Texte de la REPONSE :
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Le pouvoir de police des immeubles menaçant ruine appartient au maire, comme le précise l'article L. 2213-24 du code général des collectivités territoriales, qui renvoie aux articles L. 511-1 à L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation. Toutefois, la police spéciale de la protection des monuments historiques relève, ainsi qu'en dispose l'article 9 de la loi du 31 décembre 1913 modifiée sur les monuments historiques, du ministre de la culture qui doit donner son autorisation pour, en particulier, la réalisation d'un travail de restauration d'un immeuble classé. L'article 2 du décret du 17 février 1984 portant statut particulier du corps des architectes des bâtiments de France précise en outre que ses fonctionnaires sont « conservateurs des monuments historiques appartenant, dans leur circonscription, à l'Etat et affectés au ministère de la culture sous réserve des exceptions fixées par le ministre chargé de la culture... ». Le régime applicable au concours de ces pouvoirs de police doit respecter les deux principes suivant lesquels, d'une part, une police spéciale ne fait obstacle à l'exercice de la police générale que si un texte en dispose ainsi, d'autre part, chaque police doit être exercée en vue de l'objet et selon les procédure qui lui sont propres. En ce concerne l'application des articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, le tribunal administratif de Lyon a précisé, dans un jugement « Maire de Saint-Michel-de-Boulogne » du 6 mars 1980, que les pouvoirs détenus par le maire en vertu de ces articles étaient incompatibles avec ceux accordés aux autorités de l'Etat par la loi du 31 décembre 1913 qui donne au ministre de la culture la responsabilité de la conservation d'un monument historique ainsi que les pouvoirs nécessaires pour exercer cette mission. Dans ce cas, le maire ne peut donc prescrire la réparation ou la démolition des édifices sur le fondement des articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation. En l'espèce, les ruines du village martyr d'Oradour-sur-Glane étant propriété de l'Etat et classées monument historique, le maire ne peut prescrire la réparation des édifices menaçant ruine. Il revient donc à l'architecte des bâtiments de France de procéder à l'alerte en cas de péril causé par le mauvais état des bâtiments. En revanche, les dispositions de la loi du 31 décembre 1913 ne sauraient dessaisir le maire de ses obligations au titre de ses pouvoirs de police générale. Il revient donc au maire, en vertu des articles L. 2211-1 du code des collectivités territoriales selon lequel le maire concourt par son pouvoir de police à l'exercice des missions de sécurité publique, L. 2212-1 selon lequel le pouvoir de police du maire est exercé sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département et L. 2212-2 1/, d'informer le préfet de la nécessité de faire procéder aux travaux requis sur un monument historique. Il revient également au maire, en cas de péril imminent, de prévenir par des précautions convenables les risques d'accident, en vertu des dispositions de l'article L. 2212-2 5/ du code général des collectivités territoriales. En ce qui concerne l'application de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, relatif aux mesures susceptibles d'être prises en cas de péril imminent, les dispositions de la loi du 31 décembre 1913 ne s'opposent pas à la procédure prévue par cet article. Dans ce contexte, les responsabilités civile et pénale du maire et des élus municipaux doivent être appréciées au regard de leurs obligations. Il convient tout d'abord de préciser que, s'agissant de la responsabilité civile, c'est en principe la responsabilité administrative de la commune dans le cadre de l'exercice des attributions de police municipale qui pourrait être recherchée sur la base de la faute de service, en application de l'article L. 2216-2 du code général des collectivités territoriales. La victime devrait alors apporter la preuve que la carence du maire à signaler un danger au préfet a eu un lien direct avecc le dommage subi. Cette responsabilité pourrait également être éventuellement recherchée si, en cas de péril imminent, le maire n'avait pas engagé les mesures prévues par l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation. Pour engager la responsabilité civile du maire sur la base de l'article 1382 du code civil, la preuve d'une faute personnelle du maire détachable du service devrait être apportée, ce qui ne pourrait qu'être exceptionnel. S'agissant enfin de la responsabilité pénale du maire, celle-ci pourrait le cas échéant être recherchée pour blessure ou homicide involontaire, sur les fondements des articles 221-6 et 222-19 du code pénal. Elle s'apprécie in concreto, comme le précise l'article 121-3 du code pénal, selon lequel il y a délit « sauf si l'auteur des faits a accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature des ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait », l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales reprenant et précisant ces dispositions. En l'espèce, les compétences et les moyens étant pour l'essentiel attribués à l'Etat, il semble que les responsabilités pénale et civile des élus et des collectivités locales ne pourraient donc être que très exceptionnellement mises en jeu.
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