Texte de la QUESTION :
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M. Georges Hage attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation politique des Comores. Depuis plus d'un an l'archipel est confronté aux velléités séparatistes de l'île d'Anjouan où certaines forces politiques réclament le rattachement pur et simple à la France sur le modèle de Mayotte. Cette évolution est certainement liée à la grande pauvreté que connaît Anjouan. Mais on ne saurait oublier l'activisme d'une extrême droite française très implantée dans l'île et qui ne se résigne pas à la décolonisation. Ce conflit a déjà fait plusieurs victimes et a eu des conséquences très négatives sur les conditions de vie de toute la population comorienne. C'est la stabilité des Comores qui est aujourd'hui gravement compromise. La récente prise du pouvoir par l'armée est là pour en témoigner. Interpellés, notre pays et l'Organisation de l'Unité Africaine ont confirmé dès le début des événements leur attachement à l'intégrité territoriale de la République fédérale islamique des Comores. Des négociations se sont ainsi ouvertes en décembre 1997 avec la conférence d'Addis-Abeba où l'OUA a proposé une déconcentration importante des pouvoirs entre les différentes îles qui resteraient partie prenante d'une même fédération. Aujourd'hui ces négociations sont au point mort, le gouvernement séparatiste d'Anjouan ayant réaffirmé, le 10 novembre 1998, comme préalable à toute discussion, son exigence de scission de la fédération. Les séparatistes prennent argument sur l'absence d'intégrité territoriale entre les quatre îles et cela en particulier depuis le référendum d'autodétermination de 1975, organisé par la France, où chacune des îles, et non l'archipel dans sa globalité, a été appelée à se prononcer sur son avenir. C'est cette manière de procéder qui a abouti à ce que Mayotte, considérée pourtant par la communauté internationale comme une île des Comores, demeure une collectivité territoriale française promise à la départementalisation à l'issue d'un référendum qui devrait être organisé dans les prochains mois. Si la France fait jouer à chaque fois son droit de veto, elle n'en est pas moins en conséquence régulièrement condamnée par l'assemblée générale des Nations Unies. Engager aujourd'hui ce processus de départementalisation en instituant de manière définitive la séparation entre Mayotte et les autres îles comoriennes, ne manquerait pas d'exacerber dangereusement toutes les tension. Considérant que la reconstitution de l'unité nationale des Comores est à contrario le seul moyen de rétablir la stabilité et d'assurer le développement du pays, considérant que l'avenir de Mayotte se doit d'intégrer cette perspective, et qu'y compris son rattachement à la République Comorienne, mérite d'être envisagé dans des formes et des modalités restant à déterminer à l'issue d'une négociation associant toutes les parties, considérant en conséquence qu'il y a donc lieu de surseoir à l'organisation du référendum sur la départementalisation et d'ouvrir cette négociation, il lui demande les dispositions que le gouvernement envisage de prendre en ce sens.
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Texte de la REPONSE :
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Au cours de son histoire, Mayotte a toujours affirmé sa volonté de demeurer française. L'appartenance de Mayotte à la République française est strictement conforme aux principes fondamentaux reconnus par la Constitution, notamment le dernier alinéa de l'article 53 qui dispose : « Nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire n'est valable sans le consentement des populations intéressées. » En effet, le 22 décembre 1974, à l'occasion de l'organisation de la consultation sur l'accession du territoire français des Comores à l'indépendance, par 63,82 % des suffrages exprimés les Mahorais ont refusé de quitter la République française. La loi n° 75-1337 du 31 décembre 1975 consacre l'accession des Comores à l'indépendance. Saisi du texte de cette loi, le Conseil constitutionnel a reconnu la constitutionnalité de la sécession du territoire des Comores et considéré que Mayotte doit être regardée comme un territoire, au sens de l'article 53, dernier alinéa, de la Constitution et ne peut, en conséquence, quitter la République française sans le consentement de sa population. Enfin, la Haute Juridiction a jugé que la constatation de l'appartenance d'un territoire à la République ne peut être faite que dans le cadre de la Constitution, nonobstant toute intervention d'une instance internationale, et qu'en l'espèce la loi qui lui était soumise ne mettait en cause aucune règle du droit international. Une deuxième consultation de la population mahoraise fut organisée le 8 février 1976 sur l'appartenance de Mayotte à la République française : 99,4 % des suffrages exprimés se portèrent en faveur du maintien de Mayotte au sein de la République française. Par ailleurs, les électeurs mahorais ont, le 11 avril 1976, exprimé leur volonté de voir leur île devenir un département d'outre-mer, choix qui n'était pas proposé à leur décision, par 80 % des suffrages exprimés (sous forme de bulletins sauvages), le statut de territoire d'outre-mer ne recueillant que 90 voix sur 17 384 votants (soit 0,51 % des votants et 2,53 % des suffrages). Le législateur a décidé, en 1976, d'ériger Mayotte en collectivité territoriale de la République. Ainsi, la loi n° 76-1212 du 24 décembre 1976, conçue à titre transitoire, prévoit en son article premier une consultation de la population sur la question de la transformation de Mayotte en département ou sur l'adoption d'un statut différent. Ce délai a été porté à cinq ans par l'article 2 de la loi n° 79-1113 du 22 décembre 1979. Un projet de loi déposé le 20 décembre 1984 envisageait une nouvelle consultation des électeurs de Mayotte sur l'appartenance de l'île à la République. Ce projet ne fut jamais discuté et est devenu caduc en mars 1986. En 1998, le Gouvernement a ouvert des discussions avec les élus mahorais. Elles ont abouti à un accord conclu à Paris le 4 août 1999 : soumis à la consultation du conseil général et des conseils municipaux, cet accord a été approuvé par 14 conseillers généraux sur 19 et par 16 des 17 communes ; il a été solennellement signé le 27 janvier dernier à Paris et publié le 8 février au Journal officiel. C'est sur ce texte que les Mahorais auront à se prononcer le 2 juillet 2000, soit avant la date du 31 juillet 2000, comme le prévoit la loi n° 2000-391 du 9 mai 2000 organisant une consultation de la population à Mayotte. Si les Mahorais approuvent l'accord, les orientations qu'il contient serviront de base à l'élaboration du projet de loi organisant le statut de Mayotte. Mayotte se verrait ainsi dotée d'un statut de « collectivité départementale ». L'accord prévoit qu'en 2010, sur proposition du conseil général, le Gouvernement pourra soumettre au Parlement un projet d'évolution de ce statut.
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