Texte de la QUESTION :
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M. Francis Hammel attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'opportunité d'alléger les formalités administratives et de raccourcir les délais relatifs à l'obtention de l'autorisation prévue par l'article 11 de la loi du 1er juillet 1901 pour les dons et legs au profit des associations déclarés d'utilité publique. Il lui demande s'il pourrait être envisagé que les héritiers en situation de famille ou de fortune précaire, interrogés par l'administration, soient les uniques bénéficiaires d'une réserve héréditaire (ascendants, descendants...), ou que l'administration se voit imposer un délai de réponse ; à défaut d'une réponse de l'administration dans un délai imparti, l'autorisation serait tacite. Il lui semble que cet allégement des formalités (qui étaient parfaitement justifiées en 1901) devrait aider les associations dans leur budget et encourager les libéralités.
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Texte de la REPONSE :
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L'article 910 du code civil, auquel renvoie l'article 11 de la loi du 1er juillet 1901 cité par l'honorable parlementaire, pose le principe général d'un régime d'autorisation pour les legs consentis en faveur des personnes morales. Les modalités d'application de ce principe ont, depuis 1901, profondément évolué sous l'effet de la décentralisation et de l'autonomie croissante dont jouissent les établissements publics. Ainsi, les personnes morales de droit public (collectivités territoriales et établissements publics) ne sont plus soumises au régime d'autorisation. Celui-ci continue en revanche de s'appliquer aux personnes morales de droit privé disposant de la capacité à recevoir les libéralités, notamment les fondations et associations reconnues d'utilité publique, ainsi que les associations à but exclusif d'assistance, de bienfaisance et de recherche scientifique ou médicale visées à l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901. La doctrine administrative qui s'applique en la matière repose pour l'essentiel sur la jurisprudence du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation. Les deux juridictions suprêmes considèrent en effet que l'article 910 du code civil donne à l'autorité administrative « le pouvoir d'apprécier, en fonction de l'intérêt général et des intérêts respectifs des familles et des associations gratifiées, s'il y a lieu d'accorder ou de refuser à ces dernières l'autorisation d'accepter les libéralités qui leur sont faites et, dans le cas de libéralité testamentaire, de n'accorder cette autorisation qu'à concurrence d'une quote-part du montant de la libéralité » (CE, 6 décembre 1972, sieur Billiet et Communauté sociale européenne). Pour atteindre ce but, l'administration, lorsqu'un legs en faveur d'une association ou d'une fondation lui est notifié par un notaire, procède à l'interpellation des héritiers selon des modalités fixées par le décret du 1er février 1896. Cette procédure concerne l'ensemble des successibles et non les seuls héritiers réservataires. Limiter l'interpellation à cette dernière catégorie d'héritiers reviendrait à la priver d'effet, puisque, compte tenu de l'existence même de la réserve, les legs en faveur de personnes morales ne peuvent porter que sur la quotité disponible de la succession. En outre, dans la pratique, la plupart de ces legs sont le fait de personnes isolées, sans héritiers réservataires. La longueur de la procédure s'explique par le soin mis par l'administration à s'assurer que les familles ne sont pas lésées et à réunir les éléments d'information sur la situation de famille et de fortune des héritiers lorsque ceux-ci s'opposent à l'exécution du legs. C'est pourquoi il semble difficile d'envisager un régime d'autorisation tacite : une décision fautive prise dans ces conditions ne porterait pas préjudice à l'Etat mais aux familles elles-mêmes. Il convient cependant de rappeler que les dispositions de l'article 8 de la loi du 4 février 1901, auxquelles les associations ne recourent guère, leur permettent d'accepter provisoirement les legs et de se faire envoyer en possession des biens dans l'attente de l'autorisation administrative. Enfin, le Gouvernement publiera prochainement une circulaire simplifiant et actualisant les dispositions de la circulaire du 9 décembre 1966 actuellement en vigueur.
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