FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 289  de  M.   Gremetz Maxime ( Communiste - Somme ) QOSD
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  22/04/1998  page :  2892
Réponse publiée au JO le :  29/04/1998  page :  3075
Rubrique :  emploi
Tête d'analyse :  politique de l'emploi
Analyse :  plans de licenciement. Picardie
Texte de la QUESTION : M. Maxime Gremetz attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la situation de l'emploi en Picardie : le chômage a très faiblement décru au cours du mois de février (- 0,1 % contre - 0,2 % au niveau national), à l'échelle départementale il a progressé de 0,6 % dans l'Oise et 0,2 % dans la Somme. Sur un an, le nombre de demandeurs d'emploi picards progresse de 0,3 %, contrairement à la moyenne nationale (- 2 %). Les départements de l'Aisne et de la Somme enregistrent une progression du chômage, respectivement de 1,5 % et 1 %. En février, le chômage de longue durée concerne 39,6 % des demandeurs d'emploi. Le nombre de demandeurs d'emploi inscrits depuis au moins un an progresse de 14 % sur les douze derniers mois (+ 5,9 % au niveau national). La multiplication des plans de licenciements en Picardie ces douze derniers mois est la principales cause de cette croissance du nombre de demandeurs d'emploi. Power-Control-France, Delcer, Le Bourget, Delcey, La Confection de Ribemont, Yoplair, la Sit..., la liste des entreprises fermées ou ayant eu recours à un ou plusieurs plan de licenciements est fort longue. Il devient urgent de mettre un terme à ces pratiques. M. Maxime Gremetz demande à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité quelles mesures elle compte mettre en oeuvre pour s'opposer à ces plans de licenciements, qui sont le fait d'entreprises qui ne rencontrent pas forcément des difficultés financières.
Texte de la REPONSE : M. le président. M. Maxime Gremetz a présenté une question, n° 289, ainsi rédigée:
«M. Maxime Gremetz attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la situation de l'emploi en Picardie: le chômage a très faiblement décru au cours du mois de février (- 0,1 % contre - 0,2 % au niveau national). A l'échelle départementale il a progressé de 0,6 % dans l'Oise et 0,2 % dans la Somme. Sur un an, le nombre de demandeurs d'emploi picards progresse de 0,3 %, contrairement à la moyenne nationale (- 2 %). Les départements de l'Aisne et de la Somme enregistrent une progression du chômage, respectivement de 1,5 % et 1 %. En février, le chômage de longue durée concerne 39,6 % des demandeurs d'emploi. Le nombre de demandeurs d'emploi inscrits depuis au moins un an progresse de 14 % sur les douze derniers mois (+ 5,9 % au niveau national). La multiplication des plans de licenciements en Picardie ces douze derniers mois est la principale cause de cette croissance du nombre de demandeurs d'emploi. Power-control-France, Delcer, Le Bourget, Delsey, La Confection de Ribemont, Yoplair, la Sit..., la liste des entreprises fermées ou ayant eu recours à un ou plusieurs plans de licenciements est fort longue. Il devient urgent de mettre un terme à ces pratiques. C'est pourquoi il lui demande quelles mesures elle compte mettre en oeuvre pour s'opposer à ces plans de licenciements, qui sont le fait d'entreprises qui ne rencontrent pas forcément de difficultés financières.»
La parole est à M. Maxime Gremetz, pour exposer sa question.
M. Maxime Gremetz. Je désire attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la situation de l'emploi en Picardie. Si le chômage a très faiblement diminué au cours du mois de février - 0,1 % contre 0,2 % au niveau national - à l'échelle régionale, il a progressé de 0,6 % dans l'Oise et de 0,2 % dans la Somme à l'échelle départementale. Ce sont les chiffres de l'INSEE, qui sont incontestables.
Sur un an, le nombre de demandeurs d'emploi picards a progressé de 0,3 %, alors que la moyenne nationale diminuait de 2 %.
Dans les départements de l'Aisne et de la Somme, la progression du chômage a été respectivement de 1,5 % et de 1 %.
En février, le chômage de longue durée a concerné 39,6 % des demandeurs d'emploi. Le nombre de ceux-ci inscrits depuis au moins un an a progressé de 14 % sur les douze derniers mois, contre 5,9 % au niveau national.
Derrière ces chiffres, ce sont des milliers de familles qui se trouvent confrontés à des difficultés considérables. Et ces familles attendent des mesures urgentes.
Derrière ces chiffres, c'est la jeunesse qui souffre et se révolte. Car la région Picardie est l'une des régions les plus jeunes de France.
La multiplication des plans de licenciements, ces douze derniers mois, est, selon l'INSEE, la principale cause de la croissance du nombre des demandeurs d'emploi.
Power-Control-France, Le Bourget, Delsey, La Confection de Ribemont, Yoplait..., la liste des entreprises fermées ou ayant eu recours à un ou plusieurs plans de licenciements est fort longue.
Il est grand temps de décider un moratoire des plans de licenciements.
Quelles mesures comptez-vous engager pour mettre fin à ces pratiques ?
Les entreprises qui mettent en place des plans de licenciements, et qui de surcroît n'investissent pas, loin de connaître des difficultés financières, réalisent des profits !
Citons Valeo-Seiko qui avait annoncé la création de 133 emplois. Elle a bénéficié de la prime d'aménagement du territoire puis s'est «envolée» sans créer les emplois promis et en licenciant 33 personnes qui travaillaient sur le site.
Citons encore Goodyear, au sujet de laquelle, avec les salariés, nous avons rencontré le préfet. Cette entreprise prétend vouloir appliquer les trente-cinq heures. Mais elle a commencé par augmenter la durée du travail à quarante heures et à licencier !
Plastic Omnium Industrie a proposé à vingt-deux salariés sous la menace d'un licenciement, un déclassement; des cadres seraient devenus ouvriers de fabrication en perdant 800 à 2 000 francs par mois. J'ai fait intervenir la direction départementale du travail et M. le préfet. Mais de telles pratiques se développent.
Quant aux Coréens, dont on parle toujours depuis quatre ans, c'est comme l'Arlésienne ! Des crédits importants ont été mobilisés pour préparer leur installation à Amiens, vallée des Vignes. Les gens paient des impôts pour financer les aménagements nécessaires à cette entreprise, qui devait amener des centaines d'emplois. Or aucun emploi n'a été créé jusqu'à maintenant.
La situation est fort préoccupante dans une région où le chômage frappe, où le RMI est déjà très élevé, plus élevé qu'au niveau national, où les conditions de travail sont très difficiles et où les salaires sont les plus bas - juste au-dessus de ceux de la Corse. Il y a vraiment quelque chose à faire. Si les problèmes étaient liés au coût du travail, cela se saurait. Et l'on créerait des emplois en Picardie.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la ville.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le député, dans le combat qu'il mène pour l'emploi, le Gouvernement est bien évidemment attentif au problème que soulèvent les procédures de licenciement collectif pour motif économique. Malgré les actions que nous avons engagées et qui ont commencé à porter leurs fruits, notamment en matière de soutien à la consommation, certaines entreprises continuent de se restructurer et de procéder à de tels licenciements.
Dans l'économie ouverte qui est la nôtre, il arrive que les entreprises perdent un marché important, que leurs prix de revient soient durablement plus élevés que ceux de leurs concurrents ou que leurs activités soient en déclin du fait de l'émergence de nouveaux produits.
Dans de telles situations, elles peuvent être amenées à se séparer d'une partie de leurs effectifs. Retarder les adaptations nécessaires, monsieur le député, c'est alors prendre le risque de les rendre plus douloureuses et plus lourdes à terme.
Nous avons tous à l'esprit des cas de grandes entreprises industrielles qui, pour n'avoir pas su anticiper et préparer à temps les adaptations nécessaires, ont finalement dû mener des restructurations beaucoup plus brutales: au bout du chemin, les salariés n'y ont pas trouvé leur compte.
Toutefois, il importe - et je suis en total accord avec vous, monsieur le député - que le licenciement ne soit considéré que comme une solution de dernier recours lorsque toutes les autres pistes ont été explorées.
Pour cela, les représentants élus du personnel doivent être informés - et j'insiste sur ce point - en temps utile des éléments économiques qui justifient, pour l'employeur, la décision de licencier; ils doivent pouvoir établir la réalité du motif économique et discuter de solutions alternatives aux licenciements. Les garanties existent dans le code du travail pour qu'une telle consultation ait lieu; elles doivent être respectées.
En amont, les entreprises doivent mener, et de plus en plus, une véritable politique de gestion prévisionnelle des emplois pour éviter de devoir procéder à des licenciements dans une situation d'urgence économique.
Cet effort d'anticipation peut et doit encore être développé par rapport à la pratique actuelle des entreprises. Même s'il n'est pas toujours possible, il constitue le meilleur levier pour prévenir les licenciements.
Lorsque le recours au licenciement collectif est inévitable, il convient - et le code du travail donne depuis 1993 des garanties substantielles - d'être particulièrement attentif et exigeant sur les mesures d'adaptation et de reclassement des salariés. A ce titre, les services de l'Etat ont un rôle important à jouer pour veiller à la qualité des plans sociaux.
C'est pourquoi, dès la constitution du Gouvernement, le 11 juillet 1997, une circulaire leur a été adressée en ce sens pour éviter toute dérive vis-à-vis d'employeurs qui seraient tentés de limiter le contenu de ces plans à des préretraites et à des départs sans accompagnement, sans aider leurs salariés à retrouver une place sur le marché de l'emploi.
Dorénavant, l'accompagnement des préretraites par l'Etat doit s'accompagner de garanties strictes de la part des entreprises. Pour que les efforts de reclassement soient réels, il importe que ces instructions soient appliquées avec exigence. Je puis vous assurer que c'est le cas.
Enfin, monsieur le député, le projet sur la réduction du temps de travail - vous le savez, compte tenu de la part que vous avez prise à son élaboration et à sa discussion - doit permettre d'avancer considérablement sur le sujet. Car il prévoit un dispositif d'accompagnement par l'Etat, assorti de contreparties claires de la part des entreprises, lorsque cette réduction du temps de travail peut éviter des licenciements.
Compte tenu de l'échéance qui sera fixée pour l'abaissement de la durée légale à 35 heures, la négociation qui va s'ouvrir dans les entreprises, en préalable ou à l'occasion des procédures de licenciement, est de nature à éviter des suppressions d'emplois et est appelée à transformer l'intervention des représentants des salariés.
M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
M. Maxime Gremetz. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse détaillée.
En posant cette question, je n'oublie pas l'effort accompli par le Gouvernement et le Parlement pour créer les emplois-jeunes, pour aller vers les 35 heures avec compensations et embauche de personnels. Mais c'est pour cela que j'ai appelé votre attention sur le comportement de grands groupes, comme Valeo, Goodyear, Plastic Omnium Industrie et bien d'autres - qui n'ont pas de problèmes mais qui préparent l'application des 35 heures en élaborant des plans de licenciements ou en disant à leurs salariés qu'ils devront en fait, en raison du mode de décompte utilisé, en travailler 40.
Ce phénomène n'est certainement pas propre à ma région. Il faut donc recommander aux directions départementales du travail et aux préfets d'être très attentifs. Sinon, un texte qui n'est pas encore voté, et que je trouve excellent, risque de ne jamais être appliqué ou de l'être contre l'intérêt des salariés et contre l'emploi.
COM 11 REP_PUB Picardie O