Texte de la QUESTION :
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M. Michel Destot attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'effet pervers de certaines dispositions en matière d'urbanisme. Il n'est pas rare de constater l'utilisation abusive de recours exercée par certaines associations de riverains contre des projets d'aménagement et de construction. Ces recours abusifs font du tort à l'ensemble du secteur associatif et créent la confusion entre les associations qui mènent de véritables actions constructives de sensibilisation au respect de l'environnement et celles qui s'en servent à des fins personnelles et condamnables. En effet, dans des cas de plus en plus nombreux, les permis de construire déposés par des maîtres de l'ouvrage public ou privé font systématiquement l'objet de recours, une transaction financière étant ensuite proposée pour retirer le recours en question. La motivation réelle n'est donc plus le souci collectif de protection de l'environnement mais la défense d'intérêts particuliers. Le mobile écologique cède le pas dans cette logique de désistement d'instance au motif financier. Ces pratiques se révèlent particulièrement dommageables pour l'ensemble de la collectivité. Il lui demande donc quelles mesures elle compte prendre pour mettre fin à ces dysfonctionnements.
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Texte de la REPONSE :
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la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il ne saurait être question de porter atteinte au droit fondamental d'ester en justice. Le droit au recours constitue, en effet, un principe de valeur constitutionnelle, rappelé par le Conseil constitutionnel dans la décision n° 96-373 DC du 9 avril 1996, un droit garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, s'agissant du recours pour excès de pouvoir, un principe général du droit consacré par le Conseil d'Etat. La recevabilité d'un tel recours ne peut être conditionnée par les mobiles qui inspirent le requérant. Afin, toutefois, de concilier ce droit et le devoir général ne de pas nuire volontairement à autrui, les juridictions administratives peuvent condamner la partie dont la requête est jugée abusive à une amende dont le plafond est actuellement fixé à 20 000 F par les articles 57-2 du décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 et R. 88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. En outre, l'article L. 8-1 de ce même code permet au juge administratif de condamner la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie les frais exposés par elle pour la défense à un recours pour excès de pouvoir. En troisième lieu, la responsabilité civile du requérant peut être engagée pour faute devant le juge judiciaire et aboutir à une condamnation en rapport avec le préjudice. Enfin, en matière d'urbanisme, les recours fondés sur l'exception d'illégalité ont été strictement limités par la loi n° 94-112 du 9 février 1994. C'est donc par l'amélioration de la règle de droit et non dans la limitation du droit d'agir qu'il convient de chercher les solutions pour prévenir le contentieux de l'urbanisme. Dans cet esprit, sans porter atteinte au droit de toute partie de se désister, une réflexion doit être conduite, en liaison avec le ministère chargé de l'urbanisme, sur la licéité de la cause des transactions financières, conduisant à un désistement, évoquées par l'honorable parlementaire.
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