Rubrique :
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nationalité
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Tête d'analyse :
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réintégration
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Analyse :
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certificats. Alsace-Moselle
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Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Pierre Baeumler attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'obligation parfois faite encore aujourd'hui aux Alsaciens-Lorrains de prouver leur nationalité française par le biais de certificats de réintégration. En effet, l'application des règles relatives à l'acquisition de la nationalité française par filiation impose aux descendants des personnes nées en Alsace-Lorraine avant 1918 de produire un certificat de réintégration dans la nationalité française de leurs parents pour pouvoir bénéficier de l'ensemble des droits dont jouissent les Français. Ainsi, des personnes de nationalité française nées, du fait des tourments de l'Histoire, sur un territoire alors occupé ou annexé et redevenu depuis celui de la République française, ainsi que leurs descendants, voient-elles leur nationalité mise en doute et sont contraintes de la prouver lors de certaines démarches administratives, et tout particulièrement lors du renouvellement de leur carte nationale d'identité. Les administrés considèrent que le droit de la nationalité qui leur est appliqué est plus restrictif et contraignant que celui en vigueur pour les descendants d'immigrés nés en France. Plusieurs mesures sont néanmoins venues assouplir les conditions de preuves exigées par les textes : une circulaire du 1er décembre 1993 du ministère de la justice, rappelée par une circulaire du ministère de l'intérieur du 25 janvier 1994, indique aux administrations et aux juges d'instance qu'ils ne doivent plus exiger l'extrait du registre de réintégration des intéressés pour preuve de leur nationalité. Il n'en reste pas moins que, dans certains cas, ces certificats doivent être fournis, ce qui est une discrimination vexante envers les personnes nées dans les trois départements de l'Alsace-Lorraine entre 1870 et 1918 et leurs descendants. Par conséquent, il souhaite savoir s'il entend abroger ces dispositions pénalisantes et de plus largement superfétatoires pour les administrés des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle.
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Texte de la REPONSE :
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la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'elle ne méconnaît nullement les difficultés d'ordre moral et matériel qu'a pu engendrer le problème de la réintégration des personnes qui ont perdu la nationalité française à la suite de l'annexion de l'Alsace-Moselle par l'Allemagne. Elle s'est exprimée à ce sujet lors de la réforme du droit de la nationalité et a fait adopter au nom du Gouvernement un amendement de nature à répondre pour l'essentiel aux préoccupations de l'auteur de la question. Elle rappelle que si le traité de Versailles du 29 juin 1919 a prévu l'inscription, à l'époque, des personnes susvisées sur les registres, la finalité poursuivie était de leur garantir une preuve indiscutable de la nationalité française, tout en écartant les étrangers domiciliés alors dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. Tout en comprenant le souci d'effacer les conséquences de cette période douloureuse de notre histoire, il ne lui apparaît pas possible de revenir par une fiction juridique sur la réalité de la perte de la nationalité française en considérant que ces trois départements ont toujours été des territoires français. En effet, en 1910, près du tiers de la population domiciliée en Alsace-Moselle était d'origine strictement allemande. Ne pas tenir compte de l'annexion conduirait à reconnaître à un grand nombre de ces personnes ou à leurs descendants la qualité de Français, alors qu'ils ne jouissent pas de la nationalité française ni ne la revendiquent et à méconnaître le principe de droit international qui impose de respecter une souveraineté étrangère reconnue par traité. C'est pourquoi le Gouvernement a préféré s'orienter vers une autre solution lors de la discussion du projet de loi sur la nationalité. L'amendement qu'il a fait adopter, devenu l'article 24 de la loi n° 98-170 du 16 mars 1998, supprime le caractère subsidiaire de la preuve par possession d'état de la nationalité française des personnes réintégrées. Cette règle complète en leur faveur un régime déjà dérogatoire, la possession d'état n'étant exigée pour cette catégorie de Français que sur une génération. L'ensemble de ce dispositif est de nature à répondre aux préoccupations de l'honorable parlementaire.
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