Texte de la QUESTION :
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M. Gautier Audinot appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les inquiétudes des professionnels des jeux de hasard. En effet, il semble, selon les conclusions des travaux du centre universitaire et juridique de recherche de l'université Paris-II sur les menaces criminelles, que l'absence d'une législation équitable en matière de jeux de hasard identique à celles des autres pays de l'Union européenne, favorise les désordres et troubles de l'ordre public ainsi que l'évasion fiscale créée par l'exploitation marginale de machines à sous. Afin d'éviter ces conséquences, cette profession aurait déposé un projet de législation auprès de son ministère le 27 juin 1997 comprenant notamment une réglementation très rigoureuse. Elle souhaiterait donc que ce projet soit pris en considération, ne serait-ce que pour servir de base de discussion au cours d'une table ronde réunissant les principaux acteurs concernés afin d'aboutir à une législation équitable comme dans tous les autres pays de l'Union européenne. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître ses intentions et les suites qu'il compte réserver à ce sujet.
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Texte de la REPONSE :
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L'honorable parlementaire appelle l'attention du ministre de l'intérieur sur la nécessité de mettre en oeuvre, sur le territoire national, une « législation équitable » en matière de jeux de hasard. Il doit être précisé que l'exploitation d'appareils de jeux dont le fonctionnement repose sur le hasard, ainsi d'ailleurs que leur importation, leur fabrication et leur détention sont interdites par la loi. Certes la loi n° 86-1019 du 9 septembre 1986 avait accordé une tolérance au profit des « machines douces » ou « appareils distributeurs de confiseries à lots ». Mais, les très nombreux et graves détournements de l'utilisation de ces appareils ont conduit le Gouvernement à inclure dans la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, une disposition portant abrogation de la dérogation ci-dessus mentionnée. C'est l'objet de l'article 34 de ladite loi. A l'inverse, ainsi que l'expérience a permis de le constater, tout assouplissement a pour effet de rendre les contrôles plus complexes, l'identification des appareils étant plus problématique. Le retour à un régime de fermeté en la matière a eu pour objet et pour conséquence effective de rendre moins délicate l'intervention des forces de police sur le terrain. Au demeurant, l'activité des agents chargés d'opérer les contrôles et de faire engager les poursuites, non seulement ne diminue pas, mais encore s'intensifie ; force est de répéter que le nouveau dispositif juridique, par sa clarté, n'est pas étranger à cette évolution positive. Il est en outre essentiel de prendre en compte la nécessité de protéger les mineurs contre l'offre surabondante de jeux d'argent et contre l'accoutumance généralisée au jeu que ne manquerait pas de provoquer tout assouplissement du dispositif applicable. On doit observer au surplus qu'une mesure de protection des joueurs, comme celle qui consiste, dans les casinos, à les exclure des salles de jeux, est dans la matière envisagée par la question, totalement impossible à mettre en oeuvre. Aucune limite au jeu n'est donc possible. En outre, il importe de souligner que la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a, dans l'arrêt Schindler du 24 mars 1994, indiqué que « les particularités propres aux jeux de hasard justifient que les autorités nationales disposent d'un pouvoir d'appréciation suffisant pour déterminer les exigences que comportent la protection des joueurs et, plus généralement, compte tenu des particularités socioculturelles de chaque Etat membre, la protection de l'ordre social, tant en ce qui concerne les modalités d'organisation des loteries, le volume de leurs enjeux, que l'affectation des profits qu'elles dégagent. Dans ces conditions, il leur revient d'apprécier non seulement s'il est nécessaire de restreindre les activités des loteries, mais aussi de les interdire, sous réserve que ces restrictions ne soient pas discriminatoires ». Cette même juridiction a confirmé sa jurisprudence, notamment récemment, puisqu'elle précise dans les mêmes termes dans les arrêtés Laara du 21 septembre 1999 et Zenatti du 21 octobre 1999 que « la détermination de l'étendue de la protection qu'un Etat membre entend assurer sur son territoire en matière de [...] jeux d'argent fait partie du pouvoir d'appréciation reconnu par la Cour aux autorités nationales [...]. Il appartient à celles-ci, en effet, d'apprécier si, dans le contexte du but poursuivi, il est nécessaire d'interdire totalement ou partiellement des activités de cette nature ou seulement de les restreindre et de prévoir à cet effet des modalités de contrôle plus ou moins strictes ». De surcroît, la CJCE décide que « la seule circonstance qu'un Etat membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par un autre Etat membre ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des dispositions prises en la matière. Celles-ci doivent seulement être appréciées au regard des objectifs poursuivis par les autorités nationales de l'Etat membre intéressé et du niveau de protection qu'elles entendent assurer ». Dans ces conditions, le Gouvernement n'envisage pas de modifier le dispositif juridique en vigueur.
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