Texte de la QUESTION :
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M. Georges Sarre attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le dossier de la viande bovine traitée aux hormones de croissance, qui oppose depuis plus de dix ans les Etats-Unis à l'Union européenne. Quelques semaines après leur menace de sanctions tarifaires unilatérales sur le dossier de la banane, les Etats-Unis ont ainsi annoncé, lundi 23 mars, de nouvelles représailles potentielles contre plus de 900 millions d'exportations euroépennes, dans le but de forcer l'Union à ouvrir son marché intérieur au boeuf aux hormones américain et canadien. A cet égard, il note certes qu'en février 1998, l'organe d'appel de l'OMC a confirmé la condamnation de l'Union européenne en première instance - au motif qu'elle n'avait pas su apporter la preuve scientifique de la nocivité de ces hormones -, le sommant donc de lever son embargo à compter du 13 mai 1999. Mais il relève aussitôt que, tout en acceptant cet arbitrage, l'Union est d'autant plus fondée à l'interpréter comme une incitation à poursuivre ses investigations scientifiques en la matière que les procédures fédérales pour tester les résidus d'hormones, antibiotiques et autres susbtances chimiques dans la viande américaine exportée se sont révélées en 1998 sérieusement défaillantes. La proposition américaine de mettre en place un étiquetage qui permettrait aux consommateurs européens de connaître l'origine de la viande, tout en refusant que soit mentionnée la présence d'hormones de croissance, est une circonstance aggravante inacceptable, au nom d'un principe de précaution bien compris. De même est inacceptable ce chantage américain frappant nombre de PME françaises et européennes parmi les plus performantes, en les privant de toute prévisibilité de leurs prix de ventes à l'export, au mépris des règles de l'OMC. Dans ce contexte, il lui demande donc de lui indiquer les arguments que la France et ses partenaires de l'Union entendent faire valoir au sein de l'OMC afin de contrecarrer ces menaces américaines - qui deviendraient effectives au plus tôt le 12 juin et au plus tard le 12 juillet prochains - ainsi que la perspective inquiétante d'une levée pure et simple de l'embargo sur le boeuf aux hormones américain et canadien à compter du 13 mai prochain.
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Texte de la REPONSE :
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La préoccupation de l'honorable parlementaire sur le dossier de la viande bovine traitée aux hormones de croissance, et plus particulièrement sur les conséquences à tirer de la décision rendue dans ce domaine par l'organe d'appel de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), mais aussi sur la question des rétorsions américaines a particulièrement attiré l'attention du ministre. L'organe d'appel de l'OMC a en effet conclu, le 16 janvier 1998, à l'incompatibilité, avec les règles de l'OMC, de la réglementation communautaire prohibant la production et l'importation de viande bovine traitée aux hormones de croissance. Bien qu'ayant souligné l'insuffisance de l'évaluation scientifique présentée par l'Union européenne en ce qui concerne le risque des hormones de croissance sur la santé publique, j'observe que l'organe d'appel nous a reconnu le droit de fixer le niveau de précaution que nous jugeons nécessaire. Alors que l'UE avait jusqu'au 13 mai pour se mettre en conformité avec les conclusions de l'organe d'appel, la Commission, comme prévu, a informé l'OMC que la Communauté n'était pas en mesure de lever dans les délais impartis son embargo sur la viande bovine aux hormones. Cette décision est la conséquence logique des conclusions de deux rapports présentés récemment : l'un qui met en évidence une utilisation inappropriée des hormones de croissance, ce qui augmente les facteurs de risque, alors que l'autre (dont la version complète a été publiée le 7 mai) porte sur l'évaluation des risques pour les consommateurs de viande contenant des résidus de facteurs de croissance hormonaux. Les conclusions de ce dernier, parallèlement à la poursuite des travaux des dix-sept études expérimentales que la Commission a commanditées, tendent à prouver que l'une des six hormones de croissance utilisées par les éleveurs américains, le 17 bêta oestradiaol, est cancérigène ; elles aboutissent au constat que, pour l'ensemble des six hormones concernées, des effets d'ordre immunologique, neurobiologique et cancérigène peuvent être « envisagés ». Contestant la pertinence de ces conclusions, les Etats-Unis ont officiellement demandé à l'OMC, le 14 mai dernier, l'autorisation d'appliquer des sanctions pour un montant de 202 millions de dollars contre les exportations européennes. Ces sanctions (augmentation de 100 % des droits de douane sur des produits dont une liste préliminaire avait été publiée dès le 22 mars) pourraient ne devenir effectives qu'à partir du 23 juillet, compte tenu du délai nécessaire à l'arbitrage que l'UE est en droit de demander à l'OMC. Sur le fond du dossier, nous considérons que les derniers éléments communiqués par la Commission créent une situation nouvelle dont il convient de tirer toutes les conséquences. Les informations émanant du rapport du Comité scientifique vétérinaire nous imposent de maintenir l'interdiction communautaire, y compris dans sa composante externe. Dans la mesure où nous estimons disposer de résultats scientifiques apportant des éléments nouveaux et probants, ce sont les préoccupations de santé publique qui doivent primer. Dans ce cadre, nous avons demandé à la Commission de proposer rapidement des solutions susceptibles d'assurer, sur un plan juridique, l'adéquation entre la réalité scientifique et le cadre de l'OMC. Nous souhaitons en particulier que les aspects scientifiques du dossier soient approfondis afin que l'Union dispose d'éléments complets. S'agissant des sanctions américaines, la France, qui est attachée aux procédures de règlement des différends de l'OMC, s'est prononcée en faveur d'un arbitrage sur le montant des dites sanctions.
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