FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 28381  de  M.   Brana Pierre ( Socialiste - Gironde ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  12/04/1999  page :  2169
Réponse publiée au JO le :  28/06/1999  page :  4022
Rubrique :  famille
Tête d'analyse :  divorce
Analyse :  prestation compensatoire. réforme
Texte de la QUESTION : M. Pierre Brana appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la loi du 11 juillet 1975 relative au divorce et en particulier sur la prestation compensatoire. Cette loi a un objectif louable : permettre à l'un des époux de percevoir de l'autre une prestation matérielle visant à compenser autant qu'il est possible la disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives. A l'époque, cette réforme attendue voulait en particulier pallier les grandes difficultés d'épouses sans ressources financières et éviter de longues et répétées procédures de révision des pensions alimentaires. Aujourd'hui, il semble que son application ne corresponde plus au contexte économique, social et culturel. Selon divers témoignages les défauts ou lacunes originelles de cette loi exacerbent les relations humaines, créent des situations aberrantes et parfois dramatiques. En effet, cette rente, dont le montant est fixé par le juge, est critiquable dans la mesure où elle peut varier considérablement d'un cas à l'autre, ignorant la similitude des situations. Indexée sur l'indice national des prix à la consommation, elle n'est pratiquement pas révisable sauf si la situation matérielle du bénéficiaire se dégradait. En revanche, il semble que l'évolution économique ou sociale du conjoint débiteur ne soit pas traitée sur le même pied d'égalité. Ainsi, compte tenu de l'interprétation rigide de la loi, s'il perd son emploi, subit une chute brutale de ses revenus, il ne peut pas bénéficier d'une suspension du versement de la rente. Un départ à la retraite ne constitue pas plus un motif de réduction du montant de la prestation, et paradoxe, le conjoint divorcé ne subit pas la diminution de revenu d'un couple retraité non séparé. Le créancier tire avantage de la position figée immuablement par le jugement de divorce, même si sa situation matérielle et sociale s'améliore du fait d'une nouvelle union, d'une situation professionnelle plus confortable, d'une forte croissance du patrimoine. En tout état de cause, l'ancien conjoint bénéficie à vie d'une créance qui ne s'éteint pas au décès de l'ex-époux puisque la charge de la rente passe à ses héritiers, à la veuve s'il y a eu remariage. En voulant régler un vrai problème cette loi en génère d'autres. En conséquence, il lui demande s'il existe des moyens de mieux faire apprécier ces situations, et de lui indiquer quand les mesures étudiées actuellement - en particulier dans le cadre du droit de la famille et de la réforme du divorce - permettront d'assouplir cette loi en lui rendant l'équité républicaine.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'un certain assouplissement des conditions de mise en oeuvre de la prestation compensatoire actuellement posées par la loi, et notamment de sa révision, paraît s'imposer eu égard au contexte socio-économique, sans qu'il y ait lieu, cependant, de revenir à un régime comparable à celui des pensions alimentaires préexistant à la réforme de 1975 dont les inconvénients ont été unanimement dénoncés. Lors de l'examen par le Sénat, le 25 février 1998, des propositions de loi de MM. About et Pages relatives à la prestation compensatoire, le Gouvernement a déposé différents amendements en ce sens, abordant également le problème fréquemment dénoncé de la transmissibilité de la charge de la rente aux héritiers du débiteur. Ces amendements n'ont toutefois pas été adoptés par la Haute Assemblée. Les réflexions engagées à la chancellerie sur ce sujet se poursuivent au sein du groupe de travail pluridisciplinaire qui a été installé le 31 août 1998, sous la présidence de Mme le professeur Dekeuwer-Defossez, et chargé de présenter des propositions de réforme du droit de la famille pour la fin du second trimestre 1999. Il apparaît souhaitable d'attendre les conclusions de ce groupe pour engager la réforme du dispositif en vigueur. C'est en effet dans le cadre d'une étude globale de l'ensemble des questions liées au divorce et à ses conséquences pécuniaires que doit être recherchée une solution tendant à remédier aux difficultés posées par la législation en vigueur relative à la prestation compensatoire. En tout état de cause, s'il y a lieu de faciliter le versement de la prestation compensatoire en capital afin d'éviter les inconvénients susvisés, il paraît difficilement envisageable de restreindre le pouvoir d'appréciation du juge selon chaque circonstance d'espèce.
SOC 11 REP_PUB Aquitaine O