Texte de la QUESTION :
|
M. Jean-Pierre Abelin appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conclusions du récent rapport remis par M. Pierre Pradier. En effet, il s'avère que les troubles ou maladies physiques sont correctement diagnostiqués, évalués et soignés pour l'ensemble des établissements pénitentiaires. Il apparaît en revanche que les troubles mentaux qui touchent un nombre élevé de détenus sont à tout le moins insuffisamment étudiés, surveillés et traités. En conséquence, il lui demande quelles ressources elle entend mettre en oeuvre en termes de structures et de moyens humains pour remédier à cette situation.
|
Texte de la REPONSE :
|
Mme le garde des sceaux informe l'honorable parlementaire que l'administration pénitentiaire, confrontée à une augmentation du nombre des détenus présentant des pathologies psychiques, manifeste une préoccupation accrue concernant la santé mentale de la population carcérale. L'enquête sur la santé des entrants en prison menée en 1997 révélait que 8,8 % d'entre eux avaient fait l'objet d'un traitement ou d'une hospitalisation en psychiatrie dans l'année précédant l'incarcération. La proportion de ceux qui déclaraient à l'arrivée un traitement d'antidépresseurs (4 %) ou de neuroleptiques (3,5 %) était nettement plus élevée que celle constatée dans la population générale (respectivement 2 % et 0,7 %). L'accroissement des besoins de la population pénale en matière de soins psychiatriques résulte de la baisse des irresponsabilités pénales (16 % en 1980, - 0,17 % en 1997 selon le rapport remis le 30 septembre 1999 par le docteur Pradier au garde des sceaux et à la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale), de l'allongement des peines (+ 26 % de la durée moyenne de détention en dix ans) lequel serait un facteur d'augmentation du nombre des décompensations psychiques, et enfin de la multiplication des condamnations pour crimes et délits sexuels (catégorie de population particulièrement fragile psychologiquement). Confiée depuis 1986 (décret n° 86-602 du 14 mars 1986) au service public hospitalier, la prise en charge médico-psychologique des personnes détenues a vu ses moyens très largement renforcés ces dernières années dans le budget que lui a consacré le ministère de la santé : de 60 millions de francs par an avant la réforme de 1994, il a été plus que triplé en quatre ans, étant porté depuis 1998 à 190 millions de francs, majoré du taux d'évolution des dépenses. Le dispositif de droit commun correspondant à ce financement s'articule en deux niveaux de soins : dans tous les établissements pénitentiaires (exceptés les 21 établissements à gestion mixte), les prises en charge ambulatoires sont réalisées par l'équipe de secteur de psychiatrie générale locale (actuellement 125 secteurs de psychiatrie interviennent à cette fin en milieu pénitentiaire) ; les services médico-psychologiques régionaux (SMPR) constituent une véritable implantation en détention de services hospitaliers destinés à recevoir les personnes détenues aussi bien en suivi ambulatoire qu'en hospitalisation volontaire. Parmi les 26 SMPR qui ont été créés, 20 remplissent déjà les deux missions. Les 6 autres sont encore en phase transitoire dispensant les soins ambulatoires dans l'attente de l'ouverture prochaine de leur unité d'hospitalisation. A cet égard, la direction de l'administration pénitentiaire s'informe régulièrement auprès de ses services déconcentrés des obstacles rencontrés (réalisation de travaux ou recrutement de personnel à effectuer) et met en oeuvre les moyens nécessaires pour éviter les retards susceptibles de lui incomber ; les hospitalisations sans le consentement de la personne sont réalisées sous la forme d'hospitalisations d'office dans les établissements de santé habilités (800 hospitalisations d'office en 1998). A côté de ce dispositif de droit commun, qui concerne 165 des 186 établissements pénitentiaires, d'autres modalités sont applicables aux 21 établissements à gestion mixte créés par la loi n° 87-432 du 22 juin 1987, pour lesquels la fonction santé est gérée par les groupements privés. Ces derniers assurent le recrutement des personnels de santé en fonction du cahier des charges que leur impose l'administration pénitentiaire dans la conclusion du marché. L'évaluation demandée au docteur Pradier avait pour objet la question du maintien ou de la suppression de la délégation aux groupements privés de la fonction santé dans ces 21 établissements. Au regard de ses conclusions, le renouvellement des marchés inclura toujours le chapitre de la santé. Le nouveau cahier des charges fixé par l'administration pénitentiaire pour les appels d'offres renforce les moyens des unités médicales en vacations de psychiatres et de psychologues : dans les maisons d'arrêt de 600 places, il est prévu un équivalent-temps plein de psychiatre et un équivalent temps plein d'infirmier psychiatrique (comme précédemment) et il y est ajouté 2 équivalent temps plein de psychologue ; dans les centres pénitentiaires de 600 et de 400 places, il est prévu un équivalent-temps plein de psychiatre au lieu d'un mi-temps, et il y est ajouté un équivalent temps plein de psychologue (en plus ou à la place d'un temps plein d'infirmier psychiatrique). - dans les centres de détention de 600 places et de 400 places, les vacations de psychiatres seront aussi plus nombreuses et il y sera ajouté 0,75 équivalent-temps plein de psychologue. Concernant les six nouveaux établissements à gestion mixte qui vont être construits, la fonction santé ne sera pas confiée aux groupements privés et reviendra au service public hospitalier selon le dispositif de droit commun.
|