FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 33186  de  M.   Dosé François ( Socialiste - Meuse ) QE
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  26/07/1999  page :  4505
Réponse publiée au JO le :  29/11/1999  page :  6858
Rubrique :  étrangers
Tête d'analyse :  conditions d'entrée et de séjour
Analyse :  visas. contrôle. réglementation
Texte de la QUESTION : M. François Dosé attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le rôle indirect consenti à certaines compagnies de transport, et particulièrement Air France, concernant l'entrée des étrangers en France. En effet, la loi du 26 février 1992 dispose qu'une amende peut être infligée à toute entreprise de transport terrestre, maritime ou aérien, qui débarquerait en France un étranger démuni de visa. Cette amende ne peut être infligée si la personne concernée est munie de documents dont l'irrégularité n'est pas manifeste ou si elle présente une demande d'asile qui ne soit « pas manifestement infondée ». Ce dispositif permet donc à des entreprises privées ou en voie de privatisation d'apprécier le caractère régulier ou non d'une demande d'asile, à leur risque et péril, privant ainsi ce droit d'une grande partie de son effectivité. De surcroît, certaines ambassades françaises conditionnent l'octroi de visas à la production par le demandeur d'un titre de transport d'une compagnie aérienne particulière (et notamment Air France), renforçant ainsi l'immixtion des entreprises dans le domaine de l'immigration. Il souhaite connaître les mesures précises envisagées par le ministre de l'intérieur pour mettre fin à de telles pratiques irrégulières ou injustes, rappelant que la politique d'immigration française doit relever exclusivement des pouvoirs publics, et ne peut supporter de telles ingérences.
Texte de la REPONSE : Nous assistons depuis quelques années à un développement tout à fait exceptionnel du trafic aérien international. L'aéroport de Roissy est, à titre d'exemple, passé de 23 millions de voyageurs en 1993 à 36 millions en 1998. Les entreprises de transport aérien connaissent ainsi actuellement une période d'expansion très importante. L'une des contreparties de cette forte croissance induite par le développement du transport mondial des personnes réside dans la coopération que les compagnies aériennes apportent au contrôle des flux transfrontaliers. Ce mode d'assistance, fondé sur différentes procédures, a été créé par l'annexe 9 de la convention de Chicago de 1944 relative à l'aviation civile internationale qui prévoit le contrôle des documents transfrontières par les agents des compagnies et permet de sanctionner celles qui ne remplissent pas ce devoir de vérification minimale. Cette assistance des compagnies aériennes reste bien entendu limitée, celles-ci n'étant en aucun cas des auxiliaires des services de la police aux frontières. Le contrôle en amont, avant l'embarquement des passagers ne peut être entendu que comme celui réalisé par un agent, certes formé à cet égard, mais sans commune mesure avec la spécialisation des fonctionnaires de police. Les tribunaux administratifs français veillent d'ailleurs avec rigueur au respect de cette distinction entre les tâches dévolues aux services de contrôle et les tâches qui incombent aux agents des compagnies aériennes. La législation française s'est également voulue protectrice du droit d'asile puisque l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée concernant l'exonération des compagnies a pour objectif de ne pas les contraindre à refuser l'embarquement des demandeurs d'asile, même s'ils ne disposent pas des documents requis pour entrer en France. Ces dispositions ont reçu l'aval du Conseil constitutionnel dans sa décision n° 92-306 DC du 21 février 1992. Cette décision souligne en effet qu'il ne s'agit en aucun cas de procéder à un transfert de compétence des pouvoirs de police vers les compagnies et que la finalité de ces dispositions est bien de prévenir le risque qu'une compagnie refuse d'acheminer les demandeurs d'asile démunis de documents de voyage. Le contrôle de la juridiction administrative sur ces dispositions constitue une garantie supplémentaire. Une législation aussi protectrice place la France parmi les Etats les plus respectueux du droit d'asile, en comparaison d'autres Etats du monde ou même d'Europe, qui sont pourtant également parties à la convention de Genève de 1951 relative aux réfugiés. Aussi, la législation française est-elle prise comme exemple par les pays qui souhaitent revoir leur dispositif afin de le rendre conforme à leurs engagements internationaux en matière d'asile. Le décret du 27 mai 1982 modifié prévoit également la production par l'étranger, au moment du contrôle transfrontalier, d'un document relatif à ses garanties de rapatriement qui est en fait constitué du titre de transport valable pour revenir dans son pays de résidence habituelle. L'instruction consulaire commune Schengen sur les visas prévoit, en outre, au moment de la délivrance du visa par les consulats, la production de ce même titre de transport. Cette mesure est destinée à contrôler la réalité du séjour de l'intéressé, sa durée et par là même de déterminer le viatique dont il doit être en possession au moment du franchissement de la frontière. En conséquence, le Gouvernement n'envisage pas de revenir sur ces différentes dispositions de la législation française, qui sont conformes tant aux principes régissant le droit d'asile et les responsabilités de la puissance publique qu'à nos engagements internationaux.
SOC 11 REP_PUB Lorraine O