DEBAT :
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PORTO ALEGRE
M. le président. La
parole est à M. Yann Galut, pour le groupe socialiste.
M. Yann Galut.
Monsieur le ministre délégué chargé de la coopération et de la francophonie, le deuxième forum social mondial vient de se tenir à Porto Alegre où 50 000 personnes se sont rassemblées pour proposer une autre mondialisation.
Tous les pays sont en effet touchés par les conséquences de la mondialisation financière, tant ceux du tiers-monde ou d'Amérique du Sud, étranglés par la dette et par les exigences des institutions internationales, que les pays européens. Chacun peut mesurer les dégâts de cette volonté de faire passer les profits avant la personne humaine. Même en France, dans nos circonscriptions, nous pouvons constater les effets d'une mondialisation non régulée, certaines entreprises raisonnant essentiellement en termes de rentabilité maximale au détriment des salariés et de nos territoires, ce qui entraîne licenciements massifs et désertification rurale.
A Porto Alegre, un nouveau mouvement social international est né. Les participants se sont prononcés non pas contre la mondialisation, qui est inéluctable, mais pour une autre mondialisation : une mondialisation régulée qui place l'homme au centre des préoccupations, une mondialisation sociale qui respecte le droit du travail, qui prenne en considération l'environnement, le développement durable, le commerce équitable.
Des propositions concrètes ont été élaborées lors de ce forum afin de redonner du pouvoir à la décision politique face aux marchés financiers, aux actionnaires et aux multinationales. Il a ainsi été proposé de taxer les transactions spéculatives internationales, de supprimer les paradis fiscaux, de défendre les services publics, notamment dans les zones rurales, de garantir l'accès à l'eau, de refuser la marchandisation de l'éducation.
Néanmoins, monsieur le ministre, la question essentielle qui a été débattue à Porto Alegre et qui vous intéresse, j'en suis sûr, est la problématique de la dette des pays les plus pauvres. Cela a été souligné par l'ensemble des participants. Comment les économies des pays du tiers-monde peuvent-elles redémarrer si elles sont obligées de rembourser la dette ? Il s'agit d'une question essentielle, comme nous le voyons actuellement avec la situation en Argentine.
Pour la deuxième année consécutive, des membres du Gouvernement étaient présents à Porto Alegre...
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Assez !
M. Yann Galut. ... montrant ainsi que l'intérêt porté par le Premier ministre à cette question n'est pas nouveau.
Pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, notamment sur la question de la dette, quels enseignements vous tirez du forum social mondial de Porto Alegre ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la
francophonie. Monsieur le député, on ne peut pas dire que le forum qui vient de se terminer à Porto Alegre soit l'acte de naissance du mouvement social international. Celui-ci a débuté avant. Au demeurant, Porto Alegre en était à sa seconde édition. Toutefois, il est indéniable que celle-ci a marqué une confirmation, une consolidation de ce mouvement social international auquel la France a beaucoup participé. D'ailleurs, les autorités brésiliennes, hôtes de ce forum, ont fortement apprécié cette présence multiforme, avec des parlementaires - un forum leur était réservé -, des élus locaux - qui avaient également leur forum -, des magistrats et, bien entendu, des participants de la société civile française.
Il est évidemment trop tôt pour tirer les conclusions et faire la synthèse...
M. Michel Meylan. Pub !
M. René André. Récupération !
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. ... de ces vingt-sept thèmes, de ces sept cents ateliers, mais on peut déjà souligner que, cette année, on est passé de l'imprécation à la proposition, ce qui est une excellente évolution.
Je tiens aussi à relever que l'Afrique était davantage représentée, en partie grâce à nous, car nous avons collaboré à l'organisation d'un forum social africain à Bamako et nous avons aidé certains Africains à venir à Porto Alegre. Cela aussi méritait d'être rappelé.
Plusieurs propositions ont été formulées avec lesquelles nous sommes en très grande résonance. Je n'y reviens pas.
S'agissant de la dette, je veux rappeler, puisque l'occasion m'en est donnée, que l'aménagement des dettes bilatérales est depuis longtemps mis en oeuvre dans le cadre de ce que l'on appelle le club de Paris dont la France assure le secrétariat. Néanmoins, on n'y fait qu'aménager la dette et, même si cela a déjà coûté à la France quelque 10 milliards d'euros, le compte n'y est pas, notamment pour les pays pauvres très endettés. Ce sont précisément eux qui ont bénéficié de l'initiative de la Banque mondiale par laquelle quarante et un pays considérés comme pauvres et endettés vont bénéficier de l'annulation de leur dette. Vingt-quatre d'entre eux en sont au point dit de décision qui suspend la dette et quatre ont déjà atteint le point d'achèvement qui permet l'annulation de la dette.
Dans le cadre de cette nouvelle procédure, la France a fait le choix d'aller plus loin et d'annuler complètement sa dette bilatérale avec ces pays. En tout, elle va ainsi renoncer à 10 milliards d'euros supplémentaires. A cet égard, nous intervenons dans le cadre de contrats de désendettement-développement qui, vous le savez, impliquent aussi la société civile.
J'ajoute que cette dernière a été en pointe dans cette action d'effacement de la dette. Il faut donc qu'elle continue à mettre la pression afin que nous atteignions cet objectif que nous partageons et en faveur duquel la France mène le combat. (Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
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