FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 39985  de  M.   Sarre Georges ( Radical, Citoyen et Vert - Paris ) QE
Ministère interrogé :  industrie
Ministère attributaire :  industrie
Question publiée au JO le :  17/01/2000  page :  282
Réponse publiée au JO le :  21/02/2000  page :  1184
Rubrique :  entreprises
Tête d'analyse :  cession
Analyse :  groupes étrangers. conséquences
Texte de la QUESTION : M. Georges Sarre appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur le mouvement actuel massif de cession d'entreprises industrielles à des intérêts étrangers. Il relève que la tendance actuelle au rachat d'entreprises industrielles françaises par des groupes étrangers présente un caractère inquiétant. Il note que des PME comme l'afficheur Dauphin ou le papetier La Cellulose du Pin, mais également un grand groupe comme Pechiney, absorbé dans un ensemble plus vaste regroupant Alusuisse et Alcan, ont vu leurs centres de décision passer sous contrôle étranger. Il relève plus généralement que l'industrie française est la seule parmi celles des pays développés à compter autant de salariés employés par des entreprises étrangères : 26 % de la population active en moyenne selon une étude récente de l'OCDE. Il pointe enfin la logique de rentabilité financière exclusive qui est le plus souvent à l'oeuvre dans ces transferts de propriété à des groupes étrangers, et par conséquent leur impact relativement faible en termes de création d'emploi sur le territoire national. C'est pourquoi il lui demande quelle est à ce stade son analyse de la situation. Il désire connaître les mesures de contrôle ou d'incitation qu'il envisage de mettre en place pour y porter remède.
Texte de la REPONSE : Les chiffres du Service des statistiques industrielles (SESSI) montrent effectivement une progression continue de la pénétration étrangère dans l'industrie, surtout parmi les grosses PMI. Mais la cession d'entreprises françaises à des intérêts étrangers fait partie d'un mouvement mondial de montée des investissements directs et des fusions-acquisitions. En Europe, ce mouvement a été en particulier favorisé par la mise en place du marché unique et de l'euro. Les flux annuels d'investissements directs étrangers (IDE) dans le monde sont passés de 50 milliards de dollars au début des années 80 à 220 en 1990 et ont crû très rapidement depuis 3 ans : 338 milliards en 1996, 400 en 1997 et 640 en 1998. La question des investissements étrangers en France doit être mise en regard des investissements de groupes français à l'étranger, qui sont encore plus massifs. La France s'est située pour la première fois en 1998 au cinquième rang des acquisitions transfrontalières. Globalement, au premier semestre 1999, la France a conforté sa place de cinquième investisseur à l'étranger (derrière les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et peu après le Japon) avec une progression de 75 % par rapport au premier semestre de 1998. Les flux d'investissements directs de France à l'étranger excèdent les flux d'investissements étrangers en France depuis plus de dix ans. De même, les emplois contrôlés par les groupes industriels français à l'étranger sont plus nombreux que les emplois contrôlés par des groupes étrangers en France. Les deux tiers de ces échanges croisés d'investissement et de propriété se font à l'intérieur de l'Union européenne. On assiste progressivement à l'émergence de véritables sociétés européennes, et au niveau global de l'Europe la pénétration étrangère est beaucoup moins forte. Ainsi, la perte de centres de décision lors de rachats d'entreprises par l'étranger doit être relativisée par la participation à des centres de décision au niveau de puissantes multinationales françaises ou européennes. La pénétration étrangère dans l'industrie française est plus élevée que dans d'autres pays qui ont été longtemps moins ouverts mais qui s'ouvrent progressivement, comme le Japon ou l'Allemagne, mais n'est pas plus forte qu'au Royaume-Uni (le différentiel apparaissant dans les statistiques de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) reflétant des problèmes non encore résolus d'harmonisation des méthodes de mesure). L'intensité de la pénétration étrangère aux Etats-Unis est plus faible du seul fait de l'étendue de leur marché intérieur, comparable à celui de l'ensemble de l'Union européenne. Les groupes européens y sont généralement libres d'y acheter des entreprises, et les groupes français y sont d'ailleurs très largement implantés depuis la fin des années 1980. Les investissements étrangers dans l'industrie ne paraissent pas moins porteurs d'emplois que les projets issus de capitaux français. La Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) a relevé que les projets récents d'investissements étrangers permettent de créer ou de sauver entre 20 000 et 30 000 emplois directs par an. Au-delà de ce recensement, les études disponibles montrent que le mouvement de pénétration étrangère va souvent de pair avec une meilleure tenue de l'emploi (croissance ou moindre diminution). Cela peut s'observer au niveau des régions françaises comme au niveau des différents pays de l'OCDE, comme l'ont montré deux études publiées dans l'ouvrage collectif « Industrie française et mondialisation » (collection chiffres clés du SESSI 1998). Les échanges de prises de participation entre la France et ses partenaires sont ainsi un « jeu à somme positive ». Les investissements étrangers sont totalement libres en France depuis 1996, exception faite des secteurs sensibles liés à la défense et à la santé publique. Le maintien en France de centres de décisions industriels ne peut s'appuyer sur un retour en arrière en matière de contrôle des investissementss directs, mais passe par diverses mesures qui favorisent l'activité industrielle sur le territoire et son environnement matériel et réglementaire dans toutes ses dimensions.
RCV 11 REP_PUB Ile-de-France O