciens combattants d'Afrique du Nord doit être replacée dans le contexte économique et social général. Avant même que cette question ne constitue un enjeu pour cette génération, cette revendication a été avancée au nom du principe d'égalité avec les générations précédentes. Depuis la loi de 1974, cette égalité a été pleinement établie, y compris désormais sur le plan de la reconnaissance par la nation. D'autre part, les conditions sociales et le contexte économique ont profondément changé depuis qu'en 1973 la retraite anticipée à partir de soixante ans a été accordée aux anciens combattants de 1939-1945. Il suffit à cet égard de rappeler qu'à une période d'expansion économique et de plein emploi a succédé un fort chômage, frappant en particulier les hommes après cinquante ans. Un dispositif de « traitement social » du chômage a été mis en place, qui modifie les données financières et sociales du problème. Ainsi, tant les dispositions permettant une cessation anticipée de l'activité professionnelle que celles qui assurent une indemnisation des chômeurs de longue durée ont déjà créé, dans les faits sinon dans la terminologie, des garanties de ressources équivalentes à ce que seraient les retraites. Ces dispositifs sociaux sont, d'ailleurs, parfois plus avantageux pour leurs bénéficiaires que ne le seraient les retraites du régime général. Dès lors, l'appréciation d'une mesure qui accorderait la retraite anticipée pour tous les anciens combattants ne peut plus se faire aujourd'hui dans les mêmes conditions qu'en 1973 : au vide juridique permettant l'innovation a succédé une situation extrêmement complexe, où les dispositions à caractère conventionnel se mêlent aux dispositions légales et réglementaires. De telle sorte que la mise en place effective de la retraite anticipée pour les anciens combattants, à supposer qu'elle puisse être financée, imposerait un train de réformes compliquées et nécessitant des délais de plusieurs années. Ni les perspectives d'évolution des régimes de retraite, ni les marges budgétaires de l'Etat, ni la situation effective de la plupart des catégories concernées ne rendent vraisemblables l'inscription d'une telle action au rang des priorités gouvernementales. En tout état de cause, les orientations du projet de loi de finances pour 2000 ne permettent pas d'espérer d'y faire inscrire une mesure de cette nature. 2/ Toutefois, les salariés travaillant dans les entreprises relevant de l'UNEDIC peuvent, sous certaines conditions, prendre une préretraite dans des conditions financières avantageuses, lorsque leur employeur s'engage à embaucher en remplacement de ceux qui partent. A la demande des associations d'anciens combattants d'Afrique du Nord, le secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants a obtenu l'inscription dans son budget 1999 d'une mesure permettant aux anciens combattants qui le souhaitent de bénéficier de ce régime ARPE, même lorsqu'ils se voyaient opposer un refus par leur employeur. Cette situation est peu fréquente, puisque seulement 1,1 % des demandes font l'objet d'un refus et que les anciens combattants ne représentent que la moitié de ces cas. Le régime ARPE étant un système conventionnel résultant d'accords entre les partenaires sociaux, le législateur a subordonné logiquement la mise en oeuvre de la mesure « ARPE aux anciens combattants en cas de refus de l'employeur », à l'acceptation de l'UNEDIC exprimée dans un accord dérogatoire. Dès le renouvellement de la convention de base en décembre 1998, le secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants a saisi l'UNEDIC de la question. Il n'a pas cessé, depuis, de peser de toutes ses forces pour obtenir l'accord des partenaires sociaux, sans lequel la mesure budgétaire qu'il a obtenue ne pourra être appliquée. 3/ Le titre de reconnaissance de la nation (TRN) peut être attribué aux personnels militaires et civils comptant quatre-vingt-dix jours de présence dans les unités engagées dans les conflits ou opérations donnant droit à la carte du combattant. Il n'apparaît, en l'absence d'éléments nouveaux, pas possible d'attribuer le titre de reconnaissance de la nation aux militaires ayant servi en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964. Le transfert de souveraineté entre la France et les nouvelles autorités algériennes a eu lieu le 2 juillet 1962, il est difficile de considérer que l'état de guerre aurait perduré postérieurement à cette date. Toutefois, pour tenir compte de la situation particulière des militaires arrivés en Algérie moins de trois mois avant le 2 juillet 1962, le secrétariat d'Etat aux anciens combattants a accepté que le titre de reconnaissance de la nation puisse leur être attribué s'ils totalisent trois mois de présence à cheval sur cette date. Cette décision a fait l'objet de la circulaire n° 741 A du 15 janvier 1998, modifiée le 16 septembre 1998 relative à la carte du combattant pour la guerre d'Algérie et les conflits de Tunisie et du Maroc. 4/ Sur le fond, il convient de rappeler que les dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite précisent que la bonification de campagne double est accordée pour les services effectués « en opérations de guerre » ; la campagne simple est accordée pour les services effectués « sur pied de guerre » ; la campagne simple ou la demi-campagne peuvent être accordées selon le degré d'insécurité. En application de ces dispositions, les fonctionnaires ayant servi durant la Première et la Seconde Guerre mondiale ont bénéficié tantôt de la campagne simple, tantôt de la campagne double, selon le lieu et la période de leurs services. Dans ces conditions, le principe d'égalité entre les générations du feu n'implique nullement que les fonctionnaires anciens d'Afrique du Nord doivent bénéficier de la campagne double. Dès lors, le droit aux bonifications de campagne doit s'apprécier en fonction des conditions propres aux conflits d'AFN. La demi-campagne accordée à l'origine au nom de l'insécurité pourrait être estimée insuffisante dans la mesure où des militaires ont participé durant ces conflits à des affrontements armés entre unités organisées, rappelant les combats des deux guerres mondiales. C'est pourquoi il a été décidé d'accorder la campagne simple, mesure qui a été étendue à tous les militaires sans distinguer entre les périodes de combat et les autres. Ces dispositions, qui tiennent compte de la spécificité des conflits d'AFN, appliquent justement les principes qui régissent les bonifications de campagne. Il n'est donc pas envisagé de les modifier. 5/ Dans la loi de finances pour 1998, le secrétaire d'Etat aux anciens combattants a obtenu, d'une part la modification du mécanisme d'indexation du « plafond majorable » des retraites mutualistes (il est désormais déterminé par un nombre de points de pension et bénéficie donc du « rapport constant »), d'autre part, une augmentation sensible de celui-ci. Le budget pour 1999 prévoit une nouvelle appréciation du « plafond majorable », en le portant à 100 points d'indice de pension ainsi, l'effort accompli en deux ans a déjà permis de revaloriser le plafond majorable de 12,7 %. La préparation du budget 2000 n'est pas suffisamment avancée pour savoir si une nouvelle majoration y sera prévue. Le secrétaire d'Etat souhaite qu'il en aille ainsi. 6/ En ce qui concerne l'Office natoinal des anciens combattants, d'ores et déjà, 6,5 MF de crédits supplémentaires ont été prévus, destinés à financer les travaux dans les maisons de retraite de l'Office et à améliorer ainsi les conditions de vie des résidents. De plus, 12 MF de mesures nouvelles sont prévus pour intensifier l'action sociale de l'ONAC et pour lui permettre de mettre en place des emplois mémoire dans chaque département. 7/ L'indemnisation des psychotraumatismes de guerre, et par conséquent les soins qu'ils exigent, sont prévus dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Cependant, comme le signale l'honorable parlementaire, l'application de ces dispositions aux traumatismes subis au cours des conflits anciens n'est pas évidente. En effet, la caractéristique des pathologies qu'ils génèrent est de se révéler après un délai de latence variable après une phase de souffrance interne et cachée. La question qui se pose aujourd'hui est d'adapter les procédures en vigueur afin de rendre possibles le dépistage et l'assistance psychologique à ces malades, en plus de l'approche indemnitaire. Il s'agit en quelque sorte de transposer à leur profit les procédures d'assistance immédiate qui se développent à l'égard des victimes des attentats ou de catastrophes naturelles. Une telle démarche, très novatrice si on la replace dans le contexte de l'indemnisation des victimes des guerres, nécessite une réflexion à laquelle doivent participer toutes les parties concernées. Le secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants engagera ce travail prochainement, en ayant conscience des difficultés à surmonter. 8/ Le secrétaire d'Etat aux anciens combattants a engagé une réflexion avec les principales associations du monde combattant sur la question du rapport constant. Cette concertation a permis de constater que la formule d'indexation résultant de la rédaction actuelle de l'article L. 8 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre permet de faire évoluer les pensions en fonction, d'une part, des revalorisations générales des traitements de la fonction publique, et, d'autre part des améliorations de carrière dont bénéficient certaines catégories de fonctionnaires. Cette réflexion commune se poursuit, afin de rechercher comment le mécanisme actuel, certes complexe, peut être rendu plus lisible tout en conservant l'avantage qu'il offre d'une appréciation objective des rémunérations de la fonction publique. Le secrétaire d'Etat aux anciens combattants aura l'occasion de faire des propositions dans le cadre de la préparation du budget 2000. 9/ La mesure de gel des pensions supérieures à 360 000 francs par an décidée par la loi de finances pour 1991 trouvait son origine dans le souci de corriger les effets parfois excessifs du mécanisme de calcul des pensions (système des suffixes majorant arithmétiquement les pourcentages accordés à chaque infirmité après 100 %) et des règles d'indemnisation permettant, dans certains cas, de faire valoir sous forme de nombreuses infirmités séparées des affections qui sont la conséquence d'une lésion initiale unique. Elle concerne environ 1 000 grands invalides percevant des pensions supérieures (hors allocations pour tierces personnes) à 360 000 francs par an, et peuvent atteindre 1,7 MF (niveau de la pension la plus élevée), sommes qui ne sont soumises ni à l'impôt sur le revenu, ni à la cotisation sociale généralisée (CSG), ni à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Il avait en conséquence été décidé que ces pensions les plus élevées ne seraient plus soumises aux revalorisations de la valeur du point d'indice. Mais, depuis la loi de finances pour 1995, les pensionnés concernés bénéficient de nouveau de ces augmentations. Celles-ci sont néanmoins calculées en pourcentage par rapport à la valeur du point bloquée qui leur avait été appliquée. Dès lors, il existe un décalage d'environ 7 % entre les pensions d'invalides ayant subi le blocage et les autres pensions d'invalides atteints des mêmes affections. Un réajustement serait donc équitable et les pensions qui ont été soumises au blocage devraient être à nouveau calculées sur la valeur du point de droit commun. Mais les contraintes budgétaires n'ont pour l'instant pas permis d'y procéder en raison de son coût, estimé à 70 MF. Toutefois, comme le secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants l'a indiqué lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale et au Sénat l'an passé, il a inscrit ce point parmi les priorités qu'il traitera dans le cadre de la loi de finances pour 2000, dont la préparation a commencé.
RPR 11 REP_PUB Ile-de-France O