FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 2943  de  M.   Douste-Blazy Philippe ( Union pour la démocratie française-Alliance - Haute-Garonne ) QG
Ministère interrogé :  Premier Ministre
Ministère attributaire :  Premier Ministre
Question publiée au JO le :  03/10/2001  page :  5308
Réponse publiée au JO le :  03/10/2001  page :  5308
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  installations classées
Analyse :  zones Seveso. réglementation
DEBAT : M. le président. La parole est à M. Philippe Douste-Blazy, pour le groupe UDF.
M. Philippe Douste-Blazy. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, depuis le 21 septembre, Toulouse est une ville meurtrie. Comme plusieurs de mes collègues viennent de le souligner, l'explosion, d'une violence inouïe, a disloqué des familles, a ravagé une ville et a traumatisé pour longtemps ses habitants. Avec le Président de la République, avec les présidents des deux assemblées, avec de très nombreux parlementaires venant de toutes les travées, de tous les groupes - et à qui je veux dire ici toute ma gratitude -, vous avez vécu notre effroi, partagé notre émotion et assisté à notre recueillement. Et il y a encore un instant, nous venons, ensemble, de rendre hommage aux victimes, ce dont je vous remercie personnellement, monsieur le président.
Monsieur le Premier ministre, vous savez, pour bien les connaître, que les Toulousains ont trop de dignité pour vous interpeller et trop de pudeur pour vous solliciter. Mais comme vient de le dire M. Cochet, nous devons constater ensemble ce qui se passe au niveau national. La directive européenne dite Seveso 2, adoptée en 1996, devait être applicable et donc appliquée en 1998. Or la France n'a procédé à sa transposition qu'en mai 2000 et a accordé un délai supplémentaire aux industriels - février 2001 - pour qu'ils rendent leurs études de danger aux services de l'Etat.
Monsieur le Premier ministre, la leçon du drame de Toulouse doit commencer à être tirée aujourd'hui, dans cet hémicycle. Ma question est double. Premièrement, l'Etat ne doit-il pas lui-même, sous sa responsabilité, réaliser ces études de danger ? Et si oui, en a-t-il les moyens ? Deuxièmement, ces études ne doivent-elles pas être l'occasion d'un grand débat public avec les services de l'Etat, avec les collectivités locales - en particulier, les mairies -, avec les syndicats, avec les industriels, avec les chercheurs et les scientifiques, et, surtout, avec les citoyens ?
Si nous commençons ce soir à répondre à ces deux questions, nous aurons commencé à tirer les leçons du drame de Toulouse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député-maire de Toulouse, depuis dix jours, je me suis efforcé, vous le savez, d'être à vos côtés dans cette épreuve, et aux côtés des Toulousaines et des Toulousains.
Vendredi, au-delà des mesures de solidarité très importantes que j'ai annoncées - et que j'ai rappelées succinctement il y a un instant -, j'ai effectivement commencé à tracer une problématique, une approche, en annonçant des décisions visant à ce que soient tirées, à Toulouse comme dans la France entière, les leçons de cette très grave catastrophe industrielle dont parlait Yves Cochet tout à l'heure.
Cette catastrophe nous oblige à remettre à plat, ensemble, la gestion du risque industriel, la surveillance et le contrôle des installations, la politique d'urbanisation autour des sites.
A mes yeux, la priorité doit rester la maîtrise du risque industriel lui-même. Car je rappelle que vingt-deux des vingt-neuf personnes décédées étaient dans l'usine elle-même. Nous devons donc veiller à protéger ceux qui travaillent dans ces usines : 500 000 personnes dans l'industrie chimique en France. Ce n'est pas simplement en déplaçant des usines à la campagne - à supposer qu'on le puisse, à supposer qu'on trouve des espaces qui ne soient pas urbanisés - que l'on assurerait la sécurité de ces salariés et de ces travailleurs.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Tout à fait !
M. le Premier ministre. Il faut donc, où qu'ils soient, veiller à des processus industriels, à des modes de contrôle, à des procédures de sécurité qui garantissent pour eux un risque minimal. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Nous n'allons pas renoncer à avoir une industrie chimique, nous n'allons pas déplacer 500 000 personnes à la campagne. Tout en tirant des leçons de la catastrophe de Toulouse et en envisageant certainement, de façon raisonnée, par le dialogue, par la discussion, avec les experts, avec les techniciens, avec les élus locaux, de déplacer des usines - parce qu'il faudra le faire -, il va falloir que nous assurions cette sécurité maximale. Le renforcement des moyens de contrôle et la consolidation d'une expertise indépendante - Yves Cochet vient de donner des indications précises concernant les moyens nouveaux qui y seront affectés - restent essentiels.
La maîtrise du risque dépend aussi, à mon sens, de l'implication des acteurs concernés. Car, sans pouvoir remplacer comme par magie le nécessaire travail technique, la démocratie reste à mes yeux une garantie majeure de sécurité. L'information sur les risques est un droit que nous devons garantir.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Très bien !
M. le Premier ministre. J'ai donc demandé à Yves Cochet, le ministre de l'environnement, de veiller à la constitution de comités locaux d'information et de prévention des risques, qui joueront un rôle d'alerte, d'interpellation, de mise en garde. Et comme vous l'avez dit, monsieur le maire, il me semble que les représentants des personnels, notamment les représentants syndicaux, doivent être associés à ce travail qui les concerne au premier chef.
M. Christian Bataille. Très bien !
M. le Premier ministre. L'urbanisation autour des sites doit certainement être maîtrisée. Il ne faut pas répéter les erreurs du passé et laisser, par laxisme, les sites industriels être absorbés par la croissance des villes. Nous allons créer, par la loi, un plan de prévention des risques technologiques qui s'imposera au moins à toutes les constructions neuves.
Pour ce qui est de Toulouse, je l'ai dit vendredi dernier de la manière la plus claire - sans vouloir ni me substituer à l'ensemble des autorités qui doivent décider de ces choses, ni préjuger du résultat des expertises -, il n'est pas question aujourd'hui de redémarrer l'activité dans les usines chimiques. Pour ce qui est des autres villes, il faut prendre le temps de débattre de manière responsable. Chacun comprend bien que, dans une ville meurtrie, blessée, cette question ne se pose pas dans les mêmes termes que dans d'autres villes, où il faut simplement veiller à la sécurité maximale.
Je suis d'accord avec l'idée - je l'avais d'ailleurs moi-même suggérée à Toulouse - d'organiser à l'échelle nationale un débat sur les grands sites industriels à risque. C'est l'objet de la table ronde nationale et des débats locaux que je souhaite voir se tenir d'ici au début de l'année 2002. J'ai demandé au ministre de l'environnement ainsi qu'aux secrétaires d'Etat au logement et à l'industrie de préparer cette grande consultation nationale. Ils m'ont proposé d'en confier l'organisation à M. Philippe Essig, ancien président de la SNCF, dont l'humanité, la hauteur de vue et la compétence technique seront utiles.
La situation actuelle est le résultat de décisions et d'actions anciennes des industriels, des collectivités locales, des élus et de l'Etat lui-même. Les responsabilités sont partagées. Les décisions et les engagements pour l'avenir doivent être l'objet de notre travail en commun. C'est ce à quoi le Gouvernement est prêt à vous associer. (Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)



M. le président. La parole est à M. Philippe Douste-Blazy, pour le groupe UDF.
M. Philippe Douste-Blazy. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, depuis le 21 septembre, Toulouse est une ville meurtrie. Comme plusieurs de mes collègues viennent de le souligner, l'explosion, d'une violence inouïe, a disloqué des familles, a ravagé une ville et a traumatisé pour longtemps ses habitants. Avec le Président de la République, avec les présidents des deux assemblées, avec de très nombreux parlementaires venant de toutes les travées, de tous les groupes - et à qui je veux dire ici toute ma gratitude -, vous avez vécu notre effroi, partagé notre émotion et assisté à notre recueillement. Et il y a encore un instant, nous venons, ensemble, de rendre hommage aux victimes, ce dont je vous remercie personnellement, monsieur le président.
Monsieur le Premier ministre, vous savez, pour bien les connaître, que les Toulousains ont trop de dignité pour vous interpeller et trop de pudeur pour vous solliciter. Mais comme vient de le dire M. Cochet, nous devons constater ensemble ce qui se passe au niveau national. La directive européenne dite Seveso 2, adoptée en 1996, devait être applicable et donc appliquée en 1998. Or la France n'a procédé à sa transposition qu'en mai 2000 et a accordé un délai supplémentaire aux industriels - février 2001 - pour qu'ils rendent leurs études de danger aux services de l'Etat.
Monsieur le Premier ministre, la leçon du drame de Toulouse doit commencer à être tirée aujourd'hui, dans cet hémicycle. Ma question est double. Premièrement, l'Etat ne doit-il pas lui-même, sous sa responsabilité, réaliser ces études de danger ? Et si oui, en a-t-il les moyens ? Deuxièmement, ces études ne doivent-elles pas être l'occasion d'un grand débat public avec les services de l'Etat, avec les collectivités locales - en particulier, les mairies -, avec les syndicats, avec les industriels, avec les chercheurs et les scientifiques, et, surtout, avec les citoyens ?
Si nous commençons ce soir à répondre à ces deux questions, nous aurons commencé à tirer les leçons du drame de Toulouse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député-maire de Toulouse, depuis dix jours, je me suis efforcé, vous le savez, d'être à vos côtés dans cette épreuve, et aux côtés des Toulousaines et des Toulousains.
Vendredi, au-delà des mesures de solidarité très importantes que j'ai annoncées - et que j'ai rappelées succinctement il y a un instant -, j'ai effectivement commencé à tracer une problématique, une approche, en annonçant des décisions visant à ce que soient tirées, à Toulouse comme dans la France entière, les leçons de cette très grave catastrophe industrielle dont parlait Yves Cochet tout à l'heure.
Cette catastrophe nous oblige à remettre à plat, ensemble, la gestion du risque industriel, la surveillance et le contrôle des installations, la politique d'urbanisation autour des sites.
A mes yeux, la priorité doit rester la maîtrise du risque industriel lui-même. Car je rappelle que vingt-deux des vingt-neuf personnes décédées étaient dans l'usine elle-même. Nous devons donc veiller à protéger ceux qui travaillent dans ces usines : 500 000 personnes dans l'industrie chimique en France. Ce n'est pas simplement en déplaçant des usines à la campagne - à supposer qu'on le puisse, à supposer qu'on trouve des espaces qui ne soient pas urbanisés - que l'on assurerait la sécurité de ces salariés et de ces travailleurs.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Tout à fait !
M. le Premier ministre. Il faut donc, où qu'ils soient, veiller à des processus industriels, à des modes de contrôle, à des procédures de sécurité qui garantissent pour eux un risque minimal. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Nous n'allons pas renoncer à avoir une industrie chimique, nous n'allons pas déplacer 500 000 personnes à la campagne. Tout en tirant des leçons de la catastrophe de Toulouse et en envisageant certainement, de façon raisonnée, par le dialogue, par la discussion, avec les experts, avec les techniciens, avec les élus locaux, de déplacer des usines - parce qu'il faudra le faire -, il va falloir que nous assurions cette sécurité maximale. Le renforcement des moyens de contrôle et la consolidation d'une expertise indépendante - Yves Cochet vient de donner des indications précises concernant les moyens nouveaux qui y seront affectés - restent essentiels.
La maîtrise du risque dépend aussi, à mon sens, de l'implication des acteurs concernés. Car, sans pouvoir remplacer comme par magie le nécessaire travail technique, la démocratie reste à mes yeux une garantie majeure de sécurité. L'information sur les risques est un droit que nous devons garantir.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Très bien !
M. le Premier ministre. J'ai donc demandé à Yves Cochet, le ministre de l'environnement, de veiller à la constitution de comités locaux d'information et de prévention des risques, qui joueront un rôle d'alerte, d'interpellation, de mise en garde. Et comme vous l'avez dit, monsieur le maire, il me semble que les représentants des personnels, notamment les représentants syndicaux, doivent être associés à ce travail qui les concerne au premier chef.
M. Christian Bataille. Très bien !
M. le Premier ministre. L'urbanisation autour des sites doit certainement être maîtrisée. Il ne faut pas répéter les erreurs du passé et laisser, par laxisme, les sites industriels être absorbés par la croissance des villes. Nous allons créer, par la loi, un plan de prévention des risques technologiques qui s'imposera au moins à toutes les constructions neuves.
Pour ce qui est de Toulouse, je l'ai dit vendredi dernier de la manière la plus claire - sans vouloir ni me substituer à l'ensemble des autorités qui doivent décider de ces choses, ni préjuger du résultat des expertises -, il n'est pas question aujourd'hui de redémarrer l'activité dans les usines chimiques. Pour ce qui est des autres villes, il faut prendre le temps de débattre de manière responsable. Chacun comprend bien que, dans une ville meurtrie, blessée, cette question ne se pose pas dans les mêmes termes que dans d'autres villes, où il faut simplement veiller à la sécurité maximale.
Je suis d'accord avec l'idée - je l'avais d'ailleurs moi-même suggérée à Toulouse - d'organiser à l'échelle nationale un débat sur les grands sites industriels à risque. C'est l'objet de la table ronde nationale et des débats locaux que je souhaite voir se tenir d'ici au début de l'année 2002. J'ai demandé au ministre de l'environnement ainsi qu'aux secrétaires d'Etat au logement et à l'industrie de préparer cette grande consultation nationale. Ils m'ont proposé d'en confier l'organisation à M. Philippe Essig, ancien président de la SNCF, dont l'humanité, la hauteur de vue et la compétence technique seront utiles.
La situation actuelle est le résultat de décisions et d'actions anciennes des industriels, des collectivités locales, des élus et de l'Etat lui-même. Les responsabilités sont partagées. Les décisions et les engagements pour l'avenir doivent être l'objet de notre travail en commun. C'est ce à quoi le Gouvernement est prêt à vous associer. (Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
UDF 11 REP_PUB Midi-Pyrénées O